Le Blog de Suppaiku, journal bloggué de Madjid Ben Chikh, à Tokyo.

Suite, divers et varié


Dans le métro. Ici, la station Monzen Nakachô. Temps couvert sur Tôkyô, plutôt humide ; décidemment, le typhon de cette semaine était très particulier. Non seulement les températures ont chuté, mais surtout le temps est resté couvert :en général, ce que j’aime dans les typhons est qu’ils nettoient le ciel et qu’ils sont suivis par un grand beau temps, au moins jusqu’au prochain. Cette fois-ci, rien de tout cela, ça s’est même vaguement dégradé à mon avis. Lundi, le temps était simplement glacial.
Je suis vaguement remis de ma purge hier. Je n’arrive toutefois pas à comprendre… On m’avait qu’il lui arrivait de faire des fixations et qu’il avait ses travers : je viens d’y goûter. En revanche, il a entièrement remis en cause une décision : celle de tenter de rester dans l’éducation et de progressivement y faire ma place. Je ne sais pas si cette révision sera suivie d’effet, mais à partir de maintenant, et je ne sais trop jusqu’à quand, je considère que mon travail est subi, et non choisi. J’ai suffisamment fait le point sur mes ambitions et sur ce que je peux faire, ce que je désire faire, ce que je vaux aussi, pour subir une espèce de purge comme on en fait parfois subir aux enfants quand on a les nerfs à vifs. Bien sûr, je peux reconnaître que certaines remarques étaient justifiées, mais cela ne méritait absolument pas ce coup de pression.
Ce matin, je suis allé donner ma leçon hebdomadaire à Hiromi, hier c’était Mari et mardi Yûko. Trois cours particuliers, à chaque fois un niveau différent, chacune une étudiante que j’apprécie. Mari est bien sûr la plus intéressante car elle s’exprime plutôt bien. Je la fais travailler en B1, ce qui est un niveau déjà assez avancé : c’est un niveau « intermédiaire » selon le cadre européen de référence. Comme elle le faisait dans le passé, elle a d’ores et déjà épluché les premier chapitre. Pour elle, j’axerai sur la rédaction (à la maison), et des questions de compréhension (à l’oral). Pas besoin de « voir le vocabulaire », elle fait ça très bien toute seule et je peux donc directement me concentrer sur sa mise en contexte. Pour Yûko, le mécanisme d’auto-aquisition n’est pas en place : elle doit utiliser un dictionnaire et n’arrive pas à comprendre en contexte, notamment dans le cas où une même situation est expliquée deux fois en des termes différents. Hiromi est une débutante studieuse à qui je peux donner pas mal de devoirs. Elle essayait de forcer un peu son niveau au début car elle avait appris durant quatre mois en France, mais elle s’est vite aperçue,je pense, que ce qu’elle avait appris méritait d’être revu. En revanche, elle s’applique à mobiliser ce qu’elle a appris dès que cela est possible, et elle s’en sert assez bien. Les progrès de Hiromi, mais également ceux de mes élèves à l’école m’encouragent et me confirment dans ma certitude d’être un bon pédagogue.
Ce soir, ce sont trois classes de français, la dernière étant la plus avancée, du niveau de Mari. Je les aime bien, ils ont vécu en Europe et sont assez relax.
Je donne mes cours dans un café à Kyôbashi, près de Tôkyô. Un établissement ayant la double qualité d’être abordable et d’être calme. Le café y est bon, et c’est le « plus ». Parfais pour enseigner. Cette semaine, à côté de chez moi, un « café de Belle Époque » a ouvert. Je n’y suis pas encore allé, mais ce pourrait être un cadre idéal pour travailler, le matin, de temps en temps. Ce café est en fait la cafétéria de l’école-centre de formation situé au-dessus : les étudiants doivent y être nombreux. Ce peut être amusant, une ambiance étudiante dans ce voisinage autrement essentiellement réservé aux femmes aux foyers et aux « mères ». Comme je l’ai déjà écrit, malgré un certain calme « banlieusard », j’aime bien mon quartier. Il est très pratique, bien desservi et, bien qu’excentré, on gagne le centre en moins de 10 minutes en métro.
Le nouveau gouvernement, ce sera le 16 septembre. Comme je regarde essentiellement AsahiTV (centre gauche), j’ai eu droit ce matin aux gossips concernant le nouveau Premier Ministre, ou plutôt sa femme, la « first lady », comme les journalistes l’appellent. Je crois qu’elle va être la première à devenir à ce point public. Koizumi était divorcé, Fukuda était avec une vielle genre Madame Barre. Cette fois, c’est une femme élégante, montrable. Nul doute que le marketing utilisera cette aubaine quand la popularité vacillera… Les débats ici rappellent ceux de la France de 1981 : il y en a qui veulent déjà modérer un programme jugé trop radical… Avec l’expérience Mitterrand en tête, je ne saurais que trop conseiller d’appliquer le maximum de choses de suite,quitte à réviser ensuite et faire un plan de rigueur (en augmentant les impôts de plus riches, comme le fit Mitterrand et comme s’apprête à le faire Obama et comme l’a dors et déjà fait Gordon Brown). Si Mitterrand n’avait pas augmenté les minimas, le SMIC, fait la 5ème semaine, l’abolition de la peine de mort ou le remboursement de l’IVG (entre autres), non seulement il n’aurait pas tenu 5 ans, mais en plus la gauche se serait discrédité pour au moins 20 ans… C’est parce qu’il y a eu ces avancées sans désastre économique que les gens ont revoté Mitterrand en 88 : on pouvait dire à l’arrivée que la gauche, c’était quand même moins pire (ce sera d’ailleurs la même chose avec Sarkosy !). Bref, j’espère que le Parti Démocrate foncera tête baissée dans son programme, quitte à se planter : les électeurs lui sauront gré d’avoir essayé de bouger. Faute de quoi, ils seront regardés comme les autres et dans ce cas, les gens préfèrent généralement l’original à la copie.
Je suis en fait dans le métro, dans l’autre sens. Les cours se sont bien passés. L’orage est passé. Comme je n’ai pas publié mon post d’hier, je pourrais très bien ne le publier, mais comme j’ai choisi une certaine forme d’honnêteté avec moi-même et avec vous dans ce blog, je le publie donc. Soyez juste informés que l’incident était clos. Et aussi que j’avais compris également que je devais trouver autre chose…J’ai mon correcteur de grammaire activé, je me demande si je devrais pas désactiver ce machin, il me propose parfois des corrections avec lesquelles je ne suis pas d’accord (synonymes, écrémage de mes utilisations « limites » de la langue française… Un dictionnaire ignore l’intentionnalité d’une faute de grammaire, le double sens créé, le faux-sens utilisé, le contraste des termes associés. Un petit grand. Ah, tiens, là, il ne me suggère rien…Je n’ai pas choisi ; en fait il s’est installé lors de ma réinstallation du système sur mon iBook. Des fois, il me fait des propositions vraiment très connes. (là,il m’a rappelé que « des fois » est une locution parlée, comme si je ne le savais pas, moi, ou alors il me refuse « là » et me conseille « cette fois » et « alors »… Quel crétin !).
Demain, je ne travaille que 1 heure et quarante minutes. Avec plus de deux heures de transports, ça tient presque du gâchis…
Conversation avec mes étudiants avancés du soir au sujet des élections. Je confirme, la droite japonaise est sonnée et les arguments utilisés sont les mêmes arguments de losers qu’en France en 1981. Un étudiant a invoqué : la faute aux médias (alors que les médias sont tenus par la droite). Les journalistes voulaient du sensationnel. Le pays va à la ruine. Les Démocrates n’ont aucune expérience. Ce n’est pas avec ça que la droite va revenir
Un autre étudiant a lui tout à fait approuvé quand j’ai dit que le Japon devait bouger et s’ouvrir car il ressemblait à une cocotte-minute. Il a justifié son vote pour la DPJ car il faut « améliorer la vie quotidienne des Japonais ». Je commence vraiment à penser que ce vote traduit un bouleversement extrêmement profond, et que la comparaison avec la France de 1981 est vraiment pertinente. Je suis heureux d’être dans le Japon de ce possible.
J’ai lu un article crétin dans le Financial Times au sujet du Japon, un truc écrit par un type qui connaît le Japon des guides touristiques fortunés et qui n’en a perçu que la vitrine (ah, le tatemae, ce talent des Japonais à ne paraître que ce qu’ils veulent paraître pour cacher ce qu’ils sont vraiment, un des thèmes de la littérature Kwaidan, ces histoires qui font peur, avec leurs êtres à deux visages, leurs femmes des neiges, leurs fantômes…). Le Japon est pour ce crétin un pays riche, ultramoderne , créatif et ouvert au design et à la gastronomie raffinée. Ils me font rire, ces crétins. Ils n’ont jamais mis les pieds dans Kôtô-ku, Edogawa-ku…Et encore, je ne parle que de Tôkyô. Qu’ils aillent donc admirer Saitama ou Gunma admirer ces poches de sous développements aux bordures de la capitale. Qu’ils les voient une fois, ces vieux avec leurs béquilles en bambou, comme dans le tiers-monde. Ces régions entières faites d’ennui, de misère, peuplées de vieillards dans leurs baraques en tôles ondulées rouillées. Tôkyô et le désert Japonais. (à suivre)
Madjid

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Commentaires

2 réponses à “Suite, divers et varié”

  1. L'histoire de ta purge — que j'imagine façon dorama, forcément — me fait penser à l'incompréhension des occidentaux quant à l'inclinaison du buste : un truc qui nous semble insupportable de soumission. Pourtant, lorsqu'on s'incline en lâchant à intervalle régulier des « Hai. Sumimasen. Môshiwake arimasen. Hai. », on a tout le loisir de se concentrer peinard sur les pompes péraves de son chef en pensant : « Vas-y, fais ton numéro, trouduc, j'en ai rien a cirer. »

  2. L'histoire de ta purge — que j'imagine façon dorama, forcément — me fait penser à l'incompréhension des occidentaux quant à l'inclinaison du buste : un truc qui nous semble insupportable de soumission. Pourtant, lorsqu'on s'incline en lâchant à intervalle régulier des « Hai. Sumimasen. Môshiwake arimasen. Hai. », on a tout le loisir de se concentrer peinard sur les pompes péraves de son chef en pensant : « Vas-y, fais ton numéro, trouduc, j'en ai rien a cirer. »

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