Je n’aurais jamais cru que, socialiste, je m’inscrirais un jour sur un forum UdF. Comme quoi tout arrive, et je ne doute plus désormais que l’UdF, enfin, le Parti Démocrate, ne s’allie un jour avec le Parti Socialiste. Et que, tout comme je ne me renierai pas en vous écrivant ici, aucune de ces 2 organisations ne se reniera.
On peut « faire un bout de chemin ensemble » (Ségolène Royal) sans trahir ni ses électeurs, ni ses convictions. Tout est affaire de priorités.
J’ai toujours été, et je le suis toujours, contre une alliance électorale entre les 2 organisations : cela a été expérimenté sous la IVème république et cela n’a pas marché. Le tropisme du centre incline vers la droite; le tropisme du Parti Socialiste incline vers la gauche. Une alliance aboutirait obligatoirement à un gommage de divergences profondes qui encouragerait les extrèmes. En 1958, le centre (MRP) et les socialistes, non seulement ont fini par produire l’une des pire politique qui soit à force de se renier, mais en plus, ils se sont tous deux retrouvés coincés entre De Gaulle et un Parti Communiste à 30% !
Et pourtant, je pense profondément que nos 2 partis unis ont, de 1946 à 1958, en pleine guerre froide, réussi à faire vivre le rêve et les idéaux de la résistance. Le centre et les socialistes doivent être fiers d’avoir malgré tout, en 12 ans, remis debout un pays ruiné par la guerre, la collaboration et la faillite des élites. De Gaulle a hérité d’un pays électrifié, avec des trains qui marchent, la DS, la Caravelle et un taux de croissance supérieur aux pays voisins.
La IVème n’est pas morte des indépendances. Elle est morte d’elle même, parce qu’elle reposait sur le rêve de la résistance : un pays uni. La guerre froide et la désertion gaullienne à partir de 1946 ont rompu ce rêve et ont conduit ce régime à la paralysie.
Nous devons revenir à cette histoire si nous voulons envisager de reconstruire la France. Non plus le pays, cette fois, mais d’abord le contrat, ce qui nous lie, ce qui fait société.
Je suis contre une alliance.
Je suis pour une « union libre », comme pour un couple non marié. Un contrat renouvelé à chaque nouvelle étape, en toute transparence, comme la discussion de samedi dernier l’a ébauchée.
Je m’explique.
Nous faisons en commun le constat que la Vème république asphysie la démocratie en concentrant les pouvoirs. Les socialistes comme vous partagent le constat qu’il faut changer de république.
Nous faisons le constat que rien, plus rien n’est désormais faisable sans repenser à l’Europe, à ses institutions et à ses ambitions. Nous savons également qu’il n’est de réel projet européen sans horizon plus ou moins fédéral (et je reconnais à François Bayrou, de ce côté là, un très grand courage et une réelle constance). J’ai compris que François Bayrou avait changé lors du débat de 2005, à ses yeux qui brillaient quand il regardait Cohen Bendit parler de l’Europe Fédérale : l’admiration était visible; or, pour « admirer » Cohen Bendit, il faut, pour un homme venu de la droite, avoir rompu intérieurement avec la droite. Les propos récents du candidat du pouvoir de droite sortant sur mai 68 montrent que ce n’est pas le cas de ce côté là… Oui, l’Europe est une ambition commune que prouve d’ailleurs l’existance d’un Parti Démocrate Européen et du Parti des Socialistes Européens. Qui d’ailleurs travaillent souvent ensembles.
Nous sommes également conscients que le marché tout seul ne sauvera pas la planète, bien au contraire. Je vous invite d’ailleurs si ce n’est fait à voir sur Dailymotion le débat entre Corinne Lepage et Bruno Rebelle : il est clair que la présidente de Cap21 ne votera pas pour Nicolas Sarkosy.
Quel gachis ce serait si nous ne nous unissions pas cette fois-ci pour faire ce bout de chemin ensemble…
Ne pourrions-nous pas envisager, par exemple, de transformer la prochaine législature en assemblée constituante, afin de passer à la VIème République ? Voilà un objectif clair qui ne trahisse ni les uns ni les autres et où nos capacités de dialogue seront plus importantes que nos organisations respectives. Au même moment, enclencher au gouvernement les nécessaires ruptures en terme de politiques environnementales. Et enfin, lancer un message clair et résolument tourné vers l’Europe pour renouer avec le fil rompu de la présidence Mitterrand et de la mandature Delors.
Une fois la nouvelle constitution adoptée, l’assemblée, comme toute constituante, serait dissoute et une nouvelle majorité devrait voir le jour sous ces nouvelles institutions. A l’issue de ces nouvelles élections, une nouvelle majorité verrait le jour.
Pas d’alliance, donc. Mais une union sur des objectifs clairs.
Ce n’est pas de l’anti-Sarko. C’est une réelle alternative basée sur de réelles convergences.
Qu’importe si après le Parti Démocrate repenche vers la droite ou décide de continuer l’aventure avec la social-démocratie ou en arbitre. Là n’est pas la question. Nous aurions juste, à un moment clef de notre histoire, pris nos responsabilités et réellement, en quelques mois, offert par le dépassement de nos réelles divergences la plus profonde transformation que notre pays ai pu connaitre depuis près de 50 ans.
Je le regrette pour les militants de l’UMP, pour leur candidat ainsi que pour les militants et élus UDF qui suivent Nicolas Sarkosy, mais cette ambition passe d’abord par la victoire de Ségolène Royal.
Je finirai ce message en vous parlant de la candidate elle même. Allez faire un tour sur mon blog : j’y ai activement fait campagne pour elle, malgré que ce ne soit pas l’objectif de ce blog que j’écris depuis 3 ans, dont plus d’une année au Japon. J’y ai parlé de vous, aussi, et de François Bayrou. Mais j’avoue avoir été plus souvent critique à l’égart des socialistes qui allaient vers vous qu’envers vous. Allez faire un tour en 2005, vous verrez que ce que je dis sur ce « bout de chemin » date du référendum. Indépendance et critique n’a jamais voulu dire chez moi reniement : je respecte vos idées autant que les miennes.
Je vous écris cela car vous remarquerez que depuis une semaine, en fait, je n’ai rien écrit. Le score de Ségolène Royal, bien que très bon finalement, n’était pas à la hauteur de ce que j’espérais : la France veut-elle de son Thatcher ? J’ai été abattu. Vas-y, Ségo, et bonne chance. À plat, Suppaiku…
Je vous écris aujourd’hui car finalement je suis épaté par ce « petit bout de bonne femme ». Elle m’a reconvaincu : elle est solide. Oui, elle a dit des bétises. Mais je constate qu’on lui en a toujours tenu plus rigueur qu’à aucun autre candidat. Oui, par moment, on a pu sentir des flottements sur telle ou telle proposition : elle n’a pourtant jamais cédé sur le fond. Oui, elle n’est pas compétente en économie, mais est-ce le rôle d’un président de la république, que tout savoir ? Elle n’est pas compétente mais elle connait l’urgence pour la question de la dette (c’est elle qui a soulevé la question lors du discours du 11 février à Villepinte), la nécessité de doper les investissements des entreprises. Ne croyez vous pas que ce soit plutôt le rôle de son ministre de l’économie ? Car sur le fond, si vous lisez attentivement son programme, si vous alliez ensuite sur le site du Labour, vous découvririez beaucoup de similitudes avec la politique de… Tony Blair. Emplois tremplins et Contrat première chance (1998 : « New Deal »), encadrement militaire pour les jeunes récidivistes (« tough on crime ») et investissement massif dans les causes de délinquences (« tough on cause of crime »), revalorisation des bas salaire (1999 « creation of a minimum wage » / 2007 « minimum wage rised up to 50% since its introduction in 1999 »)… Labour
J’arrête ici.
Ségolène Royal est solide. Sa politique est en harmonie avec les politiques socialistes et social-démocrates mises en oeuvre en Europe, parfois avec des centristes. Malgré la difficulté de la tâche, elle continue sa campagne avec une droiture qui me conduit aujourd’hui moi-même à reprendre ma campagne, à vous écrire, par exemple. Regardez-là telle qu’elle est, lisez le Pacte Présidentiel tel qu’il est, en cherchant, en tant que force politique indépendante, vous pouvez apporter à une France Présidente, dont la discussion honnête de samedi dernier nous a laisser entr’appercevoir un avant goût.
Osez.
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