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Je ne compte pas le nombre de fois dans ma vie où j’ai voulu économiser, où j’ai fait des économies de bouts de chandelles pour me retrouver à l’arrivée avec un truc bancal.

Cela faisait longtemps que je n’avais pas écrit dans le métro, voilà qui est fait.
La raison est très simple: je viens d’acheter le nouveau MacBook Pro, le 14 pouces, et comme cette fois-ci j’étais décidé à ne pas chipoter, je n’ai pas pris le moins cher. Je n’ai pas non plus cédé au 16 pouces. J’ai pris ce qui correspondait le plus à ce que je voulais.
Il y a neuf ans, j’avais acheté le premier MacBook Pro Retina. J’ai adoré cet ordinateur, mais il y a rapidement eu trois problèmes: d’abord la taille.
Parfait pour regarder des vidéos ou retoucher des photos, il était difficile à transporter. Ensuite, son clavier américain, mais j’ai appris depuis que ce n’était finalement pas si difficile car il existait des stickers. Et enfin, et ça a été le véritable problème, j’ai essuyé les plâtres de la nouvelle gamme. La carte vidéo était dotée de trop peu de mémoire et l’ordinateur lui-même n’était pas spécialement bien doté en mémoire vive avec seulement 8GB.
La définition de l’écran mangeait toute la puissance de l’ordinateur et au bout de même pas deux ans, Lightroom a commence à patiner. J’ajouterai enfin que j’avais chipoté sur le stockage et pris le modele le moins cher doté de 256Go, tout ça pour constater que je ne pouvais même pas y mettre toute ma musique…
Cela ne m’empêche pas de continuer à l’aimer, mon vieux MacBook Pro, malgré ses 9 ans. Il ne peut plus faire grand chose d’autre qu’aller sur YouTube (en veillant bien à ne pas regarder de vidéo en 4K sous peine d’entendre les ventilateurs dans les 30 secondes qui suivent et le clavier devenir vraiment très chaud), regarder des videos, aller sur le net et écrire. Pour le reste, il mouline vite.
J’ai donc décidé il y a trois ans d’acheter quelque chose qui me permettrait de travailler sans avoir les ventilateurs à plein régime en ouvrant la moindre photo. Et là, j’ai chipoté.

J’ai acheté un iMac, et comme l’histoire du MacBook Pro m’avait vacciné, j’ai opté pour un modele évolutif en mémoire vive. Il n’y avait que le modele 27’ qui faisait cela. J’aurais bien pris un MacBook Pro, mais c’était plus cher.
Quand il est arrivé chez moi, que je l’ai sorti de sa boîte, j’ai immédiatement compris que je ne l’aimerais jamais. J’avais acheté un monstre, un truc énorme comme une télévision grand écran tout droit sortie des années 70. Superbe pour regarder des videos, mais pour le reste cette sensation de coller à un écran, une fatigue renforcée par ma presbytie.
Ironie, il m’est ainsi souvent arrive d’écrire sur mon vieux MacBook Pro, bien plus confortable. Et je ne parle pas de la mobilité…

J’ai récemment tout réagencé chez moi, jeté beaucoup de choses mais il y a eu constamment un impératif: la place du bureau, obligatoirement face au sofa pour quand je voulais regarder une video… Ce n’était plus un ordinateur, c’était un meuble, imposant.
Et puis il y a eu l’épidémie qui a accentué le besoin de légèreté, je vous en parlerai plus tard car c’est aussi cela, la période que je traverse.
Alors avec la sortie du nouveau MacBook Pro, pourtant très cher, j’ai eu l’opportunité de régler cette question.

Je voulais de la mobilité, donc, et malgré la tentation d’aller vers le 16’, magnifique pour regarder des videos, j’ai opté pour le 14’. L’un pese 2,1 kg, l’autre « seulement » 1,6 kg.
J’ai songé aussi à un MacBook Air, encore plus léger, et cette fois profiter du prix plus léger aussi pour prendre 2TB et plus de mémoire vive, mais la différence de prix n’était alors plus foncièrement un facteur, et bien que plus cher et seulement dote de 1To, le modèle que j’ai acheté possède bien plus de ports pour le connecter ainsi que d’un lecteur de carte SD. Son écran est bien meilleur aussi, et j’ajoute au final une bien meilleure puissance, il pourra servir longtemps.
Un peu l’achat que je m’étais refusé de faire il y a trois ans…

Je ne compte pas le nombre de fois dans ma vie où j’ai voulu économiser, où j’ai fait des économies de bouts de chandelles pour me retrouver à l’arrivée avec un truc bancal. Il y a eu mon premier « vrai » ordinateur, fin 2002 (pas d’occasion, ni récupéré comme ça avait été le cas avant): je voulais économiser, j’ai acheté un iMac déjà dépassé quand je l’ai acheté. En 2005, j’ai donc acheté un MacBook, le blanc. Lui, je m’en suis vraiment beaucoup servi, il a juste vieilli prématurément lors de la transition aux Mac Intel.
Il n’en reste pas moins que mon préféré aura bien été le Pro de 2012, et même aujourd’hui, malgré son poids, je vois toute la différence qu’il y a entre cette gamme et les gammes « simples ».
Je n’ai pas fait de credit, je l’ai acheté « comptant ». « Content », j’ai pensé. Je me suis senti délivré du poids de ce monstre de 27’. Dois-je préciser que j’avais bien entendu acheté le moins cher des 27’, moi qui voulais au maximum le 21’ et plus encore un MacBook Pro. Le 21’ n’était pas évolutif, et l’upgrade de la RAM coûtait une fortune. Quand au MacBook Pro, il était vraiment trop cher, que j’ai pensé.
Je me sens délivré. Un peu trouble aussi, angoissé, d’avoir dépensé une telle somme, moi qui n’ai quasiment pas d’économies.

Mais, et c’est là où je voulais en venir, la pandémie, mon âge, la mort de maman, la délivrance de mes dettes, mon éloignement des réseaux sociaux, tout s’est un peu télescopé durant l’année qui vient de s’écouler. Sentiment de fragilité. Si j’ajoute que je suis persuadé que le système financier ne tiendra pas plus de quatre ans et vous aurez une idée assez précise de ce qui me travaille.
Alors pourquoi dépenser dans un ordinateur au lieu de me contenter du miens et économiser, que vous me direz. Eh bien précisément, c’est dans le but de me préparer au pire. Un portable léger ultra-performant me sera bien plus utile qu’un gros machin intransportable et déjà vieux.
C’est la même chose que tout ce dont je me suis débarrassé depuis deux mois: être léger.

Pour la première fois de ma vie, je n’ai aucune visibilité sur mon avenir. Non pas parce qu’avant j’en avais une, mais plutôt parce que je n’y pensais même pas. Je suis passé à côté de moi-même durant des années, je ne comprenais pas que la vie, c’était avant tout une question de temps, de temps qui passe, et non d’instants.
56 ans, ce n’est pas un âge idéal pour regarder l’avenir, mais cela reste bien mieux que ne pas y penser du tout. J’ai fait preuve dans mon existence d’une incapable capacité à m’adapter, d’une réelle résilience reposant sur les principes que mes parents, bien maladroitement, m’ont transmis.
Je n’ai pas de valeurs, je laisse cela aux traders, parce que les valeurs se monnaient, se discutent, elles sont mesurables. J’ai quelques principes auxquels je tiens et qui m’ont été très utiles, particulièrement quand j’ai traversé cet période sombre à la fin des années 80 et jusque 1992.
Je ne me suis pas suicidé, et j’ai compris que j’aurais pu mourir. Par conséquent, je suis déjà un peu mort. Depuis, les difficultés ne sont plus que des difficultés, elles ont une solution, et s’il y a parfois de la souffrance, je sais que cette souffrance est le prix à payer pour être encore en vie, et que c’est la vie elle-même, et qu’il y avait donc une solution quelque part.

Mon ordinateur, ce rangement chez moi, c’est exactement cela.

Je me tiens prêt. Prêt pour accueillir de nouveaux possibles, prêt pour changer, pour faire des choses, et advienne que pourra: ce n’est pas le prix d’un ordinateur qui de toute façon fera la différence si je devais me retrouver dans une situation difficile (perdre mon travail, un séisme, être malade…).

Je vous dit, j’ai payé « content ». Même le prix m’a fait plaisir. J’ai failli prendre le 14’ le moins cher, mais je l’aurais regretté. J’ai pris la vraie configuration minimum d’un vrai MacBook Pro 14’, avec un vrai stockage pour toute ma musique. Il est beaucoup trop puissant pour moi, ce qui veut dire qu’il faudra du temps avant qu’il fatigue.
Je ne me suis pas limité, tout comme je ne veux pas me limiter: les deux trois années qui viennent s’annoncent importantes, et bien que je me sente un peu dans une impasse, en réalité ce n’est pas le cas. J’ai avant tout beaucoup de travail, beaucoup d’efforts à fournir, et je dois écouter mes intuitions, les laisser parler. Pour travailler.

Encore un billet gnan-gnan-gnan, me direz vous. Alors que la zemmourisation traduit la victoire des idéologies virilistes, chauvines et réactionnaires, j’aime lever le voile sur mon intimité, sur ma fragilité, sur mes doutes parce que je sais que nous sommes nombreux, nombreuses. Et j’y trouve même un certain plaisir.

Voila, j’ai donc un nouvel ordinateur cher, paye avec mon argent que j’ai gagné moi-même. Et je suis super content. Ça n’a pas de prix, ça!

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