Meditations variees

Eh oui, il fallait s’ attendre… avec le temps, on se fait a tout, meme au calme ronronnant d’une petite ville de province comme Kyoto… Je vous livre en bloc les deux derniers mails envoyes a quelques amis…
Ainsi le 16 novembre,
« Retour a mes vacances. Et j’aime de nouveau Kyoto, son rythme lent et sa multitude de surprises, toujours plus belles. Et a ma grande surprise je me dis que je pourrais meme y vivre. Cet apres midi promenade dans un sanctuaire a flan de montagne et entoure de foret. Hier achats de CD catastrophiques chez book off (occas’ a des prix giga bas). Vie quotidienne, quoi. Et comme un debut de blues a l’idee de quitter Kyoto. Et excitation a l’idee d’un long voyage a venir, a celle de retrouver Paris, a tout ce qui m’attend: j’adore ma vie. Il n’y manque qu’une seule chose et je sais enfin de quoi il s’agit. A la tv un super Godzila. »
Et puis celui la tout a l’heure,
« Je ne vais pas quitter Kyoto. Je vais m’en arracher. C’est vrai, en soi pourquoi devrais-je partir? Ici le quotidien est d’une douceur tres rare. Si j’y bossais j’aurai cette douceur en plus… Mais bon la vie est ainsi faite. Attendez vous a me voir courir les jardins cet hivers, meme et surtout sous la pluie. Le temps de retrouver la melancolie melee de tristesse que je ressens, la, juste a cet instant, dans ce jardin qui semble pret a s’abandonner a la desolation de l’hiver. Lui si rayonnant il y a un mois encore, et aujourd’hui en proie a l’engourdissement qui gagne progressivement la nature. Il y a encre beaucoup de vert, mais certains arbres virent au jaune, d’autres sont rouges. Enfin il y a ceux qui n’ont plus de feuilles. Il fait frais. Il fait nuages. Pourquoi vais-je etre prive du spectacle de sa renaissance? Et je regarde de nouveau ces touristes qui filent au pas de course et je ne comprend toujours pas. Sanctuaire Heyan Jingu. Deja mercredi apres midi… Un vacancier ne doit jamais retourner sur ses pas a moins d’etre pret a affronter le spectacle du temps. Je revois ce voyage et comme tout me semble loin… Ici c’est shichi-go-san,7(filles)-5(garcons)-3(filles), la fete des enfants de ces ages la. On croise des familles encadrant un enfant en kimono. Devant moi l’une d’elle dont le garcon, tres locasse, a donne a manger aux koi (carpes), toujours voraces mais vraiment tres beaux (rouges et blancs, parfois jaunes, tacetes de noir…). Bon, je reprends ma route. »
Non, je n’ai pas le cafard, rassurez vous. Je suis meme assez content de rentrer, revoir mes amis, revoir Paris, mon quartier, que j’aime bien en hivers… avoir un nouveau travail… Preparer mon prochain sejour, revoir mon ami Shogo… Non, ce n’est pas ce que je retrouve qui me gene, c’est ce que je quitte. Une langue, des lieus, et un quotidien qui me plait bien et ou il ne manquerait qu’un travail pour etre un vrai quotidien. Enfin, mon humeur s’accorde bien a la saison et je vais retrouver Paris pret a affronter l’hiver : ici, il arrive tres rapidement, il fait de plus en plus froid, les feuilles tombent d’autres rougissent, et puis les looks ont change presque subitement. Ce n’est plus tout a fait le meme pays, la meme ville… Ici, tout s’accorde a la saison, quelque chose qu’helas nous avons oublie par chez nous.
Je vous envie car vous allez gouter le Beaujolais. Veinards.
Sanctuaire de Takano hier, un petit coucou au maitre des lieux, un Cerf, et puis bien sur Kitsune le renard, freles batiments de bois si petits qu’ils semblent batis pour des enfants. Comment photographier le son de tous ces oiseaux qui chantent et dont la voix n’est couverte que par le vent qui traverse le feuillage d’une multitude d’arbres d’essences et de teintes differentes… Quelle jolie foret. On arpente les chemins et, tout en haut, des clairieres amenagees pour contempler « Daimonji », 大文字, ce grand DAI 大 qui s’illumine en ete et qu’il faudra bien que je vois un jour. Le versant de cette montagne est couvert de teintes variees, jaune, vert et debut du rouge des erables… Quelle region. Belle promenade. Et puis aujourd’hui, retour a Heian Jingu sous les teintes tristes d’un hivers qui nous rattrappe… Et retour sur moi, sur ma vie, sur ce voyage, sur ces quarante quatre jours… Le Christ a eu bien raison de s’eloigner 40 jours. Malgre la lassitude, malgre les tentations de la ville avec son bruit, ses magasins, ses bars, c’est au calme que je suis revenu. Je suis parvenu a departager le temps, celui du futile, de l’illusoire, qu’il sera bien temps de retrouver a Paris, et celui du repos, de la quete de sens et de soi, que je suis parvenu a preserver. Franchement, je me sens bien, avec ma tristesse pour moi et le sentiment d’avoir vu des choses rares en leur donnant tout leur temps. Apres, bien, il y aura Paris, le monde et le bruit qui passe, bien sur. Et les cuites ici, les soirees la, leurs indigestions. Mais quelque part aussi un quelque chose inebranlable, une couleur verte qui ne s’eteind pas, illuminee par un soleil tetu, et que rien, ni les jishin, ni les taifu, ni les tunami, ni meme 2 bombes atomiques ne sont parvenus a ebranler. Car le soleil finit toujours par se lever au Pays d’Amaterasu et de Kitune…
On voit ca aussi, au Japon. La force de la vie qui continue, avec le sourire, meme s’il n’est que de facade, parfois. Le vrai sourire merite un peu plus d’intimite, on l’entre appercoit des fois, et il rechauffe le coeur. On voit cela aussi, au Japon.
Alors, rentrer a Paris ne me fais pas peur… ce n’est que pour mieux rentrer chez moi, c’est a dire, ici.
A plus tard…


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