Écrire
Demain, c’est le premier jour du mois de Ramadan.
J’y vais à reculons, je ne suis pas du tout motivé, je n’en ai pas envie. Trop de choses en tête, récemment, je mange mal, je crains vraiment le choc. J’ai des troubles de l’alimentation, je souffre de crises de boulimies quand je stresse ou quand j’ai un passage à vide, alors je grossis, et puis alors je fais un régime. C’est ainsi depuis mon adolescence et il n’y a que très peu de temps que j’en ai vraiment conscience. C’est de maman que je tiens cela. Maman était dépressive, elle s’enfermait dans la cuisine, et elle grignotait. Et elle faisait toujours des régimes.
Récemment, je mange mal. Ce n’est pas tant de la boulimie que le fait de rentrer très tard, véritablement affamé, et alors je mange trop. Et comme je ne suis guère satisfait – comment le serait-on quand on mange trop vite -, j’ai par moments des envies de trucs sucrés.
Alors le jeûne du mois de Ramadan…
Et puis, non, en fait. Icels qui pratiquent disent qu’il s’agit d’un cadeau qui nous est fait, et je l’ai vécu. Je sais que c’est vrai. Il faut en avoir fait l’expérience pour comprendre qu’en effet, la faim et la soif, qui sont bel et bien réels, la fatigue aussi, surtout dans les premiers jours, sont compensés très rapidement par une sorte de lucidité supérieure assez unique. Et puis le jeûne fixe un cadre très strict, une sorte de contrat avec soi. Le croyant y ajoutera sa foi. J’y ajoute mon ouverture sur l’autre. Tout est plus sensible, durant ce mois.
Je l’ai fait pour la première fois il y a trois ans. Ce fut une véritable révélation. J’ai véritablement aimé qui j’étais, ce que j’étais durant ce mois. Le mois de Ramadan élève icel qui le fait. Il y a deux ans, j’ai attaqué tambours battants, tout heureux, et le mois s’est avéré plus difficile. Pas pénible, mais frustrant. Il manquait quelque chose. Il y a une an, je l’ai fait presque automatiquement, comme une machine et, je n’en doute pas, comme un grand nombre de gens.
Cette année, je vais essayer de le faire différemment. Je vais essayer de me changer, de ne pas me limiter à la nourriture.
Il faut dire que je ne suis pas du tout pratiquant. Je ne prie pas et je ne suis pas du tout religieux. Ma Foi est quelque chose de très particulier dont je parle très peu. Je ne suis ni athée, ni agnostique. C’est beaucoup complexe que cela et ne comptez pas sur moi pour élaborer sur ce sujet sur ce blog.
Il n’en demeure pas moins que jeûner comme le commande l’islam quand on ne pratique pas et quand on vit à 10.000 kilomètres de chez soi, c’est assez vide de sens. Et je pense avoir ressenti cela l’an dernier.
Alors cette année, je vais tâcher de donner un sens à mon jeûne. Je vais essayer de contrôler tout ce que je fais, et je vais aussi essayer de vivre ma Foi. Cela ne me pose aucun problème de vivre cette expérience solitaire. Au fond de mois, j’ai toujours eu quelque chose, disons une relation très particulière, avec l’ascèse et la solitude. Je ne vis pas au Japon par hasard. Je me suis intéressé au Bouddhisme il y a très longtemps. La solitude ne me pèse pas, et j’aime le silence. Je vais donc essayer de m’ouvrir au silence durant ce mois. Je vais lui donner un peu de temps.
Peut-être faudra-t-il que je disparaisse des réseaux sociaux durant un mois afin d’éviter de m’y perdre et de me bercer de l’illusion d’un monde qui n’existe pas. Peut-être faudra-t-il que j’écrive sur ce blog pour créer la communauté de mes lecteurs.
Mais je suis décidé à mettre de l’ordre tout en m’ouvrant aux autres afin de faire de ce mois autre chose qu’une histoire de bouffe.
L’écriture fait de nouveau partie de ma vie, mais d’une façon nouvelle. Je vous parlais il y a un mois d’un chantier, ce n’est plus un chantier. C’est désormais bien rangé. Mon roman est désormais rangé, tel qu’il est et dans l’état où il est, dans un logiciel d’écriture. Scrivener, pour icels qui connaissent. Ce logiciel est vraiment incroyable et je regrette de ne pas l’avoir découvert plus tôt.
Je ne vais pas vous expliquer en détail ce que l’on peut y faire, mais schématiquement, c’est très simple: on n’a pas besoin d’ouvrir les documents un à un, ils sont tous disponibles, organisables, dans des dossiers, des sous-dossiers, etc On peut également faire des fiches immédiatement disponibles, on peut y ranger des photographies, des pdf, des sites web, tout cela disponibles immédiatement, sans latence ni attente.
Je me suis également acheté une application iPad destinée à l’écriture et à la prise de note. Je peux désormais écrire et dessiner directement au format pdf, organiser mes notes en dossiers, sous-dossiers etc. Je vais m’acheter un film d’écran texturé histoire d’avoir une sensation « papier » quand j’écris sur mon iPad.
J’ai enfin trouvé également mon plan et ma façon d’écrire. Sur mon ancien MacBookPro. C’est une vieillerie datant de 2012, mais pour écrire, il est tout simplement parfait.
Écrire
Mon roman enfin bien organisé
Je me suis aperçu que j’avais besoin de faire des recherches, beaucoup de recherches. Et puis de prendre des notes.
J’ai repris l’écriture aussi, commencé à reprendre un chapitre commencé l’hiver dernier, quand le désir de m’y remettre est revenu. Je crois vous en avoir parlé. Un personnage, Pierre. Il apparait dans la première partie, peut-être dans le dernier chapitre, et c’est lui qui conclut la deuxième partie dans un addendum de quelques lignes.
Mes personnages ont désormais tous repris vie dans ma tête, mais le nouveau travail que j’entame dans ma refonte du premier chapitre leur donne également de la densité. Là où un personnage central parlant à la première personne dominait le chapitre, voilà désormais plusieurs personnages. Ce personnage (Karim) qui dominait et qui pouvait être vu comme un double auto-fictionnel de moi, ce qu’il n’était pas, est désormais une sorte de passager ne faisant que passé mais dont on perçoit qu’il est bien un personnage du roman. Mais oui, dans le premier chapitre, il ne sera qu’une sorte de passager, de passant, et c’est le lieu de l’action qui se révèlera l’acteur principal, un lieu rempli de vie.
Je dois donc travailler ces personnages que Karim va croiser, et qui vont croiser Karim.
Je veux enfermer le monde dans 500 pages.
Il y a beaucoup de recherche aussi. Les lieux, les noms des rues, des endroits, le contexte, ce qui se passe en fond, n’est pas dit mais peut surgir au hasard.
Il y a dix ans, quand j’ai commencé, je voulais me contenter d’écrire, mais je n’étais pas mûr, je me suis retrouvé dépassé sans trop savoir pourquoi.
Écrire un blog, écrire une nouvelle (comme Mortage story et Debt Fiction que je vais reprendre en y ajoutant un épilogue, que je vais éditer grâce à Scrivener et vous offrir gratuitement sous forme de epub), c’est très différent de l’écriture d’un roman.
Je me fiche désormais complètement des débats théoriques sur la pertinence du roman en 2021, sur sa mort, sur la vacuité du genre. Je m’en fiche d’autant plus que j’appartiens à la catégorie née au 21e siècle, la catégorie blogueur. J’écris assez librement, sur de nombreux sujets et je n’ai donc absolument rien à prouver en ce qui concerne un quelconque talent. Je n’écris pas pour « être écrivain », j’écris parce que j’aime ça, j’y trouve un réel plaisir, et je pense avoir des choses à dire. Avec plus de 1000 billets, depuis 2004, non, vraiment, rien à prouver. Vous avez le droit de ne pas aimer. Mais moi, j’ai pris un réel plaisir à écrire chacun de ces billets de blog, les quelques nouvelles qui s’y trouvent et mes articles pour minorités.
Alors s’il s’agit d’un roman, je suis obligé de placer la barre beaucoup plus haut. Je n’ai pas d’autre choix. Ce roman doit être fondamentalement différent de ce blog, tant dans l’objet, la forme, le style.
Voilà pourquoi le travail de recherche est nécessaire, quelque chose que je ne soupçonnais pas il y a 10 ans. Voilà pourquoi mes personnages doivent être beaucoup mieux définis, « vivants ». Simplement parce que je ne raconte pas l’histoire d’un mec. Dans Mortgage Story et Debt Fiction, je n’avais eu aucun mal car je maîtrisais parfaitement le sujet en fond, à savoir la crise économique de 2008 et les conséquences de l’élection de Barack Obama aux USA. En était sortie une nouvelle complexe en ce qui concernait le sujet, mais les personnages coulaient de source, en tout cas pour moi, et forcer leur traits de personnalité n’avait pas vraiment d’importance, cela concourait même à rendre la lecture amusante. Et il faut un certains talent, pour rendre amusante une histoire de Credit Default Swaps et de Mortgage Back Securities. Non?
Là, c’est très différent. Mais quelque part, je pense que je vais travailler un peu de la même façon en travaillant ma préparation, mes recherches et en ayant une idée très précise des rebondissements de l’histoire.
Comme je vous ai dit, j’ai une ébauche de fin. Vous aimerez, je le sais. L’histoire de Pierre va être également quelque chose que vous aimerez (et que d’autres détesteront). Karim, bien sûr, traversera ce roman du début à la fin et c’est lui qui clôturera le récit, je pense que vous aimerez comment ça se termine. Les lieux composent la trame invisible du récit en formant un peu comme trois unités de lieu même si ce n’est pas tout à fait cela, on peut aussi dire qu’il s’agit d’une sorte de récit initiatique. Karim, Luc, Alexandre, Thierry, la Duchesse, Fred, Fabien, Rachid… et les autres.
Beaucoup de monde. Et puis un personnage invisible.
J’ai donc totalement recomposé le premier chapitre pour directement y donner vie à un lieu et à quelques personnages qui reviendront tout au long de l’histoire.
Vous comprendrez que je ne peux pas du tout vous raconter et que ce que je viens d’écrire, c’est un peu « tourner autours du pot ».
J’ai lu ici et là en cherchant un logiciel d’écriture qu’il y avait deux sortes d’écrivains. Les architectes et les jardiniers. Les uns planifient tout, les autres écrivent et voient ce que ça donne. Un auteur sur un blog sur lequel je suis tombé réfute cette idée et ajoute qu’il y a aussi les bricoleurs.
C’est une catégorisation assez étrange. Et pour tout dire, je n’y crois pas. Je veux dire, pas du tout. En tout cas pour moi.
Quand j’écris un billet de blog, aucun doute, j’écris au fil de l’eau. J’ai en général une vague idée de ce dont je vais parler, et puis j’écris. Ça colle parfaitement avec le cadre du blog. C’est libre, spontané, ça peut être redondant parfois, il y a des fautes de frappe, des erreur de style mais en réalité, c’est un peu le but. Il s’agit pour moi d’écrire, d’écrire encore, de laisser ma pensée guider le flot et de parvenir à taper sans entrave. Plus j’écris sur ce blog, plus l’écriture est fluide. Et plus l’écriture est fluide, plus facile est la rédaction de textes plus élaborés.
Bref, sur ce blog, je suis résolument un jardinier.
Mais cela ne veut pas dire que c’est ma « personnalité d’auteur ». Pour tout vous dire, j’aurais assez honte de vendre un bouquin que j’aurais écrit comme un blog, et pourtant, je vous le garantis, il y en a aussi, du travail. J’écris, j’efface parfois, je réfléchis « j’écris ça ou pas », et ça prend environ une à deux heures. Parfois plus.
Mais je ne voudrais jamais vous vendre un truc écrit comme ça, j’aurais l’impression de vous voler votre argent. C’est pour cela que ce blog est gratuit, sans publicité. C’est mon univers en liberté, c’est mon semi journal, mon journal partagé, avec juste ce qu’il faut de pudeur pour ne pas m’étaler trop sur mes problèmes.
Ensuite, si je pense à Mortgage Story et Debt Fiction, s’il est vrai que je les ai écrites au fil de l’eau, donc en « jardinier », c’est sans compter qu’à la relecture, je constate quand même qu’il faudrait un sérieux travail d’editing. Et surtout, c’est sans compter les dizaines de bouquins d’économie que j’avais lus dans l’année qui avait précédée, sans penser écrire à ce sujet. C’était également sans compter les billets de blog écrits à ce sujet. C’était sans compter l’année passée à suivre l’actualité américaine, les blogs US et les émissions de MSNBC. Bref, j’étais dans le bain et je considère cela aussi comme une réelle préparation. Jardinier, éventuellement, mais j’avais quand même défriché le jardin, alors.
Si je me place sur le terrain de la nouvelle Trente Glorieuses, c’est écrit au fil de l’eau, mais là encore, il y a ma culture historique, musicale et politique qui m’ont permis d’écrire une histoire qui, au passage, mériterait un sérieux editing pour en purger les horribles fautes d’orthographe, de conjugaisons et d’accords du participe qui la traversent.
Bref, pour ce roman, j’ai besoin de faire de la recherche, de prendre des notes, de dessiner, d’organiser le récit, de bien définir les personnages. Et ça, c’est quand même très architecte. Et ça ne veut pas dire que j’écrirai comme un control freak, non, car j’aime beaucoup écrire comme ça vient.
Il y a juste qu’ensuite, il faudra certainement tout reprendre pour obtenir la bonne balance au niveau du style.
Ce qui en tout cas est très intéressant, c’est que le sujet m’occupe et, qui sait, il va peut être être ce qui va m’occuper le plus durant ce mois de Ramadan…
Sinon, j’ai un petit pépin du côté de mon projet politique. J’ai de la paperasse à faire, mais ce sera fait dans la semaine. Une fois cela fait, je vous en parlerai. Je dois impérativement régler ça.
Je pourrai aussi vous dire que je tchatte plus souvent avec mes amis qu’auparavant, particulièrement avec Tarika. Et ça aussi, c’est bien. Bien, je vous laisse.
Et très bon mois de Ramadan à toustes.
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