(écrit jeudi mais mis en ligne vendredi)
Chassez le naturel… Réveillé fort tard, ce matin, vers 9 heures, mais aussi pour la première fois depuis des semaines, une nuit complète de sommeil sans me réveiller dans la nuit, enfin si, juste une fois, vers trois ou quatre heures, et sans cette impression d’être frigorifié par la climatisation. Dehors, ce n’est plus de la chaleur, mais une étuve. La nuit, l’humidité atteint des sommets car nous avons un typhon qui longe la partie ouest du Japon en nous renvoyant son humidité ainsi que des pluies sporadiques, de très courtes averses, maintenant, avec la chaleur, une humidité qui étouffe littéralement dès que l’on met un nez dehors, et qui est juste insupportable dans nos maisons pas du tout étudiées pour ça. Les Japonais ont adopté la maison à l’européenne, fermée, où l’air circule peu, et c’est une bêtise sans nom, absurde. L’ancienne maison japonaise était ouverte de partout, l’air pouvait, au moins, y circuler et atténuer la sensation de fournaise. On est véritablement obligé d’utiliser l’air conditionné, ici. Je me contente du « déshumidificateur » de ma climatisation, ça consomme nettement moins d’énergie, mais ça n’enlève pas cette sensation de « frigo ». Toutefois, la nuit dernière, c’était visiblement la bonne formule car j’ai finalement bien dormi et je n’ai pas de courbatures ce matin, preuve que je ne me suis pas trop retourné durant la nuit.
Et donc, si ce matin je n’ai pas de sensation de grosse fatigue au réveil, je le doit à un sommeil profond qui m’a conduit à n’ouvrir les yeux qu’à 9 heures passées après m’être couché vers une heure, ce qui est un peu tard, je le reconnais.
J’écris ce journal même si je n’ai rien à y écrire, c’est bien. Bon, je ne suis pas très sûr pour vous car vous devez subir une prose d’une incroyable platitude, des histoires de sommeil et de climatisation qui n’ont absolument rien d’intéressant, un interminable monologue. Mais de mon côté, c’est un geste salvateur, mon travail, pour tout vous dire. Un travail et pour être plus exact, c’est ce qui me permettra de quitter le Japon et rentrer en France par la très grande porte. Si si.
Je continue à manger très sainement, hier soir, ça a été une omelette aux champignons de Paris, avec plein de champignons, et j’ai pu constater que pour le moelleux, le lait de soja marche aussi bien que le lait de vache. Une grande salade verte, et une salade composée, je me suis régalé, mais j’ai au bout d’une heure constaté que je suis toujours en sevrage de sucre. J’ai eu une énorme envie de sucré. Pas que je me gavais de sucre avant, mais depuis un an, j’avais pris l’habitude de manger du pain, le soir, de grignoter quelques dattes et quelques figues et parfois manger les gâteaux et chocolats que mes étudiants m’offrent en abondance. J’ai une boite de biscuits sablés normands qu’on m’a donnée, j’ai des Yokan (une sorte de gelée à la pâte de haricots rouge sucrés), tout plein, que d’autres m’ont offertes, je n’ai pas besoin de vous faire de longues explications, leur présence s’est faite insistante tout au long de la soirée. C’est ça, le sucre, et le pire est qu’une fois qu’on a dévoré du sucré (et j’écris bien dévoré car ici il ne s’agit de rien d’autre), il ne reste que de la culpabilité et aucune satisfaction. Alors, je ne craque pas. À la place, j’ai pris une douche bien longue, j’ai fait ma vaisselle et bu beaucoup d’eau gazeuse.
J’ai continué à travailler sur (tabou), j’ai relu d’anciens passages et j’ai compris ce qui ne me plaisait pas. J’ai aussi continué à travailler sur Pierre. J’ai relu mon billet d’hier et j’ai constaté en me lisant que quelque chose étaient en train de changer dans mon écriture, oh, n’allez pas chercher cela dans mon billet d’aujourd’hui, je l’écris sous la contrainte avec un pistolet sous la tempe, écris, j’te dis, mais ici et là dans des billets récents, j’ai perçu un changement, pour le mieux, quelque chose de plus fluide, de plus libéré, moins contraint, de plus personnel et de plus intime, non pas dans le contenu mais dans l’écriture elle-même, une sorte de liaison directe avec ma pensée, ce que je fais d’ailleurs en ce moment, mais comme je suis ici en mode bavardage, j’imagine que pour vous ce doit être absolument insupportable, he he he
Oui, donc, en me relisant, et en écoutant je ne sais plus trop quel programme, j’ai pensé que je ne lisais pas assez, et pas de façon assez variée, et que cela aussi devrait être un de mes nouveaux chantiers, lire plus, beaucoup plus, et m’y contraindre avec la même force que je me contrains à ne pas manger de sucre même et surtout si je donnerais tout pour un carré (qui deviendrait vite tablette) de chocolat, et avec la même détermination que je me force à écrire un billet par jour pour me rappeler à mon obligation personnelle d’écrire pour ne pas oublier de travailler. Oh la la, je ne vous explique pas comment cette phrase à été compliquée à écrire, je l’ai lue, relue, cette histoire d’écriture et de chocolat ne sortait pas du tout de cette façon au départ et je m’y suis noyé allègrement, ce qui prouve que j’écris bien un pistolet pointé sur la tempe, écris, je te dis, allez, écris!
Cet après-midi, c’est jeudi. Je hais les jeudis. C’est une journée longue, contraignante, c’est mon milieu de semaine, c’est le jour où je prends le plus conscience du caractère répétitifs de mes semaines, du caractère absurde de ce que je fais. Chaque semaine est more or less of the same stuff.
J’ai finalement pris rendez-vous chez un ophtalmologiste. Cela fait des années que je n’en ai pas vu un. Des dizaines d’années. Je dois porter des lunettes à cause de ma presbytie mais je les fais faire directement dans la boutique où j’achète les lunettes. Cette année, je veux de vraies lunettes, je veux avoir les yeux véritablement examinés, et je compte me faire faire deux paires, une pour la maison avec le filtre lumière bleue parce que je les utiliserai principalement face à mon ordinateur, et l’autre paire avec variation pour qu’elles filtrent un peu si je lis au soleil. Une monture pas chère et une monture qui me plaît.
C’est important, quand on lit, quand on écrit, d’avoir des lunettes parfaitement ajustées et le fait que je me sois contenté de lunettes sans aller voir un ophtalmologiste, bien que les yeux aient été vérifiés, montre bien le peu de considération que j’ai pu accorder à ce qui est un de mes outils essentiels. Voilà qui sera réparé.
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