Voilà. Cette chanson, c’est, ça a toujours été, ça restera toujours ma préférée. Et dans cette interprétation originale de 1979, avec la flûte.
C’est une chanson qui raconte nos pères, nos mères, nos familles de l’autre côté.
De l’autre côté de quoi, en fait. On est quelques millions à nous débattre en nous sans trop savoir quelle réponse y apporter, alors le texte fait mal, très mal. Des deux côtés.
Pas une fois je n’ai entendu cette chanson sans penser à mes oncles, à ma tante Faroudja, à mes cousins, à mes cousines, à nos montagnes dans la lumière bleutée du petit matin quand j’allais chercher des figues, à la source Amran, aux cassettes de Aït Menguellat de mon oncle, à mon père le grand sourire qui lui barre le visage de toutes dents.
Cette chanson c’est l’exil, ce sont nos anciens les chibanis, usés par le travail et vieillissant seuls en France, c’est nos familles éclatées et dispersées, c’est notre pudeur aussi, nos renoncements et nos découragement qui hurlent dans nos têtes les mots de trahison, et c’est le pardon aussi parce que personne au monde plus qu’un kabyle sait à quel point la vie et la terre peuvent être cruelles parfois.
Cette chanson c’est aussi le souvenir de ce PACTE au lycée, après le séisme de El Asnam/ Chlef, en 1980/81, à Bondy, et puis les deux semaines de cinéma algérien à la salle Giono et à la salle Malreau, et puis le concert de Idir salle Giono, salle pleine et youyou à foison, et puis notre voyage, l’arrivée en bateau, la baie magnifique, trois semaines où notre musique était la musique de Idir…
Au revoir Idir.
Mreh’ba s wayen id (b)wwid’ / ama yelha ama dirit / ma teghlid’ ghellin wiyid’ / nekwni nesrak tameddit (Idir, Aghrib)