Le Blog de Suppaiku, journal bloggué de Madjid Ben Chikh, à Tokyo.

Je cherche un taf, et ça urge!


Je cherche un taf, et ça urge! Si vous êtes au Japon, que vous entendez parler de quelque chose, je suis ouvert. Tout est option.

Si mon dernier billet pouvait laisser penser que j’étais au fond du trou, je vous rassure, ce n’est pas le cas. Je suis lucide, c’est tout, et je retourne ma situation dans tous les sens afin de trouver une solution qui me rendrait ce temps dont je me sens petit à petit dépossédé.
Et toujours, invariablement, ma réflexion tourne autours du travail, c’est à dire, de l’argent Je cherche un taf, et ça urge. Si vous êtes au Japon, que vous entendez parler de quelque chose, je suis ouvert. Tout est option.

J’étais finalement sorti du trou en 2019. Mon travail était très stable et, sans gagner une fortune, je m’en sortais bien. Je devais bien sûr travailler à mon école ainsi qu’à deux autres endroits ainsi que donner quelques cours en plus, mais, sans que cela ne me prenne toutes mes journées, m’offrait un revenu suffisant pour vivre, partir un peu en vacances voire même venir en France (vous noterez l’usage du verbe « venir » et non « partir », cela m’est venu comme ça).

Avec l’épidémie de Covid, ma situation a d’abord commencé à se détériorer. On est passés en « chômage partiel » à la japonaise dans mon école, et mes autres cours ont régulièrement été suspendus. J’étais parvenu à faire quelques économies, elles ont commencé à fondre.

Puis, mon directeur ayant perdu toute motivation, l’école n’a pas pleinement profité de la levée de certaines restrictions. Pour équilibrer les comptes, désormais totalement dans le rouge, il a revu nos contrats de travail. J’aurais pu refuser, mais avec le marasme économique ambiant, ça aurait été le chômage total sans réelle perspective de trouver autre chose. On a discuté entre profs.
On a donc maintenant, et cela depuis début 2022, un contrat précaire, à l’heure.

Le contrat précise qu’une fois la situation revenue à la normale, nous retrouverions un contrat normal. Connaissant mon directeur et les nombreuses difficultés que nous avons traversées depuis que je travaille dans cette école (et notamment le séisme de 2011 où nous avons perdu beaucoup d’étudiants), j’ai estimé que je pouvais lui faire confiance. Modérément, mais un peu quand même, car il a toujours tenu parole (en tentant de chipoter certes, mais en le faisant quand même).

J’ai juste négocié un point, très important. Le contrat stipulait que nous étions « à temps partiel ». Je lui ai demandé qu’il remplace la formule par « à l’heure ». Cette formulation permet en effet de rendre caduque l’obligation de notifier une démission un mois en avance: un professeur peut ainsi dire qu’il n’est pas disponible tout en informant qu’il démissionne « un mois en avance. C’est la définition même de l’emploi « à l’heure ».
C’est sur ce petit changement qu’après discussion entre professeurs nous avons accepté les nouveaux termes. On gagnait du temps en attendant la reprise de l’activité, soit dans l’école, soit ailleurs.

Fin 2022, il nous a annoncé qu’il vendait l’école. Il me l’a proposé d’abord. J’aurais bien dit « oui », pour tout dire, mais mon visa ne me le permet pas: le Covid est arrivé pile au moment où je voulais demander la résidence permanente qui me l’aurait permis… Avec le Covid, je me suis mis à beaucoup douter. Comme un peu tout le monde…
Il a vendu l’école à une ancienne professeure. Une fille très sympa, chaleureuse, qui enseigne dans une université. La première fois où je l’ai vue après le rachat, on a longuement parlé, j’étais très enthousiaste. C’était novembre 2022 et je lui ai dit qu’il fallait être prêt pour janvier et surtout pour avril, ce sont les deux moments les plus importants en affaire au japon, particulièrement dans tout ce qui touche à l’enseignement.

Et puis… Rien.

Rien n’a changé. À la rentrée de janvier, tout était identique. On a juste eu à changer de contrat, pas les termes, juste le nouvel employeur. À sa décharge, elle avait toute la paperasse administrative.

En avril, elle nous a envoyé un email pour nous annoncer l’arrivée d’une personne pour l’aider à manager l’école. Aucun parmi nous n’a bien compris le sens de cette embauche d’une personne à plein temps alors que nous étions des précaires et que nous attendions que ce soit la nouvelle propriétaire qui fasse ce travail.

Et puis… hormis des changements purement cosmétiques comme des nouveaux tapis, de la mousse isolante sur certaines cloisons et une fontaine à eau, rien n’a changé. J’ai entendu la manager faire des évaluations, je suis persuadé que l’ancien directeur aurait été furieux.
Avec elle, nous perdons cette relative proximité avec les CEFR que j’avais bataillé à mettre en place: les professeurs d’anglais ont généralement tendance à considérer comme « avancée » toute personne qui aligne plus de trois mots et hoche la tête en disant « oui oui ». On en a perdu, des étudiants, à cause de ça.
Quand j’ai « gagné » sur ce point, vers 2012, les évaluations ont chuté, la plupart de nos étudiants sont devenus A1 ou A2, des faux débutants. Ça nous a permis de coller aux manuels et on s’est mis à garder les étudiants.

Les japonais sont nuls en anglais mais ils ne sont pas stupides: ils le savent très bien, qu’ils sont nuls, alors la brosse à reluire à coup de « votre anglais est très bien, il faut juste un peu pratiquer », ça marche 6 mois, et puis ils vont voir ailleurs.
Bon, ben retour à cette façon de faire. Quelque part, je m’en fiche un peu, moi, ce qui m’intéresse, c’est qu’on me donne des étudiants en français. Et là, c’est la catastrophe totale.
Des changements cosmétiques n’ont jamais apporté de changements réels, sauf quand la situation est déjà bonne.

L’ancien directeur avait créé un « blog » en parallèle au site internet, et via ce blog, il mettait en avant les enseignants, leur style. Quand un étudiant cherchait une école, il trouvait la nôtre très facilement dans une approche assez conviviale. C’est ce qui m’avait permis de « tenir » durant le Covid, ce qui me laissait espérer que les choses s’amélioreraient.

Le blog n’existe plus, et durant un an, avant de disparaitre, il n’a pas été alimenté. Depuis 6 mois, je n’ai plus de nouvel étudiant, et rien ne vient compenser ceux qui partent. Le mois prochain, mon école me rapportera autant que mes cours à côté.
Je ne développerai pas l’absence totale de « vision », de stratégie. Je suis payé (30 euros par mois pour deux heures de travail à fournir…!) pour m’occuper des réseaux sociaux. On m’avait promis une aide. Aucune. À regarder Instagram, on dirait que c’est une école de français.
J’ai créé un TikTok, fait des vidéos (qui m’ont pris bien plus de deux heures…). Quand j’ai demandé à la manager d’en faire elle aussi, sa réponse a été que son mari n’aimait pas TikTok.
Pour le « nouveau » site internet, elle s’en occupe depuis 3 mois (d’où la disparition du blog)…

Je pourrais paraître être en colère après elles deux, je ne le suis pas. Ce n’est pas d’un point de vue humain – elles sont sympa, gentilles. C’est purement professionnel.

Quelque part, je m’en fiche, ce n’est pas mon école et toutes les deux ont peut-être une vision à long terme. Côté enseignants, la motivation est au point mort et je n’ai aucun doute que les uns après les autres ils vont partir.
La situation n’a pas beaucoup bougé depuis la reprise de l’école, la manager (appelons la comme ça même si elle refuse le terme) prend tous les nouveaux étudiants pour elle (ça aide à payer son salaire). Les autres professeurs d’anglais sont délaissés. Ils vont partir. Je le sais: avant ce qui nous arrive, j’était le professeur principal. Je les connais bien.

Vous avez lu mes derniers billets, je vous y confesse ces très gros doutes, cette absence de vision. Je tourne les choses dans tous les sens, ce n’est pas moi qui ait un problème: c’est où je travaille. Ce n’est même pas que je veuille quitter, c’est que je me demande franchement ce que je fais là. Je vaux nettement mieux.

Je me sens trahis, j’ai le sentiment d’avoir été utilisé, d’avoir été abusé. J’ai l’impression d’être puni pour avoir commis le crime d’avoir eu confiance. Je sais bien que c’est plus complexe, mais à l’arrivée, c’est moi qui paie l’addition et je ne m’en sors plus, financièrement.
Je vous parlais de cette rage, ce « non » qui hurle quand je pense à mon âge, à où j’en suis. Elle est là, cette rage.

Je suis heureux d’avoir ce site, ce blog. Je suis heureux de l’avoir relooké, de le re-posséder. Vous ne le voyez peut-être pas, mais il a profondément changé depuis la fin de la semaine dernière. J’ai fait ça en 4 jours! Sans « template », juste avec l’éditeur. Je vais maintenant continuer à le faire évoluer, mais c’est moi qui contrôle le design à 100%.
J’en suis heureux car ici, finalement, j’ai un espace où je peux être moi-même, où nulle incompétence vient me limiter, ou, pour le dire plus modestement, où la seule limite est celle de ma propre incompétence.

Si vous êtes au Japon, que vous entendez parler d’un poste de travail, pensez à moi. Je suis ouvert à toute suggestion. Je pourrai bien entendu ne pas lui donner de suite mais je l’étudierai avec sérieux. Tout est option.
Je n’envisage pas le retour en France, mais même cette perspective a cessé de m’effrayer – et cela bien que ce serait très difficilement faisable matériellement à cause du coût incroyable que cela représente, coût que je ne peux plus couvrir: j’avais commencé à mettre de l’argent de côté pour cela… Je suis désormais à la frontière du rouge.

Il est possible que je contacte celles ou ceux que je connais et qui vivent au Japon. Toutes mes excuses par avance, mais bon, c’est important de demander.

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