Léger, vivant : au Japon


Dans ce Temple, le Zôjô-ji, il y a tous mes amis les gentils Bouddhas et les Boddhisatvas. Si le Batiment principal, siège de la Jôdo-shû (Voie de la Terre Pure) est dédié à Amida (le Bouddha qui sauve les hommes en leur permettant de re-naître dans la Terre Pure de l’ouest où ils recevront les enseignement du Bouddha loin de notre monde troublé), il y a une petit temple dédié à Kan’on et où l’on trouve également Jizô, deux Boddhisatvas vénérés au Japon. Kan’on, avec ses 12 têtes, effraie les démons et, à l’aide de ses mille bras, vient en aide aux humains tandis que Jizô s’occupe des âmes des enfants morts. Quelle gentillesse…

Je commence à me demander si finalement les difficulutés que l’on traverse ne sont pas les actes fondateurs des nouveaux bonheurs à venir. J’ai traversé de 1990 à 1992 une très profonde dépression nerveuse qui m’a conduit très près du suicide. La période qui a suivi a été l’époque d’une lente reconstruction, j’avais 27/28 ans et c’est incroyable les souvenirs que j’en garde. J’ai revu Smoking, de Resnais, un film de cette époque, et c’est incroyable le sentiment de sérénité qui m’y rattache… Je n’ai jamais autant dévoré de livres, jamais autant couru les expositions, dessiné et créé qu’à cette époque et c’est de cette énergie nouvelle que j’ai trouvé la force de retourner à l’université, de vivre Spont’ex et me rebâtir. Je suis re-né, cette période est ma re-génèse.
Ce qui arrive en ce moment, cette période d’incertitude, n’a bien entendu rien à voir. Il ne s’agit pas de renaître. Il s’agit d’être adulte bref, de faire en sorte que tout n’ait pas été vain. Ce qui caractérisait ma personnalité dépressive il y a longtemps, c’était ma très grande instabilité, mon impossibilité à me donner le temps, à m’y glisser, à l’utiliser, à en être un acteur. J’ai fait montre depuis d’une belle constance, d’une belle persévérance et d’une très grande stabilité.
Il est temps désormais de rentrer dans le mouvement, d’accepter l’instabilité qui m’entoure et d’y puiser l’énergie pour approfondir mon sillon. Depuis que je suis au Japon, j’ai progressivement retrouvé des pan entiers de mon existence mais compris que tout ce qui semble à première vue épars, décousu ne forme rien moins qu’un être original, singulier, unique et aimable, aimant. Moi.
J’ai certainement longtemps buté sur une fausse contradiction : mes parents me disaient toujours que « je choisirai quand je serai grand ». Pourquoi doit-on choisir entre Algérie et France ? Entre Islam et Christianisme ? Entre son père et sa mère ? Et de la entre le rock et le baroque, entre le 18ème siècle et le socialisme ? J’ai passé près de trente ans à courir de ci de là à la recherche d’autre chose parce que je ne voulais pas pas choisir. Ces choix sont, et ce sera ma conclusion, des choix de crétins ! Je suis un curieux, un touche à tout, un honnète homme. Rien ne m’étonne ni ne me choque mais j’aime la griserie d’être surpris. J’écoute en ce moment une chanson de Idir. Je vis au Japon.
Choisir, ce n’est pas se couper le bras droit pour mieux se servir du bras gauche. Pour moi, c’est utilser mes deux bras pour faire des choses nouvelles qui me ressemblent et que je pourrai partager avec les autres. Ce blog, par exemple.
Choisir, c’est décider de quitter le travail parce que ce n’était pas possible de continuer comme ça. Choisir, c’est penser que je vaux bien mieux que ça. Justement parce que j’ai deux bras et que je n’ai pas renoncé à l’un pour mieux utiliser l’autre. Combien de gens, mariés, sacrifient leurs amis à leur nouvelle vie conjugale et se retrouvent un jour, seuls, démunis quand vient le temps de la vieillesse ou du divorce ? Être marié doit il sonner l’heure de la fin de l’amitié ? Quel choix curieux, crétin… Et pour d’autres, le travail, fini les soirées entre amis, les concerts de rocks tant aimés, la curiosité de la jeunesse qui vous conduit à découvrir toujours de nouveaux groupes, il faut être sérieux, et puis un jour, quarante ans, qu’est-ce que j’ai fait de ma vie…
Les enfants rêvent d’être adultes parce qu’ils imaginent pouvoir faire plein de choses. Les adultes regrettent leur jeunesse car ils pouvaient faire plein de choses. Comme c’est crétin.

Zôjô-ji, dans le bâtiment principal. Un silence impressionnant dans cette grande salle sobre, moderne, sombre. Le Bouddha Amida trône au fond, dominant un planché de bois verni où toute la structure se reflète. Deux hommes récitent l’invocation au Sauveur Amida, na-mu-a-mi-da-but-(su) et d’autres Sûtras… Une odeurs d’encens. Je suis resté une demi heure, juste le temps de me retrouver un peu.

Je ne regrette pas ma jeunesse du tout ! Je la retrouve de temps en temps au hazard d’une vidéo sur YouTube, une époque revient et je me trouve énormément de sympathie pour moi, pour mes amis de l’époque, ceux la même qui me suivent aujourd’hui encore. Comme je suis heureux de ne pas avoir choisi… Je ne renie pas ma jeunesse, elle continue en moi aujourd’hui : je vis au Japon, et le Japon fut la dernière conversation que j’eu avec mon père il y a 17 ans…
Je suis assez fort pour traverser cette nouvelle époque de ma vie et trouver toute ma place au Japon.
Je vous ai fait un nouveau podcast.
Le voici. Bonne vision.


Commentaires

2 réponses à “Léger, vivant : au Japon”

  1. Cher ex collègue,je regarde ce petit film et me retrouve à Tokyo quelques instants grace à toi.Je suis rentré il y a un mois à Paris.J’ai travaillé un jour à ginza(la séance Masha,avec le gynéco …
    beaucoup de souffrance,passée et à venir dans cette »corporation ».
    Porte toi bien …
    Pascal

  2. Cher ex collègue,je regarde ce petit film et me retrouve à Tokyo quelques instants grace à toi.Je suis rentré il y a un mois à Paris.J’ai travaillé un jour à ginza(la séance Masha,avec le gynéco …
    beaucoup de souffrance,passée et à venir dans cette »corporation ».
    Porte toi bien …
    Pascal

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