…, et malgré tous ces inconvénients, mon SD15 est devenu un compagnon que j’aime…
SD15, 17-50 2.8 HSM, Post traitement rapide dans SPP 5,3. 24 photos, Kyoto, aout 2012.
C’est vendredi, il est bientôt une heure, je vais au travail, je suis dans le train, il fait un peu frais, dehors il fait très chaud, j’ai la tête dans la semaine, ce soir, elle sera dans le week-end, pourtant je travaille demain, le samedi passe vite, je n’aime pas le vendredi, je suis le seul professeur à l’école, c’est interminable, mais bon, aujourd’hui c’est jour de paie, c’est toujours ça de pris, je préférerais me promener, je dis ça mais c’est pas vrai, je préférerais rester chez moi, ce matin j’ai fait une lessive, enfin deux, je n’ai pas fait le ménage, je le ferai ce soir, j’ai du faire les courses, je n’avais plus de café, impossible de déjeuner sans café, mon poids ne varie pas, à l’hôtel il y avait un grand miroir, j’y ai vu mon corps, ça faisait longtemps, l’espace d’un instant je me suis vu presque maigre, ce n’est plus le même corps, 22 kilos, c’est beaucoup, Jun à fait une photo dans un temple, je sonnais une grosse cloche, sur la photo je suis vraiment mince, je n’en reviens pas, cela doit faire plus de 10 ans, je suis assis dans le train, je tape ce texte et le vieux à côté de moi est assoupis, j’aimerais en faire autant.
Je vous disais l’autre jour que j’avais acheté un nouvel objectif.
Si vous êtes un lecteur régulier de ce blog, vous devez savoir que je photographie en Sigma. Nous ne sommes pas nombreux dans ce cas, pour beaucoup Sigma est un fabriquant d’objectifs économiques comme Tamron.
C’est vrai en partie.
En fait, Sigma commercialise des appareils photos équipés d’un capteur unique au monde, le capteur Foveon. Il s’agit du seul capteur à trois couches non expérimental et grand public. La première fois où je suis tombé sur une photographie prise par un appareil Sigma, j’ai vraiment été très étonné. En effet, je n’aimais pas vraiment le digital. Il y a en effet une texture quand on zoom sur une photo, quelque chose de granuleux, de transparent aussi, sans matière, que je n’aime pas. Bien entendu, quand vous regardez une photographie dans un magazine, vous ne le voyez pas. Photoshop et d’autres programmes sont passés par là et ont retiré le « bruit » et lissé les textures tout en précisant les contours. À moins que la photographie n’ait été prise avec un appareil moyen format auquel cas les grands pixels captent bien la lumière et donnent un rendu bien plus propre.
J’ai toujours été admiratif devant la plastique des matières sur les diapositives. C’est propre, incroyablement propre. Et il faut avouer qu’à de très rares exceptions près, les appareils numériques sont simplement incapables d’atteindre ce rendu.
C’est mon point de vue. C’est ce qui m’a étonné dans la première photo Sigma que j’ai vu. Je dis Sigma, mais je devrais dire, bien entendu, Foveon.
Foveon était une petite société américaine, rachetée depuis par Sigma. Celle-ci avait développé un procédé pour photographier en numérique comme autrefois on le faisait en Argentique, c’est à dire en captant plusieurs couches (rouge, verte, bleue). Car TOUS les appareils numériques captent la lumière en monochrome, et doivent ainsi retraiter la photographie à travers des filtres qui reconstituent les trois couleurs, une technologie très au point, avec quelques inconvénients récurrents, notamment une très grande difficulté à analyser certains motifs, lignes resserrées, prince de Galle des tissus, petits carreaux, etc d’où la nécessité d’un très grand nombre de pixels et l’utilisation d’appareils moyens formats par les professionnels de la mode (le moyen format est un appareil dont le capteur est plus grand que le traditionnel 24×36 dit full frame des anciens appareils argentiques, et comme le capteur est beaucoup plus grand, il capte beaucoup plus d’informations, de lumière et commet ainsi moins d’erreurs lors du retraitement par les filtres et autres processeurs de l’appareil photo. Pour information, un appareil ordinaire, compact, possède un capteur mesurant entre 1/11ème et 1/7ème d’un appareil 24×36, donc vraiment très petit).
Le capteur Foveon est donc le seul capteur captant la lumière directement en couleur, économisant donc beaucoup de post traitement et évitant certaines erreurs d’analyses. Il est précis. Par ailleurs, il est d’une taille assez généreuse, plus de la moitié de 24×36.
Le décompte des pixels est souvent l’objet de polémiques. Comme le capteur est un capteurs trois couches, il capte trois fois plus d’informations. Ainsi, Sigma revendique 15 millions de pixels pour son ancien capteur et 45 millions pour son nouveau capteur. Ce qui n’est pas faux. Mais en même temps, le capteur n’en est pas moins de sa propre taille. C’est à dire, 5 millions de pixels pour l’ancien capteur et 15 millions pour le nouveau. Comme je suis une personne nuancée, je tranche en disant, comme le font certains journalistes honnêtes, qu’il s’agit de 3×5 millions de pixels et 3×15 millions de pixels.
Le résultat est en tout cas très net : un fichier RAW (brut) avec le nouveau capteur de 3×15 mpix pèse environ 50 à 60 Mo quand celui d’un Nikon ou autre Canon de 15 mpix ne pèse « que » 14 à 18 Mo.
Il y a donc beaucoup d’informations dans un fichier FOVEON, et cette abondance est visible. Certains parlent d’un effet 3D, je me contente plus modestement d’y retrouver la texture particulière des diapositives, c’est à dire propre, détaillée, riche, pleine. Avec aussi une très grande flexibilité dans le traitement du fichier RAW.
Cette technologie porte pourtant sa propre limite, et elle n’est pas mince car il semble bien que c’est sur cette limite que Sigma bute depuis des années : le bruit numérique, vous savez, c’est taches de couleur quand vous prenez une photo le soir. Les appareils numériques ont fait d’énormes progrès sur ce point et savent rester relativement propres dans les hautes sensibilités. FOVEON est visiblement une technologie qui trouve là son point faible, même si Sigma est parvenu à force d’actualisation des firmware des appareils à limiter les dégâts. Mon DP1, un appareil compact équipé de FOVEON est simplement incapable de monter au delà de 400 ISO sans bruiter (mais cela étant, très joliment si on passe en noir et blanc), ce qui le limite à une utilisation en extérieure, et encore par temps pas trop couvert. Mon DP2 a été mieux optimisé et monte à 800 ISO, ce qui, avec son objectif relativement rapide de 1:2,8 le rend assez flexible. Mon SD15 monte très bien à 800 ISO depuis la récente mise à jour. On peut aller au delà, mais ce n’est pas très satisfaisant.
Bref, FOVEON est à son optimal à 100 ISO, avec des images à mon avis imbattables. Et il n’y a aucun problème à l’utiliser à 50 ISO, où on retrouve sans difficulté les qualités des diapositives.
Les appareils ont un deuxième inconvénients. L’écriture des fichiers est lente. Si le traitement est correct avec le SD15, mes DP1 et DP2 sont vraiment lents, entre 4 et 5 secondes pour un fichier, et le DP1 est simplement inutilisable pendant l’écriture d’un fichier… Archaïque, n’est-ce pas.
Sigma n’est pas un vrai fabriquant d’appareils photos et doit par conséquents développer ses propres solutions. Les appareils photos sont donc bien moins bien conçus que les appareils des autres fabricants. Mais de façon assez admirable, Sigma améliore l’ergonomie à chaque nouvel appareil. Mon SD15 est ainsi désormais considéré comme le meilleurs appareil développé par Sigma pour son ancien capteur de 3×5 mpix. Relativement rapide, des menus clairs et simples et un firmware ayant résolu un certain nombre de problèmes récurrents.
Reste un dernier point faible de la marque. Sigma est un fabriquant d’optique certes, mais d’optiques relativement bon marché, correctes mais sans plus. Visiblement, la marque a investi dans FOVEON pour améliorer son image ainsi que la qualité des optiques. Car autant le dire, avec un capteur enregistrant plus d’information, on a toutes les chances d’enregistrer tous les défauts de l’optique. Bords flous, distorsion, aberrations chromatiques (les dédoublements rouges et bleus dans les coins), tout est visible.
Assez remarquablement, Sigma est parvenu depuis quelques années à produire des optiques qui rivalisent avec les optiques Canon et parfois même Nikon, à un prix raisonnable. Parmi celles-ci, l’objectif que je viens d’acheter.
Et nous arrivons à mon nouvel achat, donc.
Il y a un peu plus d’un an, Sigma a sorti un nouvel appareil, le SD1, équipé d’un nouveau capteur de 3 fois 15 mpixels. Le prix à fait rire toute la presse, l’Internet et à créé un buzz ridicule autours de la marque. 7000 dollars, sans optique. À ce prix, vous avez les premiers moyens formats Pentax, un excellent Nikon et bien entendu des Leica… Et puis au début de cette année, nous avons eu le décès du fondateur de la marque. Et dans les deux semaines qui ont suivi, la révision du prix de l’appareil autours de 2000 dollars et l’annonce de deux nouveaux compacts équipés de ce nouveau capteur pour remplacer les DP1 et DP2.
Sigma produit donc désormais les DP1 Merril, DP2 Merril et SD1 Merril, Merril étant le nom de l’inventeur de la technologie FOVEON. Sigma y voit, dans ses communiqués de presse, un engagement de qualité et une nouvelle étape.
Le nouveau capteur est un peu plus grand et produit trois fois 15 millions de pixels. Les temps d’écriture de chaque fichier pulvérisent des records de lenteur, parfois près de 15 seconde en utilisation normale et malgré l’utilisation de cartes à grande vitesse.
Comme leurs prédécesseurs, les DP1m sont de très grands angles (pas de zoom), 19mm (34mm en full frame) et ouvrant à 2,8, ils sortiront d’ici peu. Les DP2m, dors et déjà commercialisés, sont eux de simples grand angles de 30mm (48mm full frame) et ouvrant à 2,8. Le SD1 est quand à lui un appareil classique à miroir et objectifs interchangeables, volumineux.
Si l’optique du DP2m est plébiscitée pour sa précision, les optiques sur SD1 révèlent toutes la faiblesse des objectifs de la marque tant le capteur est précis.
Acheter un DP2m a commencé à me démanger très sérieusement. Pouvoir retrouver en 15mpix cette précision que j’aime dans les appareils de 5mpix est un rêve qui a hanté plus d’un depuis des années. Après mûre réflexion, je me suis résolu à ne pas le faire. Et j’ai commencé à regarder du côté des optiques : il viendra bien un moment où le SD1m d’occasion deviendra abordable, ai-je pensé, et en attendant, mon SD15 est devenu un appareil parfait.
Certes, il bruite à 800 ISO, mais il bruite vraiment proprement. Et je ne comprends pas bien l’injustice journalistique à ce sujet. On dit ainsi que les 4/3 bruitent peu, mais c’est oublier la dose de filtres anti-bruit qui permettent ce résultat. Rien de cela dans mon Sigma. Il bruite, mais l’application d’une dose raisonnable en post-traitement donne un résultat bien plus convaincant, avec un grain qui se rapproche des films argentiques. Certes, il ne dispose pas de live view (tout se fait dans le viseur, à l’ancienne), certes, pour obtenir une belle photo il faut y passer beaucoup de temps en post traitement (tiens, exactement comme avec de l’argentique, et comme si avec un Nikon il ne fallait pas y passer du temps non plus)…
Ça me fait penser, je suis vraiment désolé d’être si en retard des fois à poster mes albums photo, et quand je le fais, ne pas recadrer ni vous offrir le meilleurs du FOVEON, mais pour tout dire, c’est vrai que le post traitement est très long. Pas qu’il soit difficile, il y a juste qu’il y a tellement d’information dans le fichier que le type de transformation, tant dans les couleurs, les teintes, les ombres et la lumière sont beaucoup plus étendues. Et puis, pour faire tout ça bien, il faut faire un premier post traitement du fichier RAW dans le logiciel Sigma Photo Pro, exporter en TIFF et finir dans Photoshop ou Sylkpix. Il m’arrive de le faire, pour moi, mais jamais je ne pourrais vous livrer ces dizaines de photos à la fois (mes 9000 et quelques photos sur Flickr).
Bref, malgré tous ces inconvénients, mon SD15 est devenu un compagnon que j’aime, il est un peu gros, lourd, et le post traitement est un exercice pénible parfois. Et pourtant, je vous avoue que quand je regarde les photographies, que je compare avec des photographies prises avec d’autres appareils (ne serait-ce que mon Olympus), il n’y a aucune comparaison. Aucune possible. FOVEON produit de la matière en 3D. Ce n’est pas un effet 3D, c’est de la matière. C’est plein. Je suis tombé il y a deux mois sur des photographies du Nikon 800E qui est la nouvelle coqueluches des geeks à Nikon, oui, 32mpix, avec un capteur full frame, et avec une optique Nikon, bien sûr, que c’est précis, net. Mais en zoomant en full size – ce que je vais dire est très subjectif, n’engage que moi -, eh bien je n’ai trouvé aucune texture. Le photographe avait eu la grande honnêteté de ne pas « nettoyer » à coup de filtres. Eh bien, je les voyais, ces grains, comme sur mon Olympus. C’était pourtant 200 ISO (la nouvelle température de l’industrie, destinée à satisfaire l’appétit des geeks pour toujours plus de hautes sensibilités, 100 000 ISO étant visiblement leur nouvel Eldorado, à croire qu’ils veulent tous juger un appareil sur sa capacité à photographier par une nuit sans lune ni étoile à défaut de quoi l’appareil n’est qu’une merde…). Eh bien non, je n’ai pas trouvé ce truc qui a retenu mon regard la première fois que j’ai vu une photographie faite avec le capteur FOVEON.
Le problème du nouveau capteur, c’est que Sigma continue de se battre avec lui pour parvenir à dompter ses capacités. Vitesse de traitement dans l’appareil, bruits électroniques du capteur. Pas au point tout à fait, un peu comme mon DP1 qui, malgré des qualités me le faisant considérer comme le meilleur appareil que je n’ai jamais possédé, ne sait pas bien gérer les teintes rouges qu’il sursature et tourne au magenta (et qu’il faut reprendre dans Photoshop obligatoirement en luminance, saturation, etc).
Je pourrais critiquer mon SD15 et mon DP1 pendant des heures, mon DP2 aussi (il est, lui, parfait, mais son optique, bien que remarquable, n’atteint pas la perfection de celle du DP1), pour finir par m’extasier devant la capacité à saisir la lumière, à rendre aux objets leurs plastique, leur densité. Et j’avoue que me concernant, je ne demande pas à mon appareil photo d’être exempt de défauts, mais l’extase, ça, oui. Mes trois Sigma sont de modestes 5mpix, c’est à dire seulement approximativement 2550×1780, mais avec autant d’information devant qu’un appareil de 15 mpix. Je n’ai jamais testé, mais j’ai lu qu’on peut aisément imprimer jusqu’en A3.
Alors, j’ai opté pour un des meilleurs objectifs à tout faire, un 17-50, et je vais vendre l’autre, mon Olympus et ses objectifs. J’achetai peut être le 50mm qui ouvre à 1,4. Les photos prises à Kyoto m’on étonné. J’ai retrouvé la précision du DP1 dans mon SD15, et en photographiant à 800 ISO, j’ai constaté les progrès réalisés depuis l’achat. Le SD15 est parfait, sa technologie est dépassée, avec son peu de pixels, mais d’un autre côté, avec un SD1 je devrais également changer d’ordinateur parce que chaque photo pèserait au bas mot 50 à 60Mo, et les jpeg tournent quand même autours de 13 ou 14… Je ne préfère pas imaginer la taille des fichiers tiff.
Mon appareil et le nouvel objectif sont maintenant partis chez Sigma pour calibrage. Je pense aller à Kamakura dimanche, j’emporterai mon DP2. Et en attendant, j’ai une semaine de vacances à Kyôto à développer. Je suis fortement tenté de le faire sans aucun post traitement… Trop long!
Fin de ce billet de Sigma. Totalement Geek, quoi.
De Tôkyô,
Madjid
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