
(suite…)La lumière du matin continuait d’envelopper la ville


(suite…)il va nous falloir « sortir », et qu’advienne que pourra, car aucune société ne peut vivre terrée dans la peur


(suite…)FN (1987): « Les sidaïques sont de véritables bombes virologiques. On ne fera pas de progrès dans la lutte contre le sida sans isoler les patients. »


(suite…)Nos gouvernements ont prétendu le contraire à coup de pass sanitaire et de « freedom day ». Et patatra.

Hier, nous avons eu la confirmation que nous serions de nouveau dans une nouvelle période de « restrictions » liée à « la déclaration d’urgence sanitaire », la quatrième. Avec la pluie, c’est un peu comme si on faisait un combo.
La saison des pluies, c’est une humidité incessante, ce sont ces pluies fines qui jamais ne s’arrêtent, ou si, mais alors on ne s’en rend même pas compte tant alors la température augmente et qu’on a le corps gluant, on en vient à souhaiter une averse qui viendra nous rafraichir, et la voilà, tiens, l’averse, mais alors ça ne change rien, ce n’était qu’un faux espoir car sitôt passée on recommence à avoir chaud. Parfois, alors que chaque jour le ciel est invariablement désespérément gris pointe le soleil, et alors, on cuit littéralement.
Non, on brûle.
Cette année, c’est une saison des pluies chaude. Il en est de fraîches, il en est de courtes. Celle-ci a commencé avec du retard, mais elle donne maintenant l’impression de s’éterniser.
Hier, nous avons eu la confirmation que nous serions de nouveau dans une nouvelle période de « restrictions » liée à « la déclaration d’urgence sanitaire », la quatrième. Avec la pluie, c’est un peu comme si on faisait un combo.
Un désespoir sans fin sous le ciel gris.
Ici aussi, la gestion de la pandémie a été une véritable mascarade. Alors bien sûr, oui, c’est vrai que nous portons le masque depuis janvier 2020, nous, que nous passons notre temps à nous asperger les mains d’alcool depuis février 2020, nous, et que nous ventilons à peu près partout depuis avril 2020, nous, et que les personnes âgées ont été invitées à éviter les déplacements dès le mois de février 2020, chez nous.
Les résultats sont assez probants, on a environ 10 fois moins de morts que la France, avec deux fois plus d’habitants et une population bien plus âgée. Ce sont des mesures de bon sens et la population s’y plie malgré une lassitude de plus en plus palpable.
Beaucoup de japonais ressentent une sorte d’incrédulité face à cette épidémie. Et puis un jour, un proche, un voisin, un commerçant, et là ils comprennent que ce n’est pas une fiction. C’est certainement ce qui explique l’incroyable accélération de la campagne de vaccination. Déjà plus de 50 millions de japonais ont reçu leur première dose, et plus de 15 millions leur deuxième dose. Pour une campagne commencée si tard, et avec des problèmes d’organisation, d’approvisionnement, c’est un bel exploit. À la japonaise, dirons-nous.
Ce que le Japon a raté, par contre, et qui explique la reprise des contaminations, ce sont les tests. Bien sûr, comme en France, il y a eu les tergiversations, une constante obsession à minimiser l’épidémie pour sauver les Jeux Olympiques, et donc une incapacité permanente à décider.
On est sortis du premier (presque vrai) confinement trop tôt, et alors que peu de tests étaient réalisés, et alors que rien n’avait été vraiment fait pour accroitre le nombre de lits de soins intensifs, parce qu’aussi incroyable que cela puisse paraître, le Japon a le plus de lits d’hôpitaux au monde mais se trouve placé sous la moyenne du continent africain pour le nombre de lits de réanimation et de soins intensifs.
Ici, la médecine est une vache à lait, on pratique, comme en France, le paiement à l’acte, et les hôpitaux ont développé les structures d’accueil de jour où on facturera généreusement les petits bobos à coup (coût) d’analyses sanguines, de scanner et d’hospitalisation d’une nuit.
On est sortis trop tôt du confinement, donc, mais pire encore, le conseiller du premier ministre d’alors et devenu depuis premier ministre, a eu l’idée d’une campagne pour relancer le tourisme: hôtels et trains à 33% du prix et coupons de réduction pour le musées, les restaurants, etc.
On a eu un véritable boom dans tout le pays, assorti d’une explosion des contaminations sur tout le territoire là où jusqu’alors l’épidémie était relativement cantonnée aux très grandes villes. De cette campagne au nom ridicule, « Go to travel », « Go to Eat » (que le twitter japonais a rebaptisé « Go to Hell » ou « Go to the Hospital »), nous ne sommes réellement sortis, d’un point de vue épidémiologique, qu’au mois de mai cette année.
Certains départements ruraux, assez peu équipés pour faire face à un afflux de malades graves, ont été débordés et on a eu des centaines de personnes mortes seules, chez elles, car il n’y avait pas de lit pour les accueillir.
Malgré la reprise des contaminations dès l’été 2020, exactement comme en France, le gouvernement a reculé les décisions le plus possible. Il a fallu que l’épidémie soit hors de contrôle en décembre pour que finalement il se décide enfin à stopper cette campagne et à déclarer à nouveau l’urgence sanitaire.
Entre temps, il avait pu « protéger » la saison des feuilles d’érables, et de fait novembre et décembre ont vu des records de fréquentation à travers tout le pays et nous avons même connu un taux de croissance de 29% annualisé, du jamais vu. Ça vous laisse imaginer l’intensité de l’activité.
C’était une énergie palpable.
Je crois qu’il y a là une particularité de « l’âme japonaise » liée aux séismes et aux catastrophes naturelles ainsi qu’au polythéisme. Ce qui a été a été, c’est fini. On tourne la page et on passe à autre chose. Et on détourne le regard des dommages causés, des familles en deuil, tout en en parlant quand on ne peut pas faire autrement avec un visage affligé avant de changer de sujet.
Ce n’est pas que les japonais soient indifférents, mais c’est juste qu’il doit être inscrit très profondément en eux l’évidence que pleurer les morts et pleurer ce qui n’est plus ne les ramènera pas à la vie, et que cela empêchera de reprendre la vie. Des millénaires de séismes et de typhons destructeurs, je pense.
La période septembre-décembre, ça se sentait, on était en plein boom économique, c’était assez incroyable, partout des gens, avec des sacs, un grand sourire caché sous le masque…
C’est humain. Et puis bien sûr, il y avait cette certitude que le Japon avait été épargné et qu’il le serait encore. Cette frénésie a duré jusque début décembre, c’était presque comme une orgie de courses et puis la conversation a commencé à changer. Les contaminations étaient hors de contrôle, ici et là c’était un collègue, un voisin ou un proche qui était contaminé. Et la population a accusé le gouvernement de ne rien avoir fait.
La seconde « déclaration d’urgence sanitaire » a duré jusqu’en mars, et une fois encore, elle a été levée trop tôt, du coup, dans les jours qui ont suivi, les contaminations ont repris de plus belle, particulièrement à Osaka, avec des histoires tragiques d’agonies de patients morts seuls sans trouver de place, avec les ambulances qui tournaient d’hôpitaux en hôpitaux.
Le Gouverneur, une sorte de beau gosse de droite assez sexy de 40 ans devenu très populaire avec cette épidémie, a imposé de très strictes restrictions avant même que le gouvernement ne se décide.
J’écris « beau gosse » parce que c’est ce que tout le monde dit de lui, イケメン, ikemen.
On a donc très vite enchainé sur une troisième déclaration d’urgence sanitaire dès le début du mois d’avril, elle aussi levée trop tôt, et alors que commençait la campagne de vaccination dans un cafouillage incroyable. Milliers de doses jetées suite à des problèmes de congélateurs ou d’erreurs de manipulations, absence de docteurs qualifiés, etc
Et alors que nous en sommes sortis début juin, avec des centaines de contaminations encore enregistrées chaque jour pour Tôkyô seulement, on en est sorti. Et c’est reparti à la hausse immédiatement.
Car dans toute cette histoire, il y a un fait permanent. L’obsession de tenir les Jeux Olympiques, avec la pluie d’argent attendue par les grosses légumes de certaines grosses entreprises, à commencer par Dentsu, un leader mondial de la communication et de la publicité, dont un certain nombre de dirigeants vont recevoir des salaires pour le simple fait d’assister à l’évènement. Plus de 2000 euros par jour, a révélé la presse. Dentsu qui est toujours en procès pour avoir « acheté » les Jeux Olympiques…
Cette obsession à tenir les Jeux Olympiques a conduit le gouvernement à opter pour une politique très restrictive des tests. On ne teste que quelques dizaines de milliers de personnes par jour, ce qui permet de garder le chiffre bas. Si vous présentez des symptômes, vous êtes invités à rester chez vous et à attendre de deux à quatre jours. Et ce n’est qu’après que vous serez éventuellement invités à faire un test.
Or, on sait que ce virus est pour une grande majorité un très mauvais rhume et rien d’autre, bref, pour beaucoup de gens les symptômes se dissipent d’eux-même, et donc au Japon beaucoup de gens contaminés ne sont pas testés. De ce fait, le virus circule activement sans être réellement tracé, d’où la très vive reprise dès que l’activité repart là où dans les autres pays la reprise des contaminations se fait très graduellement.
Le gouvernement japonais a péché sur deux points cruciaux, et cela pour pouvoir présenter des chiffres raisonnables afin de maintenir les Jeux Olympiques.
Il a constamment tergiversé, refusé de reconnaitre l’épidémie et de prendre des décisions par anticipation. Nous n’aurions jamais du avoir cette connerie de « Go to » et nous aurions du avoir une première période de restrictions plus tôt, et plus longue, et l’argent utilisée pour contaminer tout le pays avec « Go to » aurait du être utilisé pour préparer les hôpitaux.
Quand l’épidémie est repartie à l’automne, nous aurions du avoir une nouvelle période de restrictions, mais cette fois-là de « restrictions douces », avec mobilisation des médias, pour inviter la population à être vigilante, et parallèlement, les écoles auraient du être de nouveau fermées, ou mises en roulement comme cela s’est fait avec succès dans certains départements.
Et si cela n’avait pas suffi, il aurait fallu aller plus loin et réinstaller une réelle « déclaration d’urgence » comme au printemps l’an dernier, beaucoup plus longue, le temps de mettre en place la campagne de vaccination en la démarrant plus tôt.
Cette obsession à masquer la réalité est d’autant plus regrettable que les japonais ont été remarquables en matière d’auto-contrôle « à la japonaise » (l’auto-contrôle, ici, c’est plutôt un contrôle social où on ne se restreint que de peur d’être vu par les autres) et que ce sens du collectif explique, malgré le peu de confiance que je place dans les chiffres artificiellement bas des contaminations, le nombre très nettement inférieur de victimes ici.
Et pour tout dire, je ne doute pas un instant que l’allure que prend la campagne de vaccination va en faire un autre succès.
Je sais parfaitement que le vaccin ne nous empêchera pas de tomber malade. Je ne comprends pas cette façon de traiter les gens comme des enfants en évacuant la réalité derrière ce discours hystérique sur la vaccination qui n’a d’égale que l’hystérie des antivax.
Ce vaccin, c’est une façon de bâtir de l’immunité collective sans transformer nos hôpitaux en charniers et le corps médical en croques morts.
Le réel problème de ce virus, ce n’est pas sa dangerosité. C’est sa contagiosité, et à travers elle sa capacité à muter plus rapidement que d’autres coronavirus. Le seul moyen de casser ce cycle, c’est de le rendre gérable en préparant notre corps à le rencontrer sans risquer de mourir même si on tombe malade. C’est pourtant simple à expliquer, non?
Pour le moment, et malgré la reprise des contaminations en Grande-Bretagne ou ailleurs, on n’observe pas de reprise des hospitalisations comme on l’avait observée il y a 6 mois dans un contexte similaire de reprise de l’épidémie. Si le vaccin nous permet d’obtenir cela, alors on pourra vivre avec ce virus comme nous vivons avec la grippe.
Personnellement, je ne compte pas les vagues comme les médias ou les politiques.
Pour moi, en ce moment, c’est la deuxième vague, celle qui est sensée être la plus mortelle, et nous n’accumulons les vagues que parce que nous avons recours à des restrictions régulières.
C’est la vraie deuxième vague car nous avons à faire à des souches ayant muté de façon substantielle et présentant des caractéristiques qui en font presque de nouveaux virus. Delta frappe beaucoup plus les jeunes, par exemple, et sa contagiosité est près de 4 fois supérieure à la souche originelle, pourtant déjà très élevée.
Si j’en crois ce que j’ai appris sur les virus, nous aurons une troisième vague avec une nouvelle souche, cette fois plus gérable, et alors qu’à priori la circulation du virus dans une population vaccinée nous aura donné une certaine immunité.
Nos responsables politiques pêchent par leur manque de confiance. Ils nous mentent parce qu’ils pensent que nous sommes stupides. Ils ont été, de toute cette épidémie, les premières sources de désinformation, que ce soit sur les masques, les tests, leur obsession à rouvrir l’économie ou ce qu’ils dissimulent sur la réalité des vaccins.
Ainsi, les pass sanitaires induisent que la vaccination protège les autres quand en réalité c’est faux, il est à peu près certain qu’une personne vaccinée peut contaminer, et de toute façon nous n’avons pas suffisamment de données ni de recul pour affirmer le contraire. Il y a juste qu’éventuellement, elle le fera moins, et sur une période plus courte. Et ce n’est finalement pas si mal.
Pour le coup, maintenant que le nombre de personnes vaccinées augmente, plutôt qu’un pass sanitaire, il faudrait encore encourager encore plus le port du masque car il s’avèrerait bien plus protecteur que le museau à l’air libre. Mais visiblement, c’est beaucoup plus pratique de créer un fichage de vaccination assorti à la promesse d’un « retour à la normale », c’est à dire au consumérisme touristique.
Ici aussi, on va l’avoir.
Moi, je vais recevoir mon premier shot – Moderna – dans une petite dizaine. Et je vais avoir mon pass sanitaire aussi.
Bien que je trouve ce pass absolument stupide, inopérant et questionnable en matière de protection des données personnelles, je ne suis pas un résistant à deux balles. Je suis un « common man » pour reprendre l’expression tant de fois utilisées par celui qui restera dans l’histoire le plus étonnant vice-président américain, Henry A. Wallace.
Je suis un travailleur précaire avec de faibles revenus et dont les seuls luxes sont mon pays de résidence, mes appareil-photos, ma passion pour l’économie, l’écriture, la lecture, regarder des images et des peintures, me promener… Jouer au rebelle anti-pass sanitaire, à mon niveau, non. Je peux éventuellement signer une pétition à ce sujet, pour que ce soit une autorité indépendante qui en gère le serveur et qui détruise les données après un certain temps, etc Oui, ça oui.
Pour le reste, j’ai une trop haute idée de ce que « résister » veut dire, à Paris en 1941, à Varsovie en 1943, à Alger en 1956, en Palestine depuis 1948, ou quand on s’appelle Assange, Snowden ou Manning pour ne citer que quelques exemples et ne pas jouer au héros du net. Je suis très réaliste sur ce sujet…
Jour de pluie, donc, et dernier weekend avant les nouvelles restrictions. Quelle triste époque.
Cette chaleur m’assomme littéralement, et mes mardis, désormais pleins du matin à tard le soir sont un véritable coup de massue. Je fais des nuits profondes où je me réveille après des rêves intenses et amusants à la fois, signe que mon cerveau est très actif et profite pleinement de ces 6 heures trente qui visiblement me semblent nécessaires pour recharger.
J’ai acheté des chaussures de course, je veux me mettre à courir. Enfant, j’adorais courir, je passais mon temps à ça, et puis je suis allé vivre un an chez mon oncle et ma tante, et l’habitude m’est passée. Il y a bien eu le vélo, il y a bien eu la natation, il y a bien toujours ces promenades qui en sont une vague réminiscence mais j’ai au moins autant la nostalgie de mes courses ici et là que de la flûte…
Saison des pluies pour quelques jours encore, et puis après les grandes chaleurs de l’été, et puis Kyôto dans un mois.
Comme je le disais hier, tout passe, finalement…

Tu ne peux pas imaginer à quel point je suis fatigué d’ici, je veux revoir les horizons de brume de l’ouest de la France, je veux revoir la Sarthe, je veux m’arrêter au hasard des gares, visiter la cathédrale de Chartres

Bonjour… Hmmm, par quoi commencer. Février a été rapide, fulgurant même. Me voici donc de nouveau travailleur précaire au Japon, avec un contrat aléatoire dans un marché du travail qui ne l’est pas moins. Février, ça a donc été faire les démarches administratives qui vont avec, l’agence pour l’emploi, etc Ce n’est pas une situation aisée car cela me ramène à mon histoire familiale, la pauvreté, la crainte de manquer, les angoisses de mon père de se voir retirer son autorisation de séjour quand il a perdu son travail, les angoisses de maman pour boucler les fins de mois. On ne sort jamais indemne d’une histoire difficile, tout au plus on apprend à faire la part des choses et à bien comprendre qu’on n’est pas ses parents et qu’il n’y a aucune raison de revivre une histoire qui n’est pas la sienne.
Mais comme toujours, cela agit « en toile de fond ». Cela étant, passée l’espèce de sidération qui a accompagné ma nouvelle situation, la colère aussi, j’ai finalement relativisé. Il y en a tellement qui en ce moment sont en train de tout perdre, de souffrir… J’entre, à reculons certes, dans quelque chose de nouveau où il va falloir que je me détache de beaucoup de mes habitudes mais en attendant, ça devrait finalement assez bien se passer. J’aborde les mois qui viennent assez calmement.
Tout ça pour vous dire que je n’ai pas trop eu la tête à venir sur mon blog – partager mes humeurs ne valait pas trop la peine car dans de telles circonstances, on finit toujours par beaucoup plus s’épancher et tourner en rond, c’est fatigant pour vous, c’est fatigant pour moi.

Vieux projet datant de plusieurs années et sans cesse repoussé je ne sais pas trop pourquoi, j’ai enfin une platine disque. Un très bel objet datant de 1984 en très bon état, une Denon dp37f. Visiblement, la dp-47f, le modèle du dessus, était très prisée à l’époque et du coup, il est impossible de la trouver pour pas cher, mais la dp37f à qui elle a fait de l’ombre, on la trouve à de bons prix. Je sais que par chez vous, les importateurs la revendent à prix d’or mais ici, pour le moment, c’est très raisonnable.
Un très bel objet, donc, comme on n’en fait plus pour moins de 1000 euros. Fabriquée au Japon, avec une jolie caisse en bois verni, en très bel état, très lourde bien sûr et dotée des « dernières technologies » de ce qui a été l’âge d’or de la platine disque – entrainement direct et vitesse contrôlée par processeur « quartz », contrôle électronique du bras (poids, anti-skating, déviation, etc), totalement automatique -, je l’ai adoptée dès que je l’ai vue.
Auparavant, je voulais une platine actuelle, mais très vite j’ai découvert qu’à moins de 1000 euros, les platines actuelles sont de moins bonne qualité que ce qui se faisait dans les années 80. J’ai donc commencé à regarder les platines d’occasion, et esthétiquement, j’ai tout de suite eu le coup de foudre. Le bras tout fin, droit et très long enveloppé dans sa coque « servo-drive », les très belles proportions, elle offre un très bel équilibre entre formes rondes et formes carrées.
Elle est en très bon état. Que je vienne à devoir m’en séparer, je pourrai sans problème la revendre au même prix voire même plus cher.
J’ai acheté un pré-ampli puisque les platines en ont besoin et que mon amplificateur n’en a pas. Là, j’ai fait dans le pas cher, Audio-Technica. Il a toutefois eu de très bonnes revues.

Il ne restait plus qu’à acheter quelques disques. J’ai fait ça un peu à l’arrache, j’avais peu de temps et je me suis littéralement noyé dans la boutique, et puis surtout il était hors de question de dépenser une fortune. Il y avait des bacs à 100 yens, des bacs à 300 yens…
Pour 450 yens (3,50 euros), j’ai acheté un « objet », un truc que je n’aurais jamais pensé à acheter autrement qu’en vinyle: Ça, c’est paris, サ、セパリ, un coffret « luxe » de deux albums « hi-fi stéréo » de chansons sur Paris. Yves Montand, Juliette Gréco, Patachou… C’est surtout l’objet qui m’a fait sourire, avec ses photos du « Paris éternel » qui a du faire rêver son propriétaire il y a une cinquantaine d’années.

Pour 450 autres yens, un double-album de Yves Montand de 1976, encore un truc que je n’aurais ni même acheté autrement, ni même pensé à écouter, mais je ne sais pas, l’album m’a fait de l’oeil et il y a dedans quelques chansons que j’aime comme Les feuilles mortes ou Bella Ciao, Les grands boulevards, Battling Joe ou L’âme des poètes.

Pour 450 yens encore, l’album de Bronski Beat, The age of consent. Je n’ai même pas hésité (contrairement aux deux autres). C’est un album beaucoup trop important, un album qui raconte une part importante de mon identité comme de mon histoire même si, lors de sa sortie, je n’aimais pas, ce n’était pas mon genre de truc. Il a fallu que je vois Partying Glances en 1986 pour littéralement absorber la signification profonde de cet album. La couverture m’a toujours fasciné. Les textes sont très beaux.

Pour 750 yens, un des albums que j’étais parti pour acheter, Roxi Music, Flesh and Blood. Je l’ai en version haute qualité mais je voulais l’objet. À mes yeux, le meilleur album du groupe, une incroyable maturité.
J’arrive à la caisse et le caissier me dit que si j’achetais 5 albums à un certain prix, j’avais droit à une réduction de 1000 yens. Je n’avais pas le temps, je venais de me noyer une fois dans un trop plein d’albums, limitant mon choix à des trucs soldés, et ça a été « panique à bord ».

Je me suis souvenu avoir vu un maxi de Simple Minds, Someone Somewhere (in Summertime), un titre que j’aime beaucoup, 750 yens, je l’ai acheté, ce qui m’a fait économiser 250 yens!
Je veux y retourner, mais cette fois il me faudra deux ou trois heures et quelques pistes d’achats possibles. J’avais pensé à quelques albums mais il n’y avait que le Roxy Music. Par contre, de bacs en bacs, c’était comme si ma vie défilait sous mes yeux au hasard de l’exploration. Et surtout, je me suis beaucoup amusé de voir bradés ici ces « pressages japonais » qui coûtaient une fortune il y a 40 ans.
Seuls « Ça c’est Paris » et Roxi Music sont des « pressages japonais ». Bronski Beat est un pressage canadien, Montand un pressage français, Simple Minds un pressage anglais.
Des achats de hasard, donc, mais qui m’ont permis, lundi soir, de tester mon nouveau joujou. Je ne me souvenais plus du son des disques. Les petits craquements, et puis un je ne sais pas trop quoi, un son plus plein. Les CD, c’est très clairement fatigant, l’aigu grince. Le mp3, je n’en parle même pas, une simple écoute comparative avec un CD, on perd toute l’ampleur du son. La HighRéso, c’est vrai qu’on a tout mais là, c’est ailleurs que ça se situe. C’est une musique invisible, et c’est trop parfait.
Le disque, lui, a une présence incroyable, il est là, il est tangible et il se fait l’intermédiaire avec l’artiste, il est la preuve que quelqu’un a fait la musique. J’avais oublié cette sensation.

Et puis aussi on ne m’enlèvera pas de l’esprit qu’il y a beaucoup plus d’informations gravées. Certes, la Haute Résolution est infiniment plus exacte – j’utilise le logiciel Audirvana qui déconnecte tous les filtres de l’ordinateur pour envoyer le signal intact à l’ampli-DAC sans aucune interférence, mais ce n’est pas pareil, le son n’en est pas moins tranché, réduit en des impulsions qui seulement à la fin deviennent des vibrations.
Le vinyle, c’est du son du début à la fin, et malgré ses imperfections, ce qui est gravé est l’exacte emprunte de ce que l’artiste a fait. Aucun saucissonnage. J’ai lu beaucoup d’articles sur les limites de l’auditions, on parle de Nyquist du nom d’un scientifique qui a mesuré tout ça il y a une centaine d’années, mais je ne suis pas vraiment d’accord. La science ne mesure pas tout.
Il est admis que l’oreille moyenne ne mesure pas vraiment de différence entre un mp3 à 320 et un CD, et qu’un CD est techniquement équivalent à un disque vinyle voire supérieur. Et pourtant, dès le milieu des années 80, le débat a commencé à monter dans la communauté audiophile, chez ceux qui écoutaient de la musique classique particulièrement, l’idée qu’il y avait une certaine « fatigue » après une heure à écouter un CD.
On dit beaucoup que ce sont les DJ qui ont sauvé le vinyle, c’est oublier un peu vite les audiophiles qui ont continué d’écouter de la musique sur des platines disques aux formes délirantes pesant plusieurs kilos, isolant le moteur, le disque et le bras. Les audiophiles ont abandonné le CD au milieu des années 90 après en avoir été les supporters 10 ans auparavant.
Pour ma part, je confirme, l’écoute d’un opéra à un certain volume avec un CD provoque une fatigue, une envie d’écourter l’expérience que je n’ai jamais ressentie avec un disque. Ça crie. Quand à la haute résolution, je ne sais pas si c’est purement psychologique, il y a vraiment toutes les informations, le son est plein, il est ample et pourtant il y a quelque chose de « transparent », et je me demande si finalement on ne préfère pas la façon dont les ingénieurs du son mixaient à l’époque du vinyle, quand ils compressaient les sons du fait de la limitation technique du disque. Les « piano » étaient moins « piano », les « fortissimo » étaient moins « fortissimo » mais quelque part à l’arrivée le son remplissait la salle d’écoute quand les enregistrements modernes, terriblement précis, nous laissent seuls dans notre 15 mètres carrés avec les réverbérations d’une cathédrale du 14e siècle dans laquelle notre expérience auditive se noie. Plusieurs fois ça m’a fait cette impression d’une acoustique qui ne cadre pas avec mon expérience. En « compressant » pour le disque et en évitant les effets de réverbération, les ingénieurs du son rendaient l’expérience plus vivante, plus présente, palpable. Ce chanteur, là-bas, au fond, ben il était là. Désormais, il est bel et bien là mais toute la profondeur qui l’entoure ne colle pas avec l’expérience.
J’aime bien, quand je me fais un peu geek, ça m’amuse.
Et puis surtout, c’est un achat de décontraction, un truc qui m’a permis de sortir du stress lié à mon contrat. C’est important, quand on traverse un moment difficile, de s’accorder de la marge si on en a la possibilité. Pour un malade de faire un voyage. Pour un chômeur de s’accorder un truc, un achat pas nécessaire. Pour un étudiant en échec, une semaine sans étudier du tout. Pour un artiste sans travail de s’investir dans un nouveau projet même si à priori ça n’ira nulle part. Pour un obèse malade et luttant pour reprendre le contrôle de son poids, de s’accorder une folie, un truc pas raisonnable. C’est important car c’est une distraction, au vrai sens du terme, et surtout cela permet de fixer une limite entre ce qui est acceptable et ce qui ne le sera pas.
Je me suis acheté un objet qui n’étais pas nécessaire mais je n’ai pas explosé mon budget, et en ayant recours à l’occasion, je me suis acheté un bel objet, d’une qualité bien supérieure à ce que j’aurais pu m’acheter pour le même prix, un objet que j’ai adopté au premier regard et qui m’a fait plaisir tout de suite même s‘il m’a fallu attendre 8 jours pour le recevoir, me permettant au passage de ne pas céder totalement à l’achat compulsif qui est un achat immédiat.
Je me suis fait plaisir en achetant quelques albums au hasard mais à l’arrivée, 15 euros pour 5 albums, là non plus je n’ai pas été déraisonnable.
En fait, il y avait une sorte de limite en moi que je n’ai pas franchie. Je voulais une platine, la musique est pour moi quelque chose d’important, cela faisait longtemps, je suis amené à être chez moi beaucoup plus souvent qu’avant, c’était le moment. Financièrement, ça l’était moins. La limite s’est définie progressivement, quand j’ai commencé à regarder des platines plus chères et « mieux », et que je me disais que « non », je ne pouvais pas, revenant sans cesse à une produit d’exposition un peu abîmé et bradé dans une boutique à Akihabara. Une platine multi-primée ces dernières années. Je suis allé la regarder, il y avait quelque chose de vilain dans son état, mais « je la voulais ». Ça, c’est l’achat compulsif typique. J’ai repensé à mes parents qui, malgré les problèmes d’argent, n’achetaient que des objets soldés ou d’occasion, mais de qualité. Et c’est ainsi que je suis arrivé à ma platine Denon. Elle m’a coûté moins cher que l’autre, elle est dans un très bel état, et elle est d’un tout autre niveau. Et comme je l’ai dit plus haut, si je dois m’en séparer, je n’aurai aucun mal à la revendre au même prix ou même plus cher. D’ailleurs, comme sa grande soeur la dp47f explose les prix, il y a un engouement sur la dp37f qui se développe et les prix ne tarderont certainement pas à monter.
Alors quoi… Ben je me suis fait plaisir, et c’est quelque chose d’important quand par ailleurs je limite mes dépenses pour m’ajuster à ma nouvelle situation. J’ai fait toute la paperasse nécessaire car il y a des aides ciblées de mon arrondissement et de l’ambassade de France, et je les ai demandées. Je ne sais pas si j’aurai droit à toutes malgré une chute de plus de 1/3 de mes revenus. Ce qui compte est que je les ai demandées. Je me suis fait plaisir pour me sortir la tête du mode panique dans lequel j’ai parfois été en janvier. Pour me prouver peut-être inconsciemment que ça va, et quand on cherche un emploi, quand on cherche à rebondir, c’est certainement le plus important.
J’aide mon amie Tarika a refaire son site internet, ça m’a demandé un peu de temps, mais son site était une véritable horreur, or elle en a besoin pour trouver du travail: elle est danseuse. Son site est totalement nouveau maintenant, propre, moderne et prêt pour recueillir tout ce dont elle a besoin. Je la coache un peu car pour les artistes, en ce moment, c’est la catastrophe. Disons plutôt que nos conversations la maintiennent dans la focus. Et ce faisant, je m’aide également dans ce qui s’annonce comme ma reconversion. Quelque part, en la coachant, elle me coache indirectement car je focalise sur ce qui est important pour elle, et donc pour moi.
De la même façon que la flûte baroque que j’ai achetée l’an dernier est l’objet par lequel j’ai dit au revoir à maman tout en renouant le fil avec tout un pan de ma propre histoire, cette platine disque est le symbole du chemin dans lequel je m’engage et me désembue l’esprit. C’est fini, la bagarre…
Je me suis replongé dans un grand chantier laissé en plan il y a des années, un truc alors trop ambitieux pour moi. Cet énorme chantier sous les yeux, je me suis senti bête, j’avais un bijou magnifique et je l’ai laissé en plan, sans aucune attention, en train de prendre la poussière. Et quand je dis un bijou, c’est vraiment ce que j’ai compris.
Faites-vous plaisir, même si c’est à la limite du raisonnable. Faites-vous vraiment plaisir, c’est à dire explorez toutes les possibilités de ce qui vous plairait vraiment. Si c’est un voyage, ne soyez pas radins, si pour un peu plus vous avez le voyage de votre vie, choisissez celui-là. Si c’est un gros gâteau, n’allez pas au Carrefour, choisissez le meilleur pâtissier que vous connaissiez. C’est pas une question de marque, ce n’est pas une question de prix, c’est avant tout la valeur que vous donnerez à ce qui est déraisonnable, pour n’avoir aucun regret, pour être pleinement satisfait, rassasié et le coeur rempli de tout ce que vous en attendiez pour faire par ailleurs les sacrifices que vous êtes condamnés de faire. Pour moi, c’est un énorme ajustement financier, heureusement en partie accompli depuis l’an dernier: quand la crise de la Covid a commencé, j’ai immédiatement freiné dans tous les sens et je suis parvenu à épargner un peu.
Je ne culpabilise absolument pas sur mon achat, je vous en parle au contraire parce que j’en suis très content, et qu’il est une promesse que je me fais à moi-même, celle d’utiliser la situation comme une opportunité. Cet achat définit en quelque sorte une limite à tous les niveau, il m’émancipe.
C’est lui qui m’a conduit à oser regarder cet immense chantier laissé en plan, avec dans le coeur le sentiment d’un immense gâchis, d’être bête. Et avec une certaine impatience aussi d’avoir à retrousser les manches et m’y mettre.
C’est lui enfin qui me fournit l’occasion, aujourd’hui, de revenir sur mon blog après avoir passé le mois de février à l’optimiser, à payer une année de serveur en avance, sans y écrire.
Alors faites-vous plaisir, mais faites de ce plaisir un totem, un moment important chargé de sens et sur lequel vous pourrez vous appuyer pour accomplir les efforts que vous avez à accomplir.
Sur ce…

Un matin, ciel gris sur Tôkyô, un fond sonore – chose rare -, Astor Piazzola. Je ne suis pas habitué à écrire avec de la musique, mais là, c’est juste parfait, le tango diffuse une humeur parfaite, mi-triste mi lumineuse par moment, même si cela reste quand même très mélancolique. Je vais peut-être couper la musique quand même. Voilà, c’est fait, j’ai attendu la fin du morceau, Adios Nonino, et puis me revoilà dans le quasi-silence de cette fin de matinée, dans la rue la voix de deux femmes qui se saluent, le souffle de mon climatiseur et le glouglou du diffuseur de parfum.
Je dors incroyablement bien, en ce moment, je veux dire vraiment très bien, un sommeil profond, véritablement réparateur. Mes rêves laissent une certaine emprunte, comme celui de la nuit dernière, je vivais dans une maison toute flasque sensible aux moindres secousses, aux moindres mouvements, presque flottante. Au réveil, j’ai pensé à mon nouveau contrat, très précaire, et j’ai pensé « ça ira », parce que finalement, dans cette maison, rien de mal n’arrivait, il y a juste qu’elle était très flasque.
Visiblement, ses fondations étaient très solides.
Mardi, dans ma leçon de groupe dans une maison de quartier, il y avait une « visiteuse », une potentielle nouvelle étudiante. Elle n’est restée qu’une heure. Je n’ai rien fait de spécial pour lui plaire, j’étais juste très content que quelqu’un se joigne au groupe, c’est un peu la condition pour que ce type de leçon puisse continuer. Elle nous a dit qu’elle suivait les leçons d’un autre groupe d’anglais mais que le professeur était parti, et qu’ils en cherchaient un autre. En attendant, peut-être allait-elle se joindre au nôtre.
Dans le métro, j’ai pensé que peut-être en réalité elle était venue pour voir comment j’étais. Trouver un enseignant, pour ce type de maison de quartier, c’est assez difficile, les professeurs très souvent viennent deux ou trois mois et ils arrêtent. Ça n’a pas manqué, j’ai reçu un email hier me demandant si j’étais disponible. Je vais répondre tout à l’heure.
Les fondations sont solides, je vous dis. Je n’ai aucune inquiétude et pour tout dire, le contrat que mon directeur a imposé, et que j’ai accepté après lui avoir fait changer beaucoup de termes, au passage pour l’ensemble des autres enseignants, eh bien il signe la fin d’une longue période qui m’a familiarisé avec une certaine confiance en moi. Je suis libéré de la hantise de la pauvreté, de la marginalité, c’est finalement un peu comme si un cycle, commencé avec le décès de maman, touchait à sa fin, et avec lui la longue période démarrée en 2009 quand j’ai commencé à travailler pour cette école. Le décès de maman a été quelque chose de très important, dans mon existence, on ne se remet pas facilement de ce type de disparition, et je crois que ce long deuil touche à sa fin. Et au même moment où je sens que ce deuil touche à sa fin, j’ai le contrat de travail le plus pourri de toute mon existence.
J’aurais pu « résister », « refuser », être un héros mais c’eut été un véritable suicide. Je suis seul ici, je n’ai pas spécialement d’argent, en tout cas pas suffisamment pour tenir le temps de ce type de guerre. Et j’ai d’autres aspirations, d’autres ambitions que cet enfermement dans l’enseignement, un domaine qui ne reste finalement que mon gagne-pain. Quelque chose que j’avais trop eu tendance à oublier ces dix dernières années.
Rie, la secrétaire de l’école, après que je lui eu fait part de mes critiques vis-à-vis de ce contrat, m’an envoyé un mail me disant que peut-être c’était l’occasion de bouger, de créer mon école près de l’école où je travaille en ce moment, en louant un espace « pas cher ». Ma première réaction a été de penser, « de quoi tu te mêles », et puis ensuite, « ma propre école? », sur la ligne DenEnToshi, dans cette banlieue? J’ai eu des envies de réponses incendiaires avec beaucoup de « moi je », et puis soudain j’ai réalisé qu’en réalité je n’avais aucune réponse à lui donner car en réalité j’avais déjà « bougé », il y a deux ans, sous ce magnifique ciel étoilé de la Sarthe, j’avais « bougé » dans les rues de La Ferté-Bernard sous le soleil magnifique de mars, quand maman est partie, et quand la conclusion avait été qu’il était temps de penser à rentrer. Qu’irais-je faire dans une sorte de « local pas cher » au milieu d’une banlieue moche, à donner des cours de français pour un salaire de misère?
Je suis une tête de bois, je refuse qu’on me dise quoi faire, surtout pour me donner des conseils aussi nuls que ça, franchement. Il m’est déjà arrivé d’y penser, en effet, mais immédiatement j’ai pensé que non, come on…
Je suis une tête de bois mais je sais écouter, aussi. Il y a peu de gens que j’écoute, il faut d’abord que j’ai pour eux un respect très fort, un truc qui dépasse l’amitié, et qui n’a rien à voir avec l’admiration.
J’ai repensé à un conseil que Didier Lestrade m’avait donné il y a 8 ans, en lisant le mail de la secrétaire. Publie! Et j’ai eu honte de me retrouver à lire le conseil débile de la secrétaire de l’école, et j’écris cela sans avoir aucune animosité envers elle. Je l’aime bien, elle est sympa, mais que sait-elle de moi? Tiens, d’ailleurs, Stéphane m’a demandé quand je publiais, il n’y a pas longtemps, alors que je me moquais des « livres » de Chiappa.
Je donne mon respect au compte goutte, je suis égoïste et buté, pas du tout imbu de moi-même mais plutôt assez lucide sur les conseils que les gens procurent. La secrétaire, c’est une survivante qui s’accroche à son boulot de merde payé des clopinettes. Elle est super mal payée et depuis quelques temps, elle s’est mise à enseigner. Quand elle enseigne, elle n’est pas payée plus. Une survivante qui fait tout pour pas se retrouver, elle aussi, dans la quarantaine, avec un contrat pourri. Alors que j’ai arrêté de me dire que je devais lui répondre, j’ai pensé que c’était plutôt elle, qui devait passer à autre chose et bouger.
Moi, j’ai ce putain de covid qui me tombe dessus. Rentrer en France, ce n’est plus à l’ordre du jour, ça va être beaucoup plus compliqué. Et si je rajoute ce climat politique vicié, non, autant rester ici pour le moment, reculer le moment du départ et créer mes propres opportunités.
Ce conseil de Didier, cette petite pique de Stéphane, elles sont depuis quelques jours des aiguillons qui donnent du sens à ma situation. Stéphane, je ne sais pas pourquoi, ce doit être son caractère très direct, je l’ai toujours incroyablement respecté. Je veux dire, en plus de le considérer comme un ami. Il a cette façon de dire le truc franco. Des fois, ça tombe à côté, mais ce n’est pas grave. Il est incroyablement honnête. Didier, c’est autre chose, un conseil de Didier Lestrade, ce n’est pas un conseil. C’est un ordre, parce que c’est pensé, intelligent. C’est un grand frère, notre grand frère à nous tous.
Là, c’est le soir, j’avais arrêté l’écriture de ce billet vers 11 heures et demi, je voulais la poursuivre dans le métro, et puis j’ai enregistré sur mon bureau et non dans le cloud, je n’ai pas pu continuer sur mon iPad dans le métro. On est donc le soir, je suis dans mon lit et j’écris sur mon vieux MacBook. Presque neuf ans, le vieux gaillard… C’est le soir, il a neigé cet après=midi…
Je vais me retrouvé appauvri, et paf, tuile, mon ampli acheté il y a huit an a décidé de mourir. Il faisait des tac tac tac. Il y a donc une diode ou un transistor ou un machin comme ça qui est mort. Je vais le jeter, c’est à dire que je vais le mettre quelque part avec un papier qui dira qu’il est réparable. J’aurais pu le faire réparer, c’est à dire ne pas avoir d’ampli pendant trois semaines, payer plus de 100 euros…
Je n’aimais pas son son. C’était un Sony, donc c’est assez normal qu’il rende l’âme après huit ans. Non, il avait un son sans aucune personnalité. Je ne sais pas comment dire, il n’attrapait pas les textures des instruments, sa dynamique était fade. Il n’était pas neutre, il n’avait aucune saveur. Je ne crois plus à la haute fidélité « neutre ». Pour la simple et bonne raison que l’acoustique même d’une salle va colorer la musique.
J’ai cherché sur le net et je suis vite tombé sur un petit bout de choux de chez Teac. Je l’ai acheté, il est vraiment tout petit. C’est un classe D, donc un ampli « bon marché ». Je parle d’un point de vue technique bien sûr. Le méga truc, c’est le classe A. Coûteux, qui bouffe énormément de courant mais restitue le son à la perfection, parait-il… Je vis dans 30 mètres carrés, un classe D est donc très très amplement suffisant! Mon compte en banque est, de toute façon, totalement de cet avis. La presse disait du bien du petit Teac. Emballé, c’est pesé.
La première écoute m’a un peu désarçonné. Il est, comment dire, fruité. Son son va plutôt du coté du haut-médium, pas beaucoup mais juste ce qu’il faut pour que ça se remarque. Sur le moment, sentiment de manquer de basse. Sentiment renforcé par mes enceintes, des enceintes d’étagères Dali.
En même temps, j’ai tout de suite noté la texture, l’ampli saisi les sons, il y a quelque chose de nerveux, de ciselé, et puis un sentiment d’ampleur. Jamais le Sony n’avait rendu de volume, un relief au delà de la stéréo, jamais je n’avais eu l’impression d’éloignement du soliste, ou l’illusion qu’un instrument jouait au delà de l’enceinte, et là, oui. C’est nerveux et précis, avec ce petit côté fruité sans jamais crier. Il chante. Si, si… Et maintenant je les entends, ces basses, légèrement moins présentes qu’avec le Sony, mais précises et « tenues », je ne sais pas comment expliquer cela. Disons que ce n’est plus seulement un son, c’est un instrument qui produit ce son, et il y a donc quelque chose de plus complexe.
Un réel plaisir. Avec ce nouvel ampli et le départ de l’autre, c’est une trace de Nori, vous vous souvenez, qui s’éloigne.
Et moi, je suis ravi. C’est un pschitt, certes, mais je ne peux pas vivre sans musique.
Sinon, j’ai repris mes rangements. J’ai mis de l’ordre dans un petit meuble à côté de mon bureau. Et finalement, plus encore qu’en décembre j’ai le sentiment d m’installer. C’est important de s’installer, quand on veut travailler. Enfin, je parle pour moi.
Bon, je vais me coucher. J’ai une vague idée de récit, je devrais m’y mettre. Et puis une idée de chroniques. C’est bien plus important que faire la guerre pour un boulot de merde.