9 heures 50, mardi matin. Aujourd’hui, c’est ferie au Japon. Mais pas pour moi. Moi, je vais aller donner mes cours de francais et d’anglais avec un sentiment d’inutilite renouvele, mais sans avoir toutefois manque de retrouver Jun sous le beau soleil de ce jour d’hui. Car Jun est en conge.
Nous avons ete traverses hier soir par une tres violente tempete et des pluies tres violentes. Ce matin regnent un calme de dimanche et un soleil radieux. C’est signe que l’hivers approche. A Tokyo, il fait beau en hiver…
Mon travail me prend la tete, j’ai le sentiment de ne rien faire et de ne pas avancer, mais je sais egalement que l’ouvrier a toujours de mauvais outils, bref, que je suis aussi un peu responsable. Apres tout, les gens qui n’aiment pas leur travail sont legion. Pour m’occuper, pour me divertir mais aussi egalement pour avancer et m’offrir des possibilites, j’ai construit un blog en anglais, specialise dans les questions economiques, As I told you… (inactif). Ne comptez pas y lire des choses trop profondes, plutot une temperature de ma pensee en action. Car comme j’ai du temps, je lis pas mal d’informations economiques et reflechis a des problematiques auquelles j’avais assez peu eu le temps de reflechir ces dernieres annees. Vous n’y lirez pas le Marxiste en moi, juste un esprit critique forgeant sa pensee dans une actualite contradictoire et relativement manipulee. Et eventuellement un chercheur d’emploi pret a montrer sa cultures et ses capacites a analyser. Comme me dirait Mulgon, ce n’est pas ce qu’ils cherchent (et je certifie, des billes, bien payees et aujourd’hui recasees, j’en ai rencontre des pelletes, a Lehman), mais a 44 ans, les gadgets de style pro, avec blog et update Twitter, c’est obligatoire. Ok, je suis vieux, mais je peux causer avec un Asset Manager. Bref, allez jeter un coup d’oeil, si vous voulez. C’est en anglais, et c’est honnete.
Mais alors, vous me direz, qu’est-ce que je conclus de toutes ces lectures?
Tout d’abord, j’ai le regret de constater que si la « gauche », entendre les « keynesiens », font un retour discret, et au passage tres critique sur l’etat actuel de l’economie, et en clamant haut et fort que les politiques actuelles n’ont rien a voir avec Keynes – ce avec quoi je suis d’accord, car cette profusion de credit, cette avalanche de liquidites, c’est du monetarisme et ce sont les remedes de Friedmann / Bernanke-, force est de constater que le Marxisme apparait definitivement comme le grand perdant de la guerre ideologico-intellectuelle de notre post-20e siecle. Torpille par le coup d’Etat Bolchevique de 1917 et ensuite instrumentalise, reduit a une ideologie de la pauvrete et de la revanche des ventres vides contre les ventres trop remplis, Marx a perdu toute emprise sur le monde. Cet economiste-historien-philosophe-sociologue-politique, cet esprit riche fascine par les bouleversements qu’un ordre social mu par le pur interet individuel imposait a l’ensemble des reperes sociaux auparavant existant -famille, amitie, charite, religion, etc-, cet homme admiratif devant la dynamique incroyable du profit libere par la propriete privee, ce theoricien du capitalisme qui forca le respect de tous les plus grands economistes liberaux a qui il inspira des etudes critiques mais aussi bien des concepts -ainsi de la sous-consommation chez Keynes, juste pendant de la sur-production chez Marx-, ce chercheur visionnaire qui comprit bien avant d’autres que la force du capitalisme etait d’etre une dynamique qui ignorait les etats, les langues et meme les civilisation car il etait lui-meme civilisation (de l’argent, de la marchandise, de la valeur) et que par consequent la seule limite desormais etait le monde, celui qui avait critique bien avant que le concept ne soit definitivement etabli, la « justesse du marche » -dont la crise recente nous montre a quel point il y a de la justesse dans ce qui n’est qu’un jeu de la valeur et de la speculation, bref, cet inventeur qui au dela de ses analyses formula des pistes, maladroites, engoncees dans le vocabulaire neo-jacobin et positiviste de son temps, mais des pistes solides, reelles, afin de fonder, vraiment, la Democratie. Celle des hommes et non de l’argent. Celle de la raison et non de l’instinct. Eh bien cet homme, son esprit brillant, sa pensee vivante et qui a alimente plus de cent ans de luttes emancipatrices dont nous avons tire la securite sociale, le syndicalisme, les conges payes et la baisse du temps de travail, mais aussi de grands moments de fraternite democratique, comme en 1936 ou en 1968, et aussi dans le maquis, au temps ou nous etions encore des Camarades, Marx, livre a ceux qui s’en reclamaient, communistes, socialistes et trotskystes, gauchistes, s’est progressivement affadi, deseche, devenant une sorte de Label Rouge, le Poulet du Loue de la contestation, jusqu’a ce qu’il ne soit absorbe par le Proudhon de notre epoque, le poulet biologique eleve au grain non trans-genique Alter-mondialiste. Marx avec une tete de facteur « Radical© » et « Anti-Capitaliste© », Proudhon avec une grande moustache « Alter-mondialiste© » et « Europe-Ecologiste© ». Au final, ceux qui devraient penser le monde ont suivi la meme trajectoire. Les « intellectuels » sont pris dans une ideologie du desespoir critique. Quand survient la crise, les discours contestataires automatique, « la faute aux riche », « la faute au marche », etc, pleuvent et envahissent les etageres des librairies. Mais y en a t’il un seul qui sait ce qu’est une CDO, un CDS, un NPL, NAL, un VIS, les NINJA ? Ont ils une fois regarde la dette mondiale rapportee au PIB mondial depuis, disons, 1945 ? Et sont ils eux aussi fascines, admiratifs devant tant de genie deploye par ce systeme, les poussant a l’etudier, le comprendre, a faire de travail de synthese de l’economique, du social et du culturel qui faisait la force du vieux monsieur a la barbe afin de nous aider a nous en affranchir ? Ou bien se contentent ils de vomir le capitalisme ? J’ai lu de ces conneries sur la crise et sur les remedes a y apporter… En fait, la seule litterature interessante, et pour le coup maintenant je comprends Marx vraiment, c’est la litterature liberale, la litterature monetariste. Parce qu’ils aiment leur systeme, parce qu’ils ont fois en lui. Et parce qu’entre les lignes transparaissent leurs doutes, leurs craintes. Ses faiblesses. Les inconnues. Marx a devore la litterature liberale de son temps. S’il aborait Proudhon, c’est parce que Proudhon etait un nostalgique, un reveur, et qu’un nostalgique, un reveur, ca n’opere pas. Ca pleurniche. Et nos contestataires aujourd’hui pleurnichent sur l’etat du monde, regrettant comme les AlterMondialiste- la douce communaute fraternelle et paysanne, le monde des gentils artisans du tiers monde, cette grande famille des baba-cools du reel qui voient des complots des mechants riches partout…
En fait, je prends un reel plaisir a lire de l’information economique qui se constredisent souvent, mais que je synthetise comme un historien car les contradictions sont dans les explications mais pas dans les donnees elles memes qui restent, elles, invariables.
Penser le socialisme, c’est penser la democratie liberee de l’economique par un elargissement de la democratie a l’economique. Et dans une societe de la dette generalisee, penser l’economique, c’est observer la transformation de la propriete en une dette (obligation) generatrice de dette bref, c’est penser la disparition dors et deja effective, mais non realisee, de la propriete. Les millions de proprietaires expropries aux USA, les porteurs d’actions Lehman Brothers ou de General Motors on deja experimente cette depropriation que le capitalisme opere « au nom de la propriete ».
Reste a analyser une telle dynamique, et a voir en quoi cette dynamique nuit au processus democratique, et a proposer les outils politiques d’un processus democratique renouvele et consequent.
Marx appelait ce processus « le Parti Communiste »…