Palais Imperial, ou on peut constater des degats ici et la.
(écrit vers le 10 mai)
Mais quel sale temps…
C’est une impression étrange. Le sentiment que depuis le tremblement de terre, la météo s’est détraquée. Il a d’abord fait froid, très froid. Puis il a neigé. Pas la neige que nous avons habituellement en mars, quand les vents se détraquent, et que ceux venant du sud et du sud ouest repoussent toujours plus violemment les vents du nord. De la neige sans tempête et dans le froid, de la neige qui tient. Dans le shinkansen qui me ramenait de Kyôto vers Tôkyô, je découvris, étonné, cet espèce de mur noir, un bloc de nuages sombres qui formaient comme une barrière, une délimitation entre le Kantô et le Chûbu. Le temps est resté froid un bon moment à Tôkyô.
Nous avons eu des épisodes de beau temps, tous avortés. La Golden Week, où il arrive que durant un jour un record de chaleur saisonnier soit enregistré, a été fraiche, grise, et même pluvieuse. Hier, nous avons eu un temps de juin, chaud et humide. Aujourd’hui, il ne reste que la pluie et nous dépassons très difficilement les 15 degrés. Quel sale temps…
Tout est désormais parfaitement normal, ordinaire. Les trains roulent et on ne voit pas vraiment la différence avec le trafic normal même s’il en manque quelques uns. Le métro a repris un peu de lumière, seuls les immeubles, la nuit, continuent de rester éteints, mais même cela est très relatif. Nous nous sommes tellement habitués à ces quelques ajustements que nous ne voyons plus la différence. Et comme de toute façon Tôkyô est une ville où on gâche habituellement l’énergie, ce n’est pas plus mal. Les supermarchés sont parfaitement normaux depuis un mois. En fait, un touriste qui visiterait le Japon pour la première fois ne verrait rien d’anormal et penserait que peut être tel escalier mécanique est fermé pour maintenance, et telle lampe éteinte ou même absente traduit un certain laisser aller dans l’entretien, mais finirait par ne plus y prêter attention tant tout parait si normal. Les publicités dans les wagons du métro font progressivement leur réapparition. Suite au séisme, beaucoup de gens avaient annulé leurs réservations pour la Golden Week. Alors, la semaine dernière, Tôkyô était incroyablement plein, rempli de gens, les magasins débordant, les restaurants assiégés. C’est à ce demander si la récession attendue pour tout le pays ne va pas tourner, dans Tôkyô, en véritable boom économique… Qu’est-ce que ça consomme…
La télévision continue, elle, à s’apitoyer sur le sort des victimes, fidèle à sa tradition d’usure jusqu’à la corde des sujets à la mode. Mais on sent bien que le cœur n’y est plus et la quasi-totalité des programmes sont de nouveau du divertissement. En fait, comme Tôkyô a été, finalement, épargnée, c’est le cœur du pays qui désormais revit. Les tremblement de terre appartiennent désormais aux souvenirs anecdotiques en générale, et source de ces apitoiements approbatifs manifestant l’appartenance à la communauté nationale. Mais c’est clair qu’ici, dors et déjà, tout le monde est passé à autre chose. C’est un truc de région.
Ce qui marque toujours bien la différence, c’est l’absence des touristes Chinois. Là, clair, net, on est aux antipodes du boom touristique qui avait caractérisé l’an dernier. Mais même cela, je me demande si cela va durer. Le simple fait que la vie ici soit revenue à la normale va finir par dépasser les frontières et, qui sait, faire « son » voyage à Tôkyô, en gros susciter la curiosité des amis et collègues, « j’y suis allé », va peut être finir par être un truc à la mode. À la recherche des traces du séisme dans Tôkyô, voilà un truc qui peut en amuser plus d’un. « Regarde, la tour est éteinte! ». En attendant, il est très clair que le tourisme est une victime collatérale du tremblement de terre.
Il semblerait que beaucoup des Français qui travaillaient dans l’arrondissement de mon école ne soient pas rentrés. J’ai une véritable avalanche de nouveaux étudiants. Alors que l’anglais reste à son niveau, avec quelques nouveaux et quelques départs, non seulement je garde mes étudiants, mais en plus, j’ai au moins deux à trois leçons test par semaine. Déjà 5 ont signé en trois semaines, ce qui me fait maintenant un emploi du temps très rempli avec beaucoup moins de temps libre. J’ai deux autres leçons tests cet après-midi, et encore une samedi. Le bouche à oreille. Il faut dire, aussi, que mes étudiants aiment ma personnalité. J’ai été réclamé récemment deux fois en anglais aussi, et à chaque fois la même remarque. Il est dynamique et amusant. Du coup, mon directeur qui me faisait presque la gueule il y a deux mois, est tout miel avec moi.
Je rêve vraiment de travailler ailleurs. Plus prêt. Cette heure de transport le midi, cette autre heure de transport, le soir, me bouffent littéralement. Rentrer chez moi à 11 heures, le soir, me fatigue. Et puis,… mais est-ce le lieu pour cela.
J’expérimente un des vrais effets indésirable de mon traitement. La difficulté, parfois, à rester concentré. Je dois vraiment me remettre au sport. 20 kilos à perdre et une vitalité à reconquérir.
Complément du soir, chemin du retour. Temps encore plus pourri, froid, pluvieux. Sur Yahoo, il semblerait que nous sortions de ce temps là dans deux jours, mais je n’y crois plus. La météo pourrie, quand on a la tête dedans, on n’en sort pas…
Lundi soir, après avoir quitté mon étudiante Yuko, j’ai fait connaissance d’un des lecteurs de mon blogs, qui m’a souvent écrit de ces commentaires qui donnent envie de faire connaissance un jour. Nous sommes d’abord allés prendre un verre dans le café où Jun et moi allions prendre un verre quand je travaillais à Lehman Brothers, à Higashi-Ginza. Un café au style extrêmement français où je suis aussi allé avec Yann une fois. Après plusieurs verres, il était temps de grignoter un truc, alors ça a été un izakaya Za-Watami où avec des collègues de NOVA nous étions allés deux ou trois fois. On a pas mal bavardé. Le blog créé une certaine intimité. Chez moi, il lève mes inhibitions, je me sens très libre dès le départ. Je crois que pour Pierre, ça a été la même chose. C’est amusant, aussi, un type né 6 ans après moi qui a écouté les mêmes choses que moi. Marquis de Sade, Orchestre Rouge ont été les deux noms de groupes qui lui sont venus automatiquement à l’esprit. Et puis Jacno, et puis Daniel Darc. Bien qu’il habite en France maintenant, on sent sa très grande aisance dans cette ville, Tôkyô. On avait parlé de se rencontrer au temps où il habitait ici, j’ai pensé que de ne pas l’avoir fait alors, c’était un peu de temps perdu de ma part. Mais bon, entre la faillite de Nova, etc, je n’étais plus très clair…
Voilà. Le billet s’arrêtait là. Depuis, comme si d’avoir écrit avait débloqué quelque chose, je retourne à la gym, et c’est un véritable plaisir…
De Tôkyô,
Madjid
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