Pas fait grand chose ces derniers temps, j’aurais envie de dire… En fait, je dévore depuis ce week end le 平家物語/Heike monogatari / Le Dit de Heike, ce récit qui raconte la spendeur et le déclin du Clan Hei, la maison uchi / 家 – Taira /平. Il faisait très chaud ce dimanche, près de 35°, ça m’a mis KO immédiatement, d’autant que l’humidité était elle aussi maximale. Alors, entre sieste, エアコン/ Air conditionné poussé à fond, je suis resté chez moi, sans complexe aucun. C’est agréable aussi, de ne rien faire au Japon. Pour m’occuper, j’avais le choix : ce fichu tome III de la recherche du temps perdu que je n’ai toujours pas fini, toujours à recommencer, et le Dit des Heike. Le second me paraissait tout indiqué pour ce séjour à Kyôto… On m’avait dit que Kyôto était une ville morte peuplée de fantômes… Ce doit être vrai. Je me demande s’il n’y a pas moins d’habitants aujourd’hui que de gens qui y sont mort pour vouloir la vaincre, la conquérir ou la défendre… Et de quelle façon. Ce livre – un pavé – se lit très aisément si on ne cherche pas à se souvenir de tous les noms, car alors il est clair que l’on s’y perd. Mais en revanche si on passe cet obstacle, cela devient très aisé, très facile, et c’est un authentique Thriller. On connait la fin : le clan sera défait. On connait le point d’orgue, le naufrage de tout le clan lors de la bataille de 壇ノ浦/ Dan no Ura, le suicide des Dames de Cours et surtout le suicide du jeune Prince agé de 6 ans. Plus aucun ne survivra et la famille Impériale elle même sera ainsi touchée, mettant un terme à l’agonie de la cours de 平安/ Heian, cette cours raffinée, lettrée et aristocratique dominée durant 400 ans par le clan Fujiwara, copiée d’abord du modèle chinois, puis authentiquement japonaise d’âme, de coeur et de style. La montée au pouvoir de ce clan de guerrier, dans la 2ème moitié du 12ème siècle marque la fin de ce qui pour les Japonais est un peu comme notre antiquité, une matrice. Et on sent bien à travers ce récit, que c’est ainsi que ces évènements ont été ressentis à travers tout le Japon.
J’ai dépassé tout à l’heure les 350 et quelques pages, le clan est sur un retour de fortune : quel suspens… Moulte détails égrainent le récit : le poids de la religion, qu’elle soit 神道/Shinto ou 仏教/Bouddhiste, de telle ou telle obédience, ce qui est frappant c’est comment les « sectes » concourent à cette cacophonie d’un monde sur le déclin. Moines guerriers, ascètes, rivalités d’influence, moines mendiants, moines vengeurs, tous sont là à épier le cadavre agonisant de la capitale, à attendre sa reconnaissance. Les guerriers eux même sont légions, enfants malheureux de descendances troublées, plus ou moins princière de longue date, mais toujours roturière. Tous à chaque étape marquent de leur façon le déclin du goût, l’égarement, l’oubli des règles et de l’ordre symbolisés par le bouddhisme. Et puis l’Empereur, finalement seul référent, complotant souvent, souvent fort mal, mais ayant la légitimité pour le faire, sans avoir jamais toutefois le pouvoir d’en faire plus. On peut penser au passage à Hiro-Ito durant les années 30-40, un pouvoir immense, et pourtant aucun pouvoir du tout…
Je ne vois plus Kyôto tout à fait de la même manière, et je comprend encore mieux ce sentiment de tristesse que je ressens dans cette ville, et qui concourt à sa beauté.
Je suis très heureux de ce typhon, croyez moi. Je ne suis sorti de dimanche à mardi, lisant beaucoup, entrecoupant le tout de flash télévisés pour voir à quelle sauce nous allions être mangés.
Cette nuit, le vent a soufflé très fort, il a beaucoup plu. Hier, les températures faisaient le yoyo.
Aujourd’hui, parès une matinée au ciel changeant, la journée a été très agréable…
Journées Typhon sur le Japon
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