Et puis aussi…

Métro, vers 13 heures. Dehors, un temps pas possible, humide, moite, poisseux, une cocote minute géante. J’ai écrit un billet ce matin, entamons l’écriture d’un second. Ça fait longtemps en effet que je ne le fais plus, écrire dans le métro, ça a été pourtant un truc que je faisais régulièrement autrefois. Dans le métro, je ne parviens pas à lire, mais écrire m’est incroyablement facile, je parviens à isoler ma pensée, je me réfugie dans mon monde et les mots sortent tranquillement.

Quand je suis sorti de chez moi, tout à l’heure, la chaleur était étouffante, la pluie venait de s’arrêter, le sol était encore humide, les nuages cédaient la place à un ciel limpide recouvert ici de nuages blancs, là de nuages gris et ailleurs, parsemé de légères traînées blanches. Cette humidité, c’est celle de la fin de l’été, très différente de la saison des pluies en juin car en juin on sent bien le soleil brûlant alors que désormais c’est l’air qui est chaud. C’est une saison que j’aime bien même si elle est très éprouvante car il faut utiliser la climatisation, et l’air conditionné me donne des courbatures aux épaules ainsi qu’une sensation de corps lourd, le matin.

Vous me direz, mais pourquoi donc utilises-tu la climatisation? La réponse est simple.

Les maisons japonaises anciennes étaient ouvertes, parois coulissantes autours, parois coulissantes dedans, en été l’air y circulait. De nos jours, il stagne dedans, et la chaleur monte. Avec l’humidité on a carrément l’impression que la peau brûle. Chaque année, des centaines de personnes meurent chez elles de la chaleur, et je pense que l’importation d’une architecture venue de pays bien moins chauds y est pour quelque chose. Voilà pourquoi la climatisation est nécessaire.

Le train vient de sortir de son tunnel. C’est un train de la ligne Tôkyû qui traverse Tokyo en tant que métro. Je jette un coup d’œil aux nuages et c’est incroyable la variété de formes, de textures apparentes en cette saison, c’est un peu comme un télescopage. Le ciel est magnifique avec un bleu profond, le bleu de l’été encore, très vif, avec cette dominante « jaune » dans la lumière. Encore un mois comme ça, et puis…

Cet été, la météo a été abominable. D’abord une interminable saison des pluies, particulièrement dans l’ouest du pays où plus d’une centaine de personnes ont perdu la vie dans de très violentes chutes de pluies. À Tôkyô, il a plu quasiment tout le temps en juillet, et quand il ne pleuvait pas, il faisait gris. Avec le coronavirus, ça a été d’un déprimant incroyable, surtout qu’alors l’épidémie est repartie. C’est pour cela que j’ai eu besoin d’une coupure, de vacances, bien plus que les autres années.

Alors les prix des fruits et légumes cette année se sont envolés. J’ai vu des paquets de 4 pommes de terre de taille moyenne à près de 3 euros quand il y a deux mois on les trouvait à même pas un euro. Trois carottes à 2 euros, trois tomates à deux euros… Il semble qu’on soit enfin en train de revenir à des prix plus habituels mais ça reste plus cher. Pour moi qui aime manger des légumes, c’est vraiment pas une bonne nouvelle quand au même moment je continue de vivre une baisse de salaire liée au coronavirus. Pas importante, mais quand même.

D’un autre côté, comme je ne vais plus au restaurant du tout quand Jun vient le week-end, j’économise pas mal de ce côté là. Et puis j’ai découvert que la fonction « déshumidificateur » de la climatisation rafraîchissait autant que le fonction « climatisation » et nécessitait bien moins d’électricité. J’ai eu le mois dernier ma facture d’électricité la moins chère pour un plein été.

École, vers 14:35. J’ai donné une leçon, la prochaine est à 16:30. Beaucoup moins de travail depuis plusieurs mois, on a même eu un passage à vide d’environ deux mois où la plupart des étudiants ont annulé, et puis depuis deux mois ils reviennent, mais on reste à environ 60%. Il y a un programme de soutien pour un an je crois, un peu comme du chômage partiel, et c’est pour cela que j’ai une coupe dans mon salaire. En gros, j’ai moins d’heures travaillées, et quand je ne suis pas à l’école car je n’y ai pas de classe, je suis payé 60%. Je crois aussi que l’état paie la part employeur de la protection sociale. J’attends septembre avec impatience et un peu d’appréhension aussi car ça va vraiment être le mois où on verra si les étudiants reviennent ou pas. S’ils reviennent et qu’on atteint les 80%, on sera sur la bonne voie, s’ils ne reviennent pas, il y aura certainement des conséquences. J’ai une certaine appréhension mais j’ai digéré cette éventuelle situation.

Si aujourd’hui je mets deux billets en ligne, si depuis lundi mon régime alimentaire est parfaitement recadré, que pourrais-je rajouter demain pour donner à cette semaine quelque chose en plus, de l’ordre d’un progrès? Me lever vers 6 heures, peut-être. Et prendre ma flûte. Je n’y ai pas touché depuis l’achat: elle est arrivée mi-février et puis très vite il y a eu ce virus et j’ai eu l’esprit retenu ailleurs. Le virus, l’économie et la finance, la politique… Concernant la politique, les intuitions étaient parfaitement justes, au passage, et ce n’est pas fini car l’automne et l’hiver, entre la récession qui arrive, le chômage qui va s’envoler, le virus qui semble s’installer avec les restrictions qui vont avec, avec l’hystérisation du débat (le dernier en cours, le changement de titre du bouquin de Agatha Christie 10 petits nègres, et toute cette hystérie digne des pires comiques troupiers de droite à la Jean Lefèvre, « pauvre France » « ma bonne dame, gna-gna-gna), la mousse médiatique autours du Harlequin de la philosophie testostéronée Michel Onfray, avec sa bande de vrais mecs bien ringards, ça va être chaud. Imaginez, un pseudo-élève de Paul Ricoeur d’un côté, pur produit hybride du marketing, du vide idéologique de notre temps, des intérêts de quelques grandes fortunes et d’une ambition dévorante, le candidat de la droite Orléaniste Emmanuel Macron d’un côté, et en face un pseudo-philosophe, qui a écrit 2 fois plus de livres en 20 ans que Nietzsche, Balzac et Hegel réunis en une cinquantaine d’années, le roi de la compilation de bouquins qui réduit la pensée à une pochette surprise qu’on trouve au hasard à l’entrée des toilettes d’un café de quartier… Ça en ferait, un beau débat de deuxième tour.

Vous allez adorer l’automne, entre virus, chômage de masse et visite régulière de la fosse septique politique.

Le plus marrant, c’est qu’ils sont tous les deux de droite, réactionnaires, mais l’un ce sont les banquiers et l’autre c’est la réaction, la vraie, bien faisandée, chuif’frrrancêê, moi!

Au Japon, ce sont déjà les mêmes qui sont au pouvoir, mais avec une petite différence: ils gouvernent ensemble, ce qui est un peu logique finalement.

Tout ça pour dire que oui, je ne me suis pas trompé du tout, on y va tout droit, c’est en vitesse automatique et maintenant c’est un peu comme à la foire, on klaxonne, et puis on chante, et on picole un bon coup en appuyant sur le champignon. La classe moyenne va se réveiller avec un de ces maux de crâne, alors, elle qui rêvait du centre… en focalisant sur l’Islam, les incivilités des jeunes de cités, des racailles, le voile, tout en martelant, à coup de baisses d’impôts dépensées aussitôt en alimentation bio et équitable qu’il faut s’adapter et que les prolo ne veulent pas comprendre, qu’il faut savoir faire des sacrifices… Ils ne veulent pas voir qu’au fond d’eux, ce qui les écœure chez Zemmour, ce n’est pas ce qu’il dit, c’est qu’ils le dise parce qu’en réalité, et chaque jour je le constate dans des contacts Facebook, ca fait belle lurette qu’ils sont devenus aussi réactionnaires que Zemmour, avec leur crispation républicaine et leur acceptation de tous les grignotages de nos libertés publiques dans un rétrécissement sans fin de l’espace démocratique. Après tout, c’est la classe moyenne qui a choisi Pétain, la bourgeoisie, seule, n’aurait jamais pu l’imposer. Les rentiers. L’ordre. Le calme. Les traditions.

Bon, le soleil tape, dehors. Si demain matin je parviens à me lever réellement à 6 heures ou même avant, alors, j’ai pas mal de travail qui m’attend et ce sera alors une belle journée.

Rajout avant publication, ce soir. J’ai enfin commencé à écrire un truc important. J’ai donné naissance à Pierre. Une journée très productive.


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