Quand j’avais son âge, je me suis retrouvé gravement malade, très proche du suicide. J’ai mis des années à rebâtir un équilibre, à devenir solide, et je suis solide. À cette époque, j’étais seul, je n’ai pas eu une main pour m’aider. Tant que je n’aurai pas la confirmation qu’il va bien, je ne serai pas bien.
Je pousse la limite de l’écriture au delà de toutes les limites que j’ai pu installer jusqu’ici. Je n’ai plus que l’écriture pour essayer de tourner une page que je ne parviens pas à tourner. De Nori, je vous avais dit beaucoup, mais comme désormais je n’ai plus aucune nouvelles de lui…
Nori m’a piégé dans son monde, je n’ai pas vu venir, j’étais trop aveuglé par mes propres sentiments. Je suis rentré dans ses difficultés, et je l’ai perdu de vue. Lui, il a certainement pris peur de me voir rompre avec Jun, il a certainement pensé que désormais je n’aurais plus de limites dans les exigences, et que celles-ci dépasseraient le cadre qu’il s’était lui même fixé, un cadre auquel il est astreint depuis qu’il a commencé à partager sa vie avec l’autre.
Il m’avait pourtant dit qu’il ne l’aimait pas, qu’il ne lui plaisait pas mais qu’il s’était installé dans sa vie par habitude après avoir eu traversé un moment difficile. Peut être moi-même suis-je devenu un moment difficile… Nos rencontres se sont espacées, il me disait m’aimer, se faisait toujours plus exigent et en même temps s’est mis à réagir de façon irrationnelle avec moi. Je n’ai pas d’explication.
Il semblerait qu’il se soit mis à m’espionner, à me traquer sur internet. Le matin, il y a encore un mois, quand j’ouvrais mon ordinateur, je pouvais voir qu’il était connecté depuis des heures, il est insomniaque, je lui disais bonjour, et alors il désertait Messenger. Comme s’il m’attendait pour dormir… Une fois. Il m’a envoyé un bonjour à 4:00 du matin. Il m’écrivait des fois la nuit alors que je dormais… Et puis depuis deux semaines son attitude a changé. Peut être, comme on me l’a suggéré, depuis ma séparation avec Jun. Soudain, ce n’était plus un jeu.
Et puis je me demande s’il n’a pas non plus commencé à lire ce blog, avec Google, certaines réflexions m’invitent à le penser, et à en tirer ses propres interprétations, comme par exemple mes connections sur des sites à l’époque de ma relation avec Jun, y trouvant là une source d’inquiétude qui expliquerait pourquoi il s’est mis à m’espionner.
Cette histoire, la semaine dernière, m’a beaucoup perturbé. Alors que je ne m’étais connecté que peu de temps sur Grindr pour vérifier qu’on ne me débite pas, et en consultant par curiosité mais sans réel intérêt, au point d’effacer l’application de mon iPhone dans la même journée, sa réaction violente, accusatrice, m’a vraiment déstabilisé. J’ai accepté ses termes, mais je ne sais pas, quelque chose s’est mis à me travailler, une inquiétude profonde. Vendredi soir, il est allé chez des amis, il y a regardé des vidéos jusque trois heures du matin. Ça ne me dérange pas, je suis heureux qu’il soit heureux, mais plus jamais il ne veut rester chez moi… Samedi soir, il est passé en coup de vent, tout en étant très distant, à un rendez vous avec Yann et Pierre. En fait, je me faisais un réel plaisir de le voir venir, mais ce soir là, il devait rentrer, l’autre avait préparé un repas gargantuesque. Nous avons pourtant chatté ce soir là, échangé des photos, je retrouvais Nori… J’étais heureux. Je suis rentré saoul chez moi, on a bavardé, et puis soudain il a arrêté de m’écrire. J’ai eu une sorte d’intuition. J’ai rechargé l’application Grindr, et je n’ai eu aucun mal à le trouver. Ça m’a fait de la peine…
Je ne suis plus jaloux. Je ne suis plus possessif. J’ai beaucoup mûri. J’étais peiné, mais je me suis aperçu que je l’aimais vraiment très fort pour accepter de le voir sur un site de rencontre. Le lendemain dimanche alors qu’il travaillait, il m’a écrit, il était amusant, je pourrais même dire sexy, il m’a écrit, on a échangé, mais cette fois le mal était fait, je me connectais sur le site pour vérifier, j’étais désormais rentré dans un jeu dangereux. Et il était là… Ça me faisait de la peine, et en même temps j’ai commencé à penser qu’une relation est quelque chose de complexe. Moi, je ne voulais pas perdre sa compagnie. Et surtout, je ne savais pas quoi faire… Lundi, mardi… Je me suis mis à me connecter au hasard, dans le métro, chez moi, avant ma leçon du lundi soir. J’ai mis une photo au hasard pour passer inaperçu sans penser à brouiller les kilomètres. Et je l’ai mis en favori pour le suivre. Je n’avais pas envie de draguer, pas la tête à ça…
Mardi matin, je me suis connecté, il était là, parfois en ligne, des fois non. Depuis 2 semaines, en revanche, son activité sur Messenger s’était espacée, il ne se connectait presque plus. Alors que je venais d’arriver à ma leçon du mardi matin, il m’écrivit et le demanda si j’étais occupé. J’ai pensé qu’il voulais me voir, j’étais heureux, je lui ai même proposé de se voir, de me faire porter malade au travail. Je n’ai compris sa question que bien plus tard… Je lui ai, comme toujours, envoyé quelques photos de fleurs prises au hasard, dans les rues.
L’après midi, j’ai pensé qu’il fallait arrêter ce jeu, que peut être il m’avait suivi, ou peut être non. Alors j’ai mis ma photographie, j’ai mis quelques lignes et je l’ai branché. Je trouvais la situation drôle, en fait, et je pensais qu’il s’en amuserait. Il y avait, il y a encore très peu de temps, une très grande transparence de notre relation. Je n’avais pas mesuré les conséquences. En fait, je pensais qu’il me proposerai de se voir, on aurait pu parler de cul, Grindr, c’est fait pour ça..
Il m’a insulté, m’a accusé d’être une salope puis m’a bloqué. Je suis allé sur Facebook, mais je ne sais si c’est la connections ou autre, mais soudain il était effacé. Le choc a été extrêmement violent. Je pense que tous les étudiants mardi en fin de journée ont constaté ma mine rouge. J’ai depuis le visage fatigué, éventuellement depuis aujourd’hui je suis parvenu à retrouver un « masque » présentable malgré les cernes d’un sommeil agité. Mon traitement n’aide pas…
Il a fini par débloquer son compte. J’aurais du écrire « pardon », ou quelque chose comme ça pour lui laisser une possibilité de revenir, je ne sais pas. Mais justement je ne suis pas calculateur, une incroyable panique m’a saisie.
J’aime Nori.
Soudain, il disparaissait de ma vie… Je ne me sens coupable de rien. Comme je vous ai dit, je n’ai connu que lui depuis des mois. Et comme je vois ai dit, j’en étais arrivé à penser que notre route serait difficile, et que je ne voulais pas le forcer, je pouvais négocier notre couple, lui laisser une réelle liberté en attendant que le temps nous rapproche.
Je suis vraiment attaché à lui.
Je me suis donc perdu en explications, justifications, excuses… Je pense avoir été lamentable, j’ai été sincère aussi. Cela a duré jusqu’hier soir, il ne lit pas mes messages. Je me fais l’impression de me taper la tête contre les murs. Tout le monde me dit d’arrêter, je ne peux pas.
Je suis attaché à lui.
Je ne comprends plus rien… Hier soir, enfin, j’ai longuement pleuré, j’ai écrit un dernier message, long, je ne pouvais pas retenir mes larmes. Moi, cela m’a fait un bien incroyable de pleurer, mais j’aurais préféré qu’au moins nous partagions ce moment. Je suis face à un silence qui fait suite à un débordement d’affection.
Dimanche soir, quand il est rentré chez lui, l’autre l’a disputé parce qu’il était rentré trop tard. Toujours cet espèce de couvre feu… Je ne connais pas la réalité de leur relation. Nori m’a un peu expliqué, je ne sais pas s’il ne s’agit pas d’une forme d’oppression psychologique sur Nori. Je n’écrirai pas ici certaines choses que Nori m’a racontées, mais si elles sont vraies, alors Nori est en danger. Peut être Nori, insomniaque, se fabrique un univers à lui avec les sites de dragues, où il chatte… Peut être m’espionnait il vraiment, ayant lu sur mon blog que j’utilisais ces sites à l’époque où j’étais avec Jun… Je ne sais pas.
Je retourne tout dans tous les sens, je n’ai rien, aucun élément. Ma raison m’invite à tourner la page, et dans ma vie j’en ai tournées, des pages. Mais dans ce cas, je ne sais pas, je ne peux m’empêcher de penser que Nori a un moment très difficile à passer, et que je suis dans cette histoire, que j’y ai ma part, et que je dois être là d’une façon ou d’une autre.
Désormais, il ne consulte quasiment plus Messenger. Je ne veux pas utiliser d’autres modes de contacts car je ne veux pas l’encercler, et il doit avoir la liberté de ne pas communiquer avec moi. Il ne m’a pas vidé de son compte Facebook, ce qui veut dire que la porte est toujours ouverte. Peut être passe-t-il son temps à m’épier sur les sites de rencontre, mais je n’y ai plus aucun compte. Peut être se tape t’il des mecs? Peut être se fait il du mal? Peut être voit il des amis? Peut être est il emprisonné chez lui avec l’autre qui joue à ses jeux vidéos ? Je ne sais rien. J’aimerais juste savoir qu’il va bien, qu’il ne sombre pas dans une dépression pire que celle d’il y a deux ans, qu’il ne soit pas en train de perdre la tête comme il en avait peur il y a deux mois.
Je ne me moque pas. Quand j’avais son âge, je me suis retrouvé gravement malade, très proche du suicide. J’ai mis des années à rebâtir un équilibre, à devenir solide, et je suis solide. À cette époque, j’étais seul, je n’ai pas eu une main pour m’aider. Tant que je n’aurai pas la confirmation qu’il va bien, je ne serai pas bien. Je peux accepter une rupture, je n’accepterai pas sa souffrance parce que je tiens à lui. Nous nous sommes rencontrés avant que tout devienne compliqué pour lui, et avant que tout ne se simplifie pour moi. Il est amusant, vivant, il bouge il sourit, et il a une façon de me demander pourquoi je ris qui est unique et qui me remplit de bonheur, et cela, il a été le seul à me faire cela.
On ne jette pas un mec à la poubelle une fois l’usage périmé.
Je pense que Nori est blessé, piégé par son propre jeu, malheureux. J’espère me tromper, j’espère qu’en réalité il est heureux et que mon esprit romanesque fabrique une histoire qui en réalité n’existe pas. Si c’est le cas, pour moi tout redevient facile, mais en attendant, je vis avec le poids de l’incertain. Il y a un garçon que j’aime et qui est seul, dans un appartement aux apparences du confort mais à l’univers réduit d’une prison, et où trône une divinité vulgaire qui régente la vie quotidienne.
Aujourd’hui, et parce qu’hier j’avais longuement pleuré avant de me coucher, j’ai retrouvé mes esprits et je suis sorti de l’état de choc, je peux mettre par écrit mes sentiments contradictoires, je comprends mieux le piège dans lequel je me suis mis. Je n’ai pas de solution, mais la douleur intime a disparu, j’ai repris des forces. Je continue de lui écrire, mais comme j’ai tout liquidé hier soir, je n’ai plus rien de spécial à dire si ce n’est garder un contact, ténu mais réel qu’il saisira s’il va mal, et encore plus facilement s’il va bien (mais s’il allait bien il pourrait me radier de Facebook, ou bien me dire d’aller me faire foutre, etc). Je suis attaché à lui, tout simplement. J’assume. Ne riez pas de moi, je suis lucide.
Samedi, c’est l’anniversaire de Jun. Quand nous nous sommes séparés, je lui avais promis de l’inviter au restaurant, comme un ami, comme un petit frère. Je lui ai écrit ce soir pour l’inviter, j’attends sa réponse.
Dimanche après-midi, je vais dans une clinique pour mon bilan. IST, charge virale, etc et peut être aussi, j’aimerais bien, changer de traitement. J’ai trouvé une bonne clinique que l’on m’a recommandée.
La semaine prochaine, je suis en congés à partir de lundi après-midi. Je ne sais pas trop à quoi ressembleront ces congés, j’en prends mon parti et finalement je ne trouve pas cela si mal.
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