Lundi, vers 18h00, de retour de la 日仏会館図書館(la bibliotheque de la Maison Franco-Japonaise). Le style « bobo » japonais, c’etait tres souvent des « ruines » tres soignees. Ici, il y a deux restaurants bars…
J’avais oublie le plaisir que procure la lecture d’un livre d’histoire. Et puis volia que cherchant un livre a lire dans une librairie, je m’arrete sur le livre de C. Frazer sur Marie-Antoinette. Je n’ai jamais specialement aime ces grosses biographies, particulierement celles concernant des femmes, en particulier celles concernant Marie-Antoinette. On tombe vite dans l’eau de rose, dans le roman de gare sur « la pauvre reine » et les « mechants revolutionnaires ». Pourtant, ce qui distingue cet ouvrage, c’est qu’il a inspire le film de Sofia Copola, et que j’ai aime le film, que je l’ai trouve tres subtil et intelligent, pas manicheen.
Pourquoi une biographie ? Pourquoi celle la ? Pour etre franc, et cela m’attriste plus que cela ne me fait honte car cela ne regarde que moi, je ne lisais plus du tout, tout comme d’ailleurs je n’ecrivais plus du tout, ceci etant lie a cela, certainement… Pour moi, ne plus ecrire, ne plus lire, c’est un peu comme une noyade dans un puit sans fond ou je n’ai aucun espoir de trouver quelque fond, ou plutot si, celui que je voudrai bien decider pour me redresser et remonter, enfin. Mais c’est quelque chose qui est en moi depuis longtemps et que je connais, un manque de gout, une perte d’appetit pour la vie. Je suis, de ce cote, bien Japonais… L’hivers a ete de ce point de vue particulierement destructeur. Toutefois, comme je vous l’ai dit, dans ces etats, j’ai l’habitude d’avaler des images et des sons, de me remplir de ce que je peux capter du monde. Il se trouve que j’ai trouve quelques documentaires sur la fin de l’ancien regime. Et voila comment de fil en aiguille, j’ai achete cette biographie. J’ai enchaine avec la premiere partie du dictionnaire de la revolution francaise de Francois Furet et Mona Ozouf (une historienne que j’aime beaucoup), consacree aux evenements. J’ai achete la deuxieme partie, les acteurs, mais me suis decide a faire un petit detours par un rafraichissement de memoire.
J’aime le quartier d’浅草/Asakusa, et c’est toujours un plaisir d’y passer un peu de temps, comme ce dimanche ou, apres une promenade au 明治神宮御苑/parc de Meiji Jingu, nous avons decide d’aller manger des sobas dans un restaurant vers Asakusa. Ici, la grande porte et la 五重塔/padgode a 5 etage du 戦争時/Senso-ji
C’est amusant, lire le manuel universitaire de Joel Cornette, a mon age, au Japon. Tout d’abord parce qu’il fut le professeur qui enseignait en amphi quand je repris mes etudes en 1993, et qu’il fur le bon professeur au bon moment. Un homme passionnant qui partage « son » Louis XIV » et qui donne vie a l’histoire, aux hommes, aux enjeux, et a la pensee, aux representations. Il est un des grands noms du renouveau de l’histoire politique, non plus une histoire politique rythmee par des dates, mais une histoire politique frottee et eclairee par les sciences sociales. Son absolutisme ne fait pas de la grandeur comme celui des vieux livres: il pense la grandeur et il se pense a travers elle, il redevient une construction revelatrice d’enjeux sociaux complexes, et ou tout est bon pour faire triompher cette representation : guerre et force, bien sur, mais egalement peinture, architecture et jusqu’aux recoins des jardins du chateau de Versailles. A cet egard, Louis XIV apparait comme un souverain utilisant au service du pouvoir politique les memes procedes que l’eglise tridentine pour affirmer sa superiorite sur l’eglise « reformee ». J’ai adore les cours de Joel Cornette. Ma deuxieme revelation fut Claude Gauvard, une grande historienne doublee d’un « personnage ». Imaginez cette femme qui n’a rien publie de vraiment passionnant pendant 20 ans, certainement toute occupee a murir des intuitions. Puis, apres avoir soutenue sa these, publiant a n’en plus finir… Elle aussi, une des aventurieres du renouveau de l’histoire politique, qu’elle aborda sous l’angle de la violence et de l’insecurite (entre le 14 et 15eme siecle). On n’y pense pas, mais c’est vrai qu’avant d’etre une realite, peut-etre l’etat etait il d’abord la rencontre d’une ambition (du cote des rois) et d’une demande (de la part des peuples). Et que cette demande a pu croitre au fur et a mesure que s’affirme l’individu, la propriete, le commerce, et que les representations changent… Avec Bernard Guenee et quelques autres, Claude Gauvard a renouvele la lecture des edits royaux replaces non plus du cote de la monarchie, mais dans le contexte d’une societe violente ou les definitions meme de la violence changent, ou la criminalite change de nature et ou les crimes d’honneur, autrefois regardes avec respect, commencent a rencontrer la desapprobation des « bonnes villes » et de leurs « bons citoyens ». Je me reserve un retour a Gauvard pour dans quelques temps…
Ininterressante, la photo… Si ce n’est que c’etait la premiere fois que je voyais ces distributeurs…
Je suis donc de retour dans l’ancien regime, dans un tres rudimentaire manuel, dont je connais les noms, ou le vocabulaire specialise ressurgit et reprend son sens (c’est fou comme on peut se souvenir de tout ce que l’on croyait oublie…). Le manuel de Cornette a cela de bien qu’il eclaire les enjeux plus qu’il n’avance chronologiquement ou thematiquement. Il est une invitation a interroger ce que l’on croit connaitre, a le recouper avec d’autres phenomenes afin de retrouver la dynamique des groupes sociaux, des grands acteurs, des conflits et guerres, des bouleversements des cadres et des representations. Mes longs trajets se peuplent depuis quelques semaines de personnages que j’avais oublies. Et depuis quelques jours, je me souviens du seminaire d’historiographie et de recherche, au dernier etage de la Sorbonne avec Michel Fontenay, Joel Cornette et Françoise Hildersheimer (une chartiste, tres lesbienne).
Le contact avec l’histoire me revivifie. Et tant pis si pour le mement je me contente d’un manuel. C’est un choix delibere pour me rafraîchir la memoire, et ca marche.
Tiens, au fait, timidement, je me remets a etudier le japonais… Il serait temps! Mon niveau stagne, et si je peux avoir une comprehension globale assez bonne, quand il s’agit de parler, mon niveau n’a pas vraiment evolue depuis 1 ou deux ans, malgre une tres grande flency (je peux parler tres vite). C’est peut-etre le premier avantage de ne travailler que l’apres-midi. J’ai pas mal de temps pour m’occuper.
Madjid
PS cher Popol, envoie-moi un email quand tu es a Tokyo!
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