Point de chute : mystère…

P

Ben dites donc, j’ai envie d’écrire, aujourd’hui…
2 sujets possibles (et pourquoi pas les 2…). Oh, le premier, ça ira vite… Va pour les deux alors.
J’ai été surpris la semaine dernière : l’adresse de mon blog (celui ci) était connue à mon travail… Ca fait bizarre, on se sent un peu épié, après, et puis quelqu’un m’a fait remarquer que quand on écrit, il faut s’attendre à être lu. C’est peut être cela, la gloire. En tout cas, je n’ai plus su écrire par la suite et cela n’a fait qu’accroître cet étrange « silence radio ». J’avais été très frustré finalement lors de la publication de ma pièce de théatre, un peu comme si elle avait été kidnappée par quelqu’un d’autre (un éditeur). Je n’en ai tiré aucune satisfaction. Dans le cas du blog, c’est un peu le contraire, je vais explorer des nouveaux territoires de liberté. Je suis lu. Anonymes et amis, amis et collègues se confondent dans le silence qui m’entoure, et leur anonymat n’a pour seul équivalent que ma propre subjectivité. Vous me lisez, mais je reste seul maître de qui je suis vraiment dans ce blog. Mon amie Frédérique me disait ce week end qu’elle aimait me lire, qu’elle découvrait d’autres visages que celui qu’elle connait. C’est complexe, une personne, et le travail d’écriture d’un blog est l’occasion de se révéler un peu mieux aux autres en cultivant le mystère.
Non, Suppaiku ne passe pas non temps à broyer du noir. Non, il ne passe pas son temps à penser au Japon ni à regarder des doramas. Il ne fréquente pas que des intellectuels droit sortis des classes moyennes urbaines et s’il le fait, c’est qu’éventuellement ce sont ces amis, des rencontres faites au fil de son histoire. Suppaiku aime écrire, et il aime parler de lui. Peut être d’abord à lui-même. J’ai écrit mon journal durant des années, et je suis frustré devant ces cahiers épais à petit carreaux, dont 2 grand format de 2/300 pages, écrits tout petit et sur lesquels certains jours j’écrivais 2, 3, 4 pages et même plus. Si je devenais célèbre, quelle souffrance pour mes biographes, cette masse de pattes de mouches où je passe mon temps à parler de moi, en long, en large et en travers de ma psychothérapie dont ils étaient les contemporains. Mais quelle bonheur de savoir qu’ils sont là, et que ce qui est en moi, ma vie, mon histoire, ont laissé une trace tangible, existante. C’est un peu grace à eux que vous lisez mes longues pages, j’ai gardé cette habitude de me parler à moi même et de me raconter. J’ai juste aussi appris à parler d’autre chose et de confier mes réflexions sur le monde à mon confessional quotidien, ce blog… Je le parcours parfois et je constate à quel point j’ai retrouvé le fil, le goût d’écrire. J’aimerai juste revenir à mon stylo, un peu plus souvent car, croyez moi, si on écrit sur un clavier, on fait vraiment l’amour, avec un stylo. Une étrange lutte car le stylo est un autre palpable, il fait mal, il donne des crampes, on l’attrape, on le vide, on raie… Le stylo est le vrai compagnon de l’écrivain. Je ne pense pas pouvoir écrire vraiment avec une clavier.
Je regrette le temps de mon gros cahier de 300 pages petits carreaux, de ces pattes de mouches qui venaient recouvrir chaque ligne, l’une après l’autre et que je commençais en septembre, et que j’achevais durant l’été suivant, le tout entrecoupé de quelques semaines de silence, comme sur ce blog, journal improbable et fragile. Je revois Pantin, la cuisine, je revois Télégraphe, la cuisine aussi à 6 heure du matin et moi qui écris sans pouvoir m’arrêter. Je revois Asnières, le salon et ma grande table, la chambre et son ordinateur. Une photo de la maison de Goethe apperçue dans un livre sur Weimar, une table comme la mienne, quelques livres, et soudain j’avais pensé que j’avais encore bien du travail, mais que déjà cela ressemblait terriblement à la direction prise…
Serait il temps que j’écrive, alors ? Ce serait amusant, de vous confier ma lutte avec moi-même… Mais je me fais une telle idée du roman… Ne pas parler de soi, surtout ne pas faire un journal, mais donner la vie, donner DE la vie, non pas à un mais à d’autres, des autres, bref aller encore plus loin dans mon observation du monde, se moquer de soi, s’en fiche, jusqu’au trognon, ne pas être snob, bêcheur, con, égoïste et profiter de chaque instant car MA vie aussi, est un roman. Non pas ce journal, essai aléatoire et subjectif de traduction d’un instant T (pourquoi donc faut il que l’instant soit « T », pourquoi pas « I », tiens, oui, l’instant « I », ou « P » pour Présent), mais le fil, le récit… Va bien falloir que je finisse « La recherche… », que je finisse enfin « La mise à mort » (Aragon : ce roman m’étouffe, trop beau, trop parfait… je sais pas, en fait il me faisait mal, comme si ce que j’allais y lire allait anéantir quelques certitudes… je ne comprends pas, je n’ai jamais été stalinien ni n’ai jamais trahi en 1936… pourtant, ce roman… la nappe Vichy, le miroir… mais quelle douleur, quelle douleur… quelle puissance, l’écriture…).
Ah la la… Allez, je continue ce blog, allez y, lisez, lisez… Mais attendez vous à être surpris quand j’écrirai mon premier roman, vous ne m’y retrouverez pas, ou alors laché, entre les lignes, à jouer avec vous et à essayer de vous faire du bien, du mal, je ne sais pas : c’est mon stylo qui me dira, à l’heure où les jetseteux vont se coucher, c’est à dire, à l’orée du jour, quand tout est silence…

Mon deuxième sujet, vous voyez, je n’ai pas perdu mon fil, c’est la detination. Je vais être nommé à Ôsaka ou bien Tôkyô. C’est étonnant. J’ai beau vouloir, désirer, aimer Tôkyô, une petite voix continue de dire au fond de moi « mais Ôsaka, Ôsaka! que vas tu faire à Tôkyô, à part attendre le tremblement de terre, aller dans des saunas, à Shinjuku… A Ôsaka aussi, il y a du sexe, mais il y a aussi Kyôto, il y a Nara, le Kansai, les montagnes et la mer, le curry chez Spicy, tranquille avant une ballade le long de la Kamo, il y a les décibels qui gueulent entre dendentown et Nanba, entre Nanba et Shinsaibashi, à Dotonbori (en tout plusieurs kilomètres de néon, bruit, boutiques…), le calme et puis cet espèce de noeud qui ressemble à rien, Umeda, avec autoroutes, et une couche, deux couches, une bretelle, un carrefour, un pont pour piétons coincé entre plusieurs routes et un tobogan qui descend, des trains, une gare, deux gares allez, on vous en fait trois pour le même prix, Ôsaka, c’est gourmant, on vous en met tappuri (plein), et puis le centre commercial, euh non, les centres commerciaux, et un deux trois, tout ça sous « la gare » d’Umeda, avec une grande roue rouge qui dépasse au dessus, et un de ces mondes…… Je peux pas m’empêcher d’avoir une petite nostalgie pour cet asile de fous appelé Osaka. C’est amical. Bordélique, bruyant, c’est la banlieue tout autours, mais c’est fichtrement souriant. Et puis Kyôto, la nature verdoyante du Kansai tout de suite accessible… Tôkyô, c’est comme Paris. Plongé dedans j’aurai de vastes territoire urbains à explorer. Tôkyô, c’est comme Paris. C’est intime, pas besoin d’aller dans le quartier du voisin, autours de la gare, il y a tout, et il y a toujours quelques rues commerçantes, et puis le calme de ces rues de pavillons, de petits immeuble, vélos, plantes vertes et jardins.
Dans mon fort intérieur je crois n’avoir aucune préférence réelle. Juste un « faible » pour le charme évident de Tôkyô.
Pas d’hésitation quand au départ, donc. Une envie, un besoin de retrouver ce rythme que je connais bien, de m’y glisser et voir ce que ça fait, vivre à ce rythme. Y avoir des voisins, même si ceux ci me regardent bizarrement. Normal, je mets du beurre partout et je ne lave pas la salle de bain, je mets des chaussures dans ma maison et je vole les vélos. Terrible désir de regarder les cerisiers fleurir. Socialement, c’est à dire à un jour fixé d’avance, comme des millions d’autres, entassés dans les quelques mètres carrés disponibles qu’on salopera de nos sacs à déchets. Et puis solitaire, comme cette année la lune de septembre, sur mon vélo. Les cerisiers, en fleur, ça ne se partage pas. Peut être avec un peu d’inspiration, un stylo, une pellicule… Impatience à retrouver la chaleur moite, et qu’importe si on sue, et on sue, et on sue encore.
Tôkyô, Ôsaka. Un faible pour l’une mais beaucoup de tendresse pour l’autre. Encore quelques jours pour être fixé.
Merci de m’avoir lu.
De Paris, Suppaiku

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