En finir avec Instagram?

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On s’est habitué à ne plus payer, on nous l’a même rabâché, qu’internet, c’était une « nouvelle économie », et que désormais il ne serait plus nécessaire de débourser quoi que ce soit alors qu’en réalité, pour bénéficier d’un vrai service, il faut payer, que ce soit public ou privé. Abonnement ou impôt.

Je suis tombé ce matin sur cet article de MacG au sujet de l’avenir d’Instagram.

Bon, je vais le fermer, le compte Instagram, et si je le ferme, j’y supprimerai les plus de 6000 photos que j’y ai partagées.

L’argent détruit tout… Hmm, oui et non.

On s’est habitué à ne plus payer, on nous l’a même rabâché, qu’internet, c’était une « nouvelle économie », et que désormais il ne serait plus nécessaire de débourser quoi que ce soit alors qu’en réalité, pour bénéficier d’un vrai service, il faut payer, que ce soit public ou privé. Abonnement ou impôt.

Ainsi. J’ai un compte Flickr, le site de partage de photographies en ligne repris vers 2012 par Yahoo qui l’a littéralement fossilisé avant d’être repris en 2018 par SmugSmug. (dont le modèle économique repose sur les abonnements des photographes ainsi que la vente de services parmi lesquels la vente et/ou l’impression de photos, d’albums ou de poster). Je paie 70 dollars par an à Flickr pour y partager mes photos. Si vous visitez mon compte, vous aurez ainsi le privilège de bénéficier d’un contenu sans publicités.
Je vais, je dois finalement m’y réinvestir. Flickr est un univers calme fait de communautés d’intérêts, communauté de pays, de villes, de sujets (fleurs, paysages, portraits…), de matériel (marques ou modèles d’appareils photos, d’objectifs, …), on y explore les univers de créateurs, amateurs ou professionnels. Flickr est un espace lent, tranquille où il n’est pas rare d’éprouver un moment d’extase. Ce qui est dommage avec Instagram, c’est qu’à ses débuts, il y a plus de 10 ans, c’était exactement ça que l’on aimait, et comme les photographies apparaissaient un peu au hasard, sans s’y attendre, on pouvait voir un magnifique coucher de soleil sur des ruines au fin fond du Cambodge suivi d’un magnifique plat de cuisine italienne superbement présenté par celli qui l’avait préparé.
Avec le temps, Instagram m’a fait devenir paresseux, je me suis focalisé sur les photos iPhone, sur les « instantanés », j’ai progressivement délaissé Flickr, car là, ce sont les photos prises avec mes appareil-photos, ce qui demande un véritable travail d’édition: sur Flickr, on veut montrer du beau, du bien fait, pas de la bouffe ou une selfie pourrie.

J’ai mon site, ici-même, qui me coûte environ 160 dollars par an, serveur et domaine compris auquels s’ajoutent le temps d’écrire et de publier.
Je m’y applique plus que sur Facebook, où j’ai cède à la facilité, à l’instantanéAinsi, j’ai d’abord écrit ce billet comme un simple commentaire après avoir lu l’article de MacG au sujet des nouvelles orientations d’Instagram, alors que j’aurais du le mettre uniquement ici, ce que je fais, en y corrigeant les fautes de frappes liées à l’écriture sur iPhone, en y améliorant la syntaxe ainsi que la grammaire et en y précisant ici et là quelques points. C’est cela aussi, le blog, en tout cas pour moi. Un soucis de précision qu’on ne trouve que dans un espace où le temps se fait plus lent, maitrisé.

Restent les vidéos sur YouTube. Je ne veux plus financer Google, alors peut-être je devrais prendre un abonnement Viméo où je n’ai qu’un compte gratuit. Viméo est une plus petite société (elle appartient à un conglomérat de sociétés du net dont elle doit se séparer définitivement), beaucoup plus centrée sur la création que sur l’argent. Un peu comme Smugsmug, Viméo est repose sur le modèle de l’abonnement et la vente de contenus originaux, ce qui est honnête, et est donc moins portée sur l’argent.

Bref, oui. Il faut payer pour avoir le plaisir de découvrir et le plaisir de partager. Abonnement ou impôt.


La gratuité, cette poudre de Perlimpinpin de l’âge internet et du cycle long de prospérité du capitalisme allant de 1992 à 2017, celui des technologies de l’information, c’est la voie de la servitude volontaire. Le capitalisme nous a habitué à ne pas payer pour des services qui aujourd’hui nous semblent essentiels, qui se sont immiscés dans notre quotidien le plus intime. Rien que de penser à clore mon Instagram, j’en éprouve presqu’une douleur, celui de la séparation.
Et c’est pourtant essentiel car désormais, le capitalisme informationnel rentre en crise, il a perdu sa rentabilité car le marché est saturé, alors ces sociétés vendent nos données personnelles, nous traquent et nous bombardent de publicités ou de contenus sensés nous intéresser, et quand ces sociétés auront fusionné, elles nous demanderont de payer, un peu comme d’ores et déjà le fait YouTube avec son abonnement « premium » – on peut même imaginer dans quelques années un abonnement « premium extra » pour gagner encore plus d’argent.
La gratuité, finalement, et comme le montre cette annonce du groupe Facebook au sujet d’Instagram, c’est abdiquer notre choix de découvrir, d’explorer, c’est renoncer à la curiosité et à l’effort de créer quelque chose aussi. C’est une dépendance encore plus forte et un renforcement de notre solitude profonde.

Je pense vraiment fermer mon Instagram. Je vaux mieux qu’eux, et vous aussi.

En attendant, visitez mon Flickr, il me coûte de l’argent, ne me rapporte rien du tout (comme ce site), mais c’est un cadeau que je vous fait parce que j’aime partager, et c’est ma façon de rendre, de me souvenir de ce temps où, amoureux du Japon, je dévorais sur le net toutes ces photographies qui me faisaient rêver…

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