











Je me revois, décidé à aller à Osaka et m’arrêtant au centre commercial (aujourd’hui remplacé par un Yodobashi Camera) près de la gare, y restant plus de trois heures et visitant chaque magasin pour profiter de l’air conditionné, incapable de mettre le nez dehors…
Dernière ligne droite avant mes quelques jours de congés. Une chaleur étouffante s’est véritablement abattue après le passage du typhon 5. On en est au onzième typhon dans le pacifique, cette année, mais celui-là a pris son temps pendant que les autres passaient leur chemin. Il a déversé des trombes d’eau impressionnantes sur l’ouest du pays avant de se heurter aux Alpes japonaises qu’il a finalement contournées par le flanc nord pour retourner en mer, dans la mer du Japon, cette fois, en « caressant » les côtes avant de revenir dans Honshu, dans le Tôhoku, le Nord du pays. Tôkyô a donc été épargnée, la pluie y a été assez brève et peu abondante.
Le proverbe dit qu’« après la pluie le beau temps », et c’est encore plus vrai après le passage d’un typhon qui, sur son passage, nettoie littéralement le ciel. hier, on a donc dépassé les 36 degrés à Tôkyô sous un ciel limpide et bleu le matin, avant qu’il ne se couvre l’après-midi, orageux. Autant dire que cela a été une journée étouffante, très difficile.
C’est l’été, quoi.
Comme chaque année, le début du mois d’août est l’occasion d’aller à des fêtes, les « matsuri ». Hélas, l’un de mes préférés, le Awaodori de Kagurazaka, est tombé pile au jour et à l’heure d’un fantastique orage, je ne m’y suis pas attardé, gageant qu’il serait annulé.
Mais fort heureusement, le temps était beau pour le « Bali matsuri » à Asagaya et, comme chaque année, je suis allé d’abord à Kôenji me promener puis, doucement, je suis allé vers Asagaya où a lieu chaque année le Tanabata, cette fête venue de chine (Qîxî) et célébrant la septième nuit du septième mois (dans l’ancien calendrier lunaire), légende de ces deux amoureux dans le ciel,, Orihime et Hikoboshi, séparés par la Voie Lactée et qui ne se rencontrent qu’une fois par an.
L’artère commerçante de la ville est décorée de couleurs et de personnages divers tandis que des tiges de bambou un peu partout permettent d’accrocher ses voeux que les deux amoureux réaliseront. Pour beaucoup de jeunes qui en profitent pour se promener en kimono de coton, le yukata, c’est un peu comme la Saint-Valentin…
Et après je suis allé à Shimeigu, le sanctuaire de la ville où avait lieu comme chaque année une fête balinaise avec trois heures de danse sur la scène du sanctuaire, habituellement réservée à des cérémonies shintô, sous le ciel de la nuit tombante et au son des cigales. Chaque année, c’est un peu du climat des vacances qui s’installe.
Pour moi, comme toujours, ce sera Kyôto. Je redoute un peu la chaleur, cette année car autant ces dernières années je n’ai jamais vraiment senti de différence entre Tôkyô et Kyôto malgré la réputation de l’ancienne capitale, cette année est particulièrement chaude (mais heureusement, j’ai de la chance, nettement moins chaude que l’année prochaine). Et comme Kyôto est, comme Paris, dans une cuvette, il n’y vente pas beaucoup et quand il y fait très chaud, il y fait VRAIMENT très chaud.
J’en avais eu l’expérience il y a une quinzaine d’années. Un orage avait tourné autours de la ville pendant trois jours et, sous un ciel sombre plombé par les nuages, la température et l’humidité étaient progressivement montées, montées, montées, même la nuit, je n’avais jamais vécu cela. Le moindre mouvement provoquait une transpiration qui ne s’arrêtait pas et, ce qui m’avait le plus frappé, c’était l’absence totale de vent. C’était horrible, fascinant et agréable à la fois, car au delà de cette chaleur étouffante, on sentait à quel point les arbres et les plantes aimaient ce temps, la verdure envahissait tout et quand, après avoir éclaté, l’orage a enfin cédé la place au ciel bleu, les feuillages resplendissaient d’un véritable feu d’artifice de verts dont j’ignorais la richesse et les nuances. Je crois que cet orage a terminé de me faire tomber amoureux de cette ville.
Je me revois, décidé à aller à Osaka et m’arrêtant au centre commercial (aujourd’hui remplacé par un Yodobashi Camera) près de la gare, y restant plus de trois heures et visitant chaque magasin pour profiter de l’air conditionné, incapable de mettre le nez dehors…
C’est l’avant dernier jour au travail avant cette petite semaine de congés, ce n’est pas trop tôt. L’été japonais est, malgré l’air conditionné que je fais tourner en permanence, et à mon grand regret, en permanence, étouffant.
J’écris à mon grand regret car l’air conditionné me brûle les sinus et je suis incapable de dormir sans me vaporiser un médicament dans les narines. Allergie. Et puis je suis parfaitement conscient que l’air conditionné n’est vraiment pas bon pour la nature, ça consomme beaucoup d’énergie. Cela étant, depuis 2011, j’ai appris à ne l’utiliser qu’au minimum (en ce moment, 27, parfois 26) et en utilisant mes connaissances de physique. J’oriente le flux vers le plafond en été, je l’oriente vers le sol en hiver, et j’utilise un (puissant) ventilateur électrique pour faire circuler l’air frais. J’ai divisé ma facture d’électricité par deux (malgré la hausse spectaculaire des tarifs). Si tout le monde faisait ça, ce serait pas mal, mais en réalité, un peu partout les mauvaises habitudes sont revenues. Les magasins sont redevenus de vrais frigos.
Parmi mes étudiants, quelques uns qui partiront en France en septembre pour y suivre des études. C’est la première fois que j’en ai autant, je ne sais pas si cela fait une tendance. Le résultat, c’est que j’ai un emploi du temps très très chargé, et avec la chaleur, cela ne me donne pas trop de temps pour faire beaucoup de choses. Enfin, si, mais c’est plutôt que je ne récupère pas aussi bien que dans les autres saisons.
Le problème, ici, c’est l’humidité plus que la chaleur. Il est impossible de comprendre ces indiens, ces chinois voire même ces japonais qui dorment à même le sol tant qu’on n’a pas vécu cette chaleur. Ce n’est pas qu’une question de pauvreté ou d’oisiveté, il faut vraiment avoir quelque chose à faire et que cela soit urgent, pour s’activer dans une telle chaleur et une telle humidité.
Le premier ministre ici essuie enfin ses premiers scandales, on a quelques séismes depuis quelques semaines, l’ouest du pays a été frappé par de très fortes pluies le mois dernier, ce qui accroit la désolation de cette région qui a eu un très fort tremblement de terre l’an dernier et qui continue de vivre de fortes répliques, Hamasaki Ayumi a grossi de plusieurs kilos et s’oriente de plus en plus visiblement vers une carrière dans le divertissement à la télévision, où il semblerait qu’elle excelle autant qu’à la chanson (c’est dire si elle est nulle), je suis passé récemment dans le quartier Otemachi et de nouveaux immeubles ont encore poussé, maintenant, c’est un immense bloc qui va de la gare (rénovée) de Tôkyô jusqu’au parc du palais impérial, c’est assez élégant et très réussi même si c’est d’une incroyable banalité et que cela ressemble à n’importe quel quartier moderne de n’importe quel pays émergent, tout en hauteur, en façades verre et en centres commerciaux climatisés qui sentent le parfum et parfois le croissant au beurre, ah oui, j’oubliais, le détail mode de cette année.
Bon, ça y est, la mode féminine ici a enfin changé de siècle, ça a été très rapide mais ça a mis le temps. On sent vraiment l’influence de la Corée (même si les femmes ne le diront pas). D’abord, ça y est, le sourcil est épais, et les femmes avec les sourcils fins, « élancés » et trop épilés sont définitivement des ringardes qui avouent leur âge. Ensuite, ça y est, les jeunes mettent du rouge sur les lèvre, du vrai rouge, et elles se dessinent les lèvres en coeur. Enfin, c’est le grand retour de l’eye-liner en plus du mascara. Influence coréenne 100%. L’autre tendance, ce sont celles qui, à part le sourcil redevenu épais, se maquillent « invisible ». Influence occidentale 100%.
C’est incroyable comme l’apparence compte encore, en Asie, comme elle a peut être même toujours bien plus compté qu’en Europe. Je dis ça, je sais cependant que l’apparence compte aussi beaucoup en Europe, et que nous avons juste changé ses références.
Pour les vêtement, là aussi, ça a mis le temps, mais depuis deux mois, c’est très net, et là encore la Corée a précédé. Taille réhaussée (et non taille haute) et très appuyée avec une ceinture, une gros ruban voire un faux corset à lacets mis sur la jupe et la chemise, car là aussi grand changement, on remet la chemise DANS la jupe ou le pantalon.
La jupe, elle, elle est ample et très longue, plissée de chez plissée, unie, ou bien droite, arrivant au dessus du mollet et étroite « structurée », appuyée à la taille, réhaussée, et donc soulignée par une ceinture ou un ruban. On revoit des jeans à taille réhaussée et ample. Le corsage dévoile les épaules. Les cheveux sont ondulés « naturel ».
Voilà à quoi ressemble la « femme de 25-35 ans ». Et n’allez pas croire que ce n’est que la bourgeoise, car aussi bien UNIQLO que GU (le Uniqlo pas cher) ou d’autres magasins proposent ces vêtements.
Bien entendu, tant pour le maquillage que pour les vêtements, ce n’est pas le look dominant, mais on a commencé à voir ce style il y a deux ou trois mois et on en voit de plus en plus, et les publicités en regorgent, ça sera le truc de l’automne. C’est certainement un truc assez frappant quand on vient ici pour la première fois, on « s’habille » encore. Le souci de se conformer au groupe est très fort, ici, et je pense que c’est un truc assez particulier à l’Asie, quelque chose dont les marques se servent et qui explique jusqu’à l’incapacité qu’ont les salariés de quitter le travail de bonne heure…
Au sujet de mode, justement, depuis à peu près un an ou deux, la « modèle » en la matière est une métisse bangali-japonaise, Rola. Elle est très jolie, c’est elle qui fait la publicité-émission que l’on voit dans le métro pour les cosmétiques Kose, et c’est elle également qui « introduit » les nouvelles tendances de la mode pour Uniqlo.
Les japonais ont un mot bizarre, et pour dire assez raciste, au vrai sens du terme, pour dire « métisse ». Ils disent « à moitié », et pour ajouter à cela ils le disent en anglais, « half », ce qui ajoute au caractère étranger de la personne. Cela rappelle les classifications raciales en vogue en Europe au 19ème siècle (ce doit être cela, d’ailleurs) et qui ont connu le succès que l’on sait dans l’Allemagne nazi. Cela me rappelle ce que certains m’avaient dit, dans ma famille française, que j’étais « moitié-moitié »… Toujours est-il que cette mannequin, Rola, est une des figures d’un Japon qui change malgré lui, et malgré l’inexistance des étrangers et des métisses ou des couples mixtes, pourtant de plus en plus nombreux, dans les (ultra-nulles) séries télévisées. Cela ne doit pas être facile pour les enfants, cette incroyable invisibilité du métissage quand en même temps tout, dans la mode, dans les publicités, valorise les critères de beauté occidentaux (un de ces trucs qui me font penser que le Japon est, exactement et peut être même plus que les pays colonisés, du fait, justement, de son développement, une société totalement dysfonctionnelle et « qui ne Marche pas »).
Demain matin, je quitterai Tôkyô pour Kyôto. J’ai hâte à un point, vous ne pouvez pas imaginer…