Le Blog de Suppaiku, journal bloggué de Madjid Ben Chikh, à Tokyo.

Beau temps sur Tôkyô… jusqu’à quand ?


(Mitsukoshi, mardi dernier. Nouvelle Collection Azurée Estée Lauder. Une 50 de femmes qui se bousculent pour voir une démonstration, peut être aussi devenir celle qui, sur la scène, sera maquillée. Autant qui attendent pour la prochaine. J’imagine les mots du maquilleur, vantant le caractère « vraiment » hydratant de tel crème, le « naturel » et la « profondeur » de tel fond de teint, et toutes ces femmes au foyer, assemblées, qui commentent de « oui, vraiment », « c’est vrai »… La semaine précedente, dans un décors noir, c’était Dior, et la semaine avant c’était L’Oréal, et la semaine avant c’était Chanel, et toujours les mêmes mots, les mêmes qualités, les mêmes commentaires… Finalement, ce qui nous sépare de l’Union Soviétique, c’est juste l’abondance des marques et la multiplicité des appellations. Pour le reste, l’imagination au niveau 0 et la gestion rendue maîtresse de tout, rien ne nous en sépare : il y a au monde 2 fabriquants de produits de beauté qui se partage plus de 80% du marché. Vous achetez du l’Oréal en achetant du Chanel, du Dior, du Estée Lauder… Le décors, les mannequins et les démonstrateurs seuls changent. Même la parfumerie française qui autrefois était si originale est devenue un produit et la majorité des parfums sont désormais d’origine chimique, comme de vulgaires parfums américains… En France, je ne m’en souciais pas. A Ginza, tout cela saute aux yeux !)
J’ai fait un cauchemard, cette nuit… ! Quelle année terrible, alors… C’est ça, les grands changements dans l’existence. Enfin, va falloir que je bosse plus. C’est chiant financièrement mais cela m’a fait penser à beaucoup de choses importantes qui m’installeront dans le long terme et je suis parvenu à des conclusions très satisfaisantes. J’avais prévu d’en chier jusqu’en juillet, j’en ai à peu près pour un an. Cela étant, mon quotidien à Paris n’aurait guère été plus satisfaisant avec un loyer et les impôts à payer. Donc, je ne me plains pas, et je constate qu’une fois cette « terrible » épreuve » passée, je vivrai ici bien plus confortablement qu’en France. Et finalement, payer mes impôts va m’installer pour longtemps au Japon.
Dans mon rêve, je me retrouvais sur un quai de métro parisien, un quai vide, je voyais les tunnels, les métros passaient. Je ne savais pas pourquoi j’étais là, je ne comprenais pas bien, on m’attendait au travail mais j’étais à Paris, comment faire… ? Je me suis réveillé, il faisait en fait super chaud : ça encourage les rêves de clairvoyance… Je me suis (difficilement) rendormi. Cette fois, je prenais l’avion pour la Corée, je crois, mais une tempête de neige nous arrêtait en chemin. Je ne sais pas pourquoi, je me retrouvais coincé à Paris (l’avion avait fait, finalement demi-tour)… Quand l’avion, enfin, repartait, je protestais pour je ne sais trop quelle raison, et on notait mon nom par dessus celui d’Arielle Dombale (écrit au crayon de papier). Je devais être fichtrement chiant…

大江戸温泉物語, Ôedo Onsen Monogatari, samedi dernier. J’aime bien, mon copain…
Très grand beau temps « à la japonaise » : chaud, un rien humide, nuageux avec des percées de soleil, depuis hier midi. Je devrais profiter d’un beau week end cette semaine.
Samedi soir, Kaikai et moi sommes allés de nouveau au 大江戸温泉物語/Ôedo Onsen Monogatari (le récit des Onsen du Grand Edo). Ambiance vieux Tôkyô/Edo, quartier populaire de distraction, odeurs de nourriture et bien sûr, le bain ! C’est un endroit à visiter sans complexe si vous passez par Tôkyô. Je crois que les touristes y viennent, les étrangers de Tôkyô aussi. On y est arrivé vers 18 heures 30, on y a mangé, bu (enfin, moi tout seul car Kaikai n’est pas très alcool… donc, je me suis contenté d’une bouteille de 500 cl de bière…), on y a refait le parcours dans une petite rivière bourrée de cailloux, ça fait super mal mais, curieusement, ça fait beaucoup de bien après. Et enfin, le bain, ou plutôt les bains de différentes température, 4′ de sauna (on est sorti car kaikai ne pouvait plus rester… il n’aime pas mais il voulait m’accompagner… je le soupsonne d’une certaine jalousie…) et aussi, bien sûr, le bain à l’extérieur, très chaud. On en sort reposé, lui le teint rosé et les cheveux au naturel : en effet, je constate à quel point la « beauté » japonaise est une beauté fabriquée, très proche de la conception française d’ancien régime, finalement (la fameuse conception de Descarte qui veut que la nature, le naturel soient des états sauvages, qu’il convient de maîtriser pour en dévoiler toute l’essence, leur vérité profonde, leur vraie nature. Les Japonais en sont toujours là : chirurgie esthétique, crèmes pour ne pas bronzer du tout, crèmes lissantes pour les cheveux et bien sûr, brûlage au lazer du petit muscle qui leur ferme les yeux dans le but de les agrandir (je le dis et le répète, les Japonais n’ont pas les yeux bridés comme les ainus ou les mongoles, même si bien entendu certains ont les ont). Kaikai ainsi met de la crème pour ne pas bronzer ou en tout cas le moins possible, et il met un gel sur ses cheveux qui en change l’apparence. Au naturel, ses cheveux paraissent moins lisses et plus épais. Plus « Mélanésiens », si vous voyez. Et beaucoup de Japonais ont ces cheveux épais à la limite du crépu. Sacré mélange, que les Japonais…
(il y a une semaine, dans un restaurant Italien. Il porte ma casquette)
Définitivement, sa coupe de cheveux ne lui va pas et je crois que je vais lui suggérer quelques changements. Il a un âge difficile pour un gay, qui plus est un gay Japonais. Il a 28 ans… Je l’ai blagué pour son anniversaire en lui disant qu’il était désormais un « grand » et qu’il aurait bientôt 30 ans. やだ!, qu’il m’a répondu. Il faudra bien qu’il s’y fasse, pourtant. Je lui ai pas dit mais pourtant, ce que j’aime le plus en lui, c’est ce qui dévoile son âge dans son visage. Le côté mignon s’estompe et on voit un visage très calme aux traits fins. Il a une dentition épouvantable comme plus de la moitié des Japonais, il s’efforce de la cacher quand il sourit; je lui tapote la bouche et il sourit alors, et il est très beau, quand il sourit.
Bon, il faut que je parte travailler. Je vous prépare un post pour vous dire mon ras-le-bol du Japon de légende fabriqué par le conservatisme des élites et dont mes élèves me rabattent les oreilles. Le dernier en date, j’explique un truc, l’élève a parfaitement compris mais me dit « c’est normal que je comprenne difficilement, vous êtes occidental et je suis Japonais, nous sommes très différent ». J’ai eu l’espace d’une seconde l’envie de renvoyer cet envahisseur différent de 95% des habitants de la planète Terre sur sa planète d’origine… Alors, je lui ai dit qu’il y a exactement la même chose en japonais et je lui ai donné un exemple. Il été baba mais comme je l’ai beaucoup fait parler, qu’il a un peu souffert mais s’en est bien sorti, il a conclu le cours en me disant qu’il était très content, et il s’est incliné devant son sensei (il avait le visage exténué par plus de 20 mn de quasi-monologue où il s’est très peu trompé, mais un sourire…). Bref, faut pas rentrer dans le lard de frond avec leurs idées chauvines, faut accepter leur point de vue mais rappeler que chez eux aussi, il y a quelque chose qui, en étant différent, est très similaire. J’ai remarqué que exprimé comme cela, ils acceptent : les Japonais en effet, ne rêve que d’une seule chose, c’est enfin appartenir à un grand groupe qui dépasse le Japon, ils sentent bien l’impasse de leur isolement. On peut donc leur dire que leur différence est une différence certes mais comme il y en a dans chaque peuple, mais qu’elle répond chaque fois à une préoccupation qui elle, est universelle… Je vous ferais une première liste de ces légendes japonaises qu’ils cultivent et que le parti au pouvoir a lui même bien cultivé. Vous verrez, si vous vous faites une « certaine idée du Japon » sans le connaître, certains de vos rêves partir en fumée.
Mais cette réalité du pays ne le rend que plus proche et, finalement, plus attachant, plus « universel ». Et elle m’aide à mieux comprendre ce que, dans la France, j’aime et je n’aime pas.
A plus tard, donc,
De Tôkyô,
Pressé,
Suppaiku

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Commentaires

2 réponses à “Beau temps sur Tôkyô… jusqu’à quand ?”

  1. franchement, je ne connaissais rien du japon avnt une certaine rencontre…donc pas d’idées préconcues et même mon frangin qui étéait fan de jeux video quand il était plus jeune était assez au fait avec certaines us et coutumes, notament dans le monde du trvail…une fois, j’ai regardé une photo de son magasine de consoles et voyant la touche des concepteurs avec les cheveux long et le style un peu metalleu, je me suis dit qu’ils avaient l’air d’avoir une petite vie sympa mais mon frangin m’a sorti « t’y fies pas, il se balladent en chaussons sur leur lieu de travail mais ce sont des acharnés de boulot » pour lui, pas d’autres séjour que touristique n’y est envisageable! ^^

    A propos des gays, plus difficile a vivre qu’en france où c’est a peu près pareil?
    avec ma copine, on a accueilli ses amis qui ont passé desvaccances a parsi…;dans le bus un couple gay s’embrassait, mais sans se « montrer » non plus, perso j’avais rien remarqué mais j’ai vu les autres heberlués , ils ont dit « culture francaise » …pas choqués mais « interppellés » parcequ’ils ne voient pas çà dans la rue au japon….
    pourtant ils habitent tokyo alors je me dis que dans une capitale…
    enfin je ne sais pas…

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