(ou : je n’ai pas que ça à faire….)
Quelques mails envoyés, reçus depuis dimanche. Nous sommes maintenant jeudi, il fait très chaud sur la ville, et je pense être enfin remis de la fatigue et du décallage horaire. Même si, d’ailleurs, j’ai constaté à quel point j’étais désormais habitué à cette différence de 7 heures. Ainsi, hier soir, bien que couché vers deux heures du matin, je me suis levé sans problème à dix heures. Du gachis ? Je devrais être levé sur le pied de guerre à 7 heures pour être dans un temple dès huit heures, foncer dans un autobus à dix pour être ailleurs à onze ? Manger en vitesse deux onigiri / おにぎり, boire la première bouteille de sencha / 煎茶 thé vert… Jamais ! Je l’ai déjà écrit cent mille fois, je suis un mauvais touriste. Ce que je n’ai pas vu les dernières fois, ce que je ne verrai pas cette fois-ci, eh bien, je les verrai la prochaine fois ! En attendant, je découvre à quel point cette ville m’est familière, comme elle s’est progressivement faite mienne. Kyôto est une ville triste, usée (le Japon a d’ailleurs une affinité très particulière avec l’usure, la rouille, le poli, la fissure, le cassé…), aux couleurs fletries, un peu comme si cette ville était un espace oublié, vidé du présent et qui se contentait de vivre à défaut d’exister… Etrange sentiment où se mêlent tristesse, mélancolie et moments de splendeur. On roule quelques minutes au mileu de ce désert urbain extrèmement provincial, extrèmement calme et soudain surgissent au hazard temples, jardins, portes de ville, femmes en kimono, sanctuaires, torii, arbres artistiquement taillés… étonnant. Dépaysant. Mon rapport à la ville se transforme au contact de Kyôto, de sa verdure foisonnante et luxuriante (luxe riant).
A peine arrivée je l’ai reconnue et je ne m’y perd plus. Je m’y retrouve, plus familier avec moi-même que nul part ailleurs. Alors je savoure ce temps, j’allume la télé, je somnole et m’habitue à ce rythme de vacances, en attendant mieux.
J’ai bien sûr acheté un vélo, dans une vieille boutique certainement aussi agée que le vieux monsieur qui me l’a vendu. JPY 4.000… On a combien de vélo à ce prix, EUR 30, à Paris ? Paris, qui ne me manque pas du tout.
Mon appartement est très très bien, j’y suis seul et j’avoue que mes 10 mètres carrés (6 tatamis), ma cuisine et ma salle de bain, pour EUR 450, charges comprises, ça me suffit très largement. Même pas de colocataire, l’autre chambre est vide. Un appartement à soi, à Kyôto, s’y promener nu le matin, le café à la main, les cigales en fond sonore, quel luxe !
Je me suis promené, quand même ! Je suis retourné à Fushimi, comme toujours j’y suis tenu, dire bonjour à Kitune et remercier mon protecteur le cheval. Promenade longue et vivifiante, bruits sonore de la nature, criquets, cigales, corbeaux, oiseaux divers et variés, insectes voraces qui vous attaquent les pieds, ces goinfres, mais que l’on chasse aisément en
marchant d’un pas ferme et décidé, chaton fatigué par ces attaques répétées et miaulant, お母さんお母さんどこにいるの?いたいよ!Je le caresse et je repars, une heure, deux heures de promenades qui monte, qui monte, quelle vue !, et puis ça monte encore, les arbres, les torii rouges, et ces renards de pierres qui nous observent -qui sait, peut être un esprit se cache t’il quelque part, à l’affut, sera t’il bon, ou nous jouera t’il un vilain tour ?
En nage je suis rentré chez moi. Ca, c’était hier. Avant hier, j’ai passé l’après midi et la soirée avec Yoshinobu, à Osaka. Nostalgie dans le quartier 新世界, construit au début du vingtième siècle et où était érigée une réplique miniature de la Tour Eiffel, du temps où l’on croyait au futur, et aujourd’hui remplacé par un quartier commerçant démodé (à la mode dans les années 50) dont le symbole est l’actuelle 通天閣, réplique économique kitsch et sans grâce de cette fantastique et inattendue Tour Eiffel du Kansai… Mais je l’aime bien, cette Tsutenkaku, j’aime son charme kitsch 50’s… Nostalgie, nostalgie. Qui dirait en parcourant les rues de cette ville qu’elle fut, il y a un peu plus de cent ans, la ville la plus riche du Japon ? Bien devant Tôkyô…
Fin de soirée dans un bar gay, où seul je n’aurais jamais osé rentrer : 20 mètres carrés à tout casser ! Quelques clients. J’ai pu chanter quelques chansons, 黒い花びら、私の城下町, les feuilles mortes… Yoshinobu m’a dit que je peux y retourner si je le souhaite, mais j’avoue quand même que les bars japonais ne me sont pas familliers. J’ai attrappé ce soir là mon dernier train sans encombre, je n’ai pas passé la nuit à 新大阪/ Marne la Vallée. Je l’aurais bien passée dans les bars d’un client de ce bar, environ 25 ans, très sympathique, mais ça, c’est une toute autre histoire. Ce jour là (c’était mardi), il a violamment plu toute l’après midi.
Alors, allons-y, avec ces mails.
Le 29, à des amis,
« temps tres tres chaud.grace matinee ce matin jusque onze heures trente. mais pris mon dej a sept puis recouche. super appart a moi tt seul.pas mal de depenses. je recherche un velo d’occaz’.hier journee tres remplie jusque tard. cette ville est tres grande.je ne recois pas le signal wifi jusque ma chambre 🙁 mais il y a un « salon » ou je peux aller pour l’avoir).bises »
Toujours le 29,
« Signal faible, mais signal tout de même : mon mac ne se connectait pas à cause… de l’heure! Eh oui, j’ai déjà eu ce problème. Bien, on va pouvoir bosser!
Côté fric, je vais pouvoir économiser pas mal car j’ai une vraie cuisine. J’ai claqué pas mal pour la bouffe hier (fait mes courses hier vers 19 heures). Ce midi, rebelotte (un « pack universel » pour mon mac : le bébé trouvait que le courant de mon adaptateur 110 n’était pas bon et ne le digérait pas… )
Promnade dans Kyoto en début d’après midi, très chaud, à la recherche d’un vélo d’occasion, puis rentré à la maison pour déjeuner vers 15 heures puis prendre mon médicament, essayer aussi le « pack universel » (en fait, l’adaptateur fait 100 v à 240, 50/60 hz, il faut y mettre un embout « prise » : le « pack », c’est des embouts anglais, japonais, américains, européens… 5000 yens (env 38 eur). Mais bon, comme ça je peux faire le tour du monde… ne !
Je retrouve Yoshinobu demain à Osaka. Ca c’est sympa. Je vais contacter aussi Megumi à Tokyo. Je crois que je vais réunir quelques personnes à Tokyo pour mon anniversaire. Pour Paris, je vais essayer de trouver un endroit (café) pour réunir un peu de monde aussi.
Aller, je vais ressortir m’achter un vélo puis, vu qu’il est trop tard, aller me faire bronzer dans le jardin d’un temple à defaut de le visiter.
Cette ville est une ville triste, un peu usée, trop calme, mais c’est une ville attachante, entourée de montagnes, parsemée de temples… C’est ici que je suis bien, et c’est ici que je désire vivre quand je serai un peu plus agé. Ca me fait du travail… Je n’ai qu’à devenir écrivain.
A plus,
Bises
Madjid
PS : nicolas, ton mail n’est pas passé sur mon portable… tjs cette histoire de codage…
Bises »
Le 30 au soir, séquence post alcool dans le train, attention, on s’accroche (je suis comme ça quand j’ai repéré quelqu’un…),
« retrouve Yoshinobu a Osaka. Ballade, restau, bar gay… Il a plu tte la journee, ca vient de se calmer. Faut que je me debrouille pour rester ici (bref j’ai bu). Je suis dans mon train qui me ramene loin de mes illusions(il y avait un mec pas mal dans ce bar). Mais va draguer quand tu es avec ton copain Yoshinob… mais mets y les pieds sans ton copain Yoshinobu dans ce bar de 20m carre… Je suis ici comme si je n’avais jamais quitte Kyoto, comme si c’etait la suite… Ma memoire a aboli le temps… les japonais sont mignons… pub : un appareil photo 16#9. Autours de moi on dors : il est presque une heure. Je vais recontacter Nova… Je ne sais plus ce qu’est Paris… Bise »
Vous inquiétez pas, l’alcool n’a qu’un effet passager, je vais beaucoup mieux !
Mon ami Alain, d’ailleurs, ne s’y est pas trompé,
« Il est des no-oo-tres, il a bu son verre comme les au-o-tres… »
… et Nicolas non plus,
« il est cuit là! a archiver ça! Nicolas »
Voilà. J’ai un peu rattrapé le vide de ces 3 jours, vous avez une idée de mon retour ici
Petit ajout : J’ai quelques problèmes d’upload avec mon FTP (je crois que la connection est bridée, ici), il va falloir attendre pour mon Podzine; à la place, je pourrai mettre quelques vidéos sur .mac. Il vous faudra le plug in h264, c’est à dire le plug in HD mp4. Pas que ce soit un choix particulier, mais cela me permet, par exemple, de faire tenir 17 mn en 40 Mo avec un son et une image de très haute qualité (pour ce niveau de compression). J’ai en effet très peu de place sur mon .
Mac (IDisk).
2ème petit ajout, au sujet de mon « auto censure » sur mon double blog, « suppaiku au Japon ». Mon deuxième blog est plutôt destiné à mes collègues de travail, qui ne me sont pas intimes. Par ailleurs, je suis assez septique quant à l’attitude de mon employeur (Manpower) au cas où il apprenait 1) ma sexualité 2) mon statut séropositif. N’y voyez pas du tout donc une quelquonque honte, je suis outé depuis très longtemps dans mon entourage, mais plutôt une forme d’égoïsme : je ne travaille pas par passion mais par obligation. Mon travail me paie mes voyages, cette année il me permettra aussi de me payer mes études et mon prochain voyage. Je ne peux donc que vous encourager à ne lire que la version originale, ici même. Plus croustillante, non ?
A bientôt.
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