Les incertitudes de la social-démocratie, par Thomas Ferenczi

Article paru dans Le Monde, daté 11 mai 2007

Un article qui pose bien la problématique.

« Si la gauche se porte mal en France, elle n’est pas non plus très vaillante dans le reste de l’Europe. Il y a un an, elle semblait portée par des vents favorables. Ceux-ci ont aujourd’hui tourné. La défaite de Ségolène Royal, le 6 mai, n’illustre pas seulement l’échec des socialistes français, elle correspond aussi à un recul de la social-démocratie dans de nombreux Etats de l’Union européenne. Le succès d’Angela Merkel en Allemagne, en septembre 2005, a annoncé cette évolution, même si la nouvelle chancelière ne l’a emporté que de justesse et si les deux principaux partis ont choisi de travailler ensemble au sein d’une grande coalition.

La « droitisation » de l’Europe s’est exprimée de la manière la plus symbolique en Suède quand la social-démocratie, en septembre 2006, a été battue par les « nouveaux conservateurs » de Fredrik Reinfeldt, au nom du renouvellement du vieux modèle scandinave, longtemps considéré comme un exemple en Europe. Comme Nicolas Sarkozy en France, le chef de la droite suédoise a plaidé pour la revalorisation du travail, dénoncé l’assistanat, promis plus d’emplois. Une fois élu, il s’en est pris aux jeunes chômeurs qui refusent les offres proposées par les agences spécialisées.

Deux autres pays nordiques sont également gouvernés par la droite. En Finlande, les centristes au pouvoir ont rompu leur alliance avec les sociaux-démocrates, après les élections de mars 2007, pour s’unir aux conservateurs. Au Danemark, le libéral Anders Fogh Rasmussen a éliminé en novembre 2001 son homonyme socialiste, Poul Nyrup Rasmussen, en durcissant le ton à l’égard des étrangers, comme l’a fait Nicolas Sarkozy, pour attirer les électeurs de l’extrême droite. Il a été reconduit en février 2005 alors que les sociaux-démocrates ont encore perdu des voix.

La social-démocratie a subi un important revers aux Pays-Bas en novembre 2006 avant d’accepter d’entrer dans le gouvernement de coalition dirigé par le chrétien démocrate Jan Peter Balkenende. Elle a été écartée du pouvoir en République tchèque après sa défaite de juin 2006. En Pologne, elle est hors jeu. Il y a certes des exceptions en Europe : la gauche gouverne en Espagne, en Italie, au Portugal, en Hongrie mais aussi, depuis janvier, en Autriche, au prix d’une coalition avec les démocrates chrétiens. Chaque Etat a ses particularismes, liés à son histoire nationale, à sa culture politique, à ses choix idéologiques. Mais la crise touche presque tous les partis socialistes.

Dans la plupart des pays européens, la demande d’ordre et d’autorité provoquée par les bouleversements du monde favorise la droite. Le modèle social-démocrate n’y répond en effet qu’imparfaitement. Ses bases sont désormais fragilisées. Traditionnellement il reposait sur deux piliers : un compromis entre le capital et le travail, un accord entre la classe ouvrière et les classes moyennes. Or la mondialisation a mis le premier en péril tandis que la montée des inégalités a rendu le second plus aléatoire. C’est cette difficulté que doivent résoudre les sociaux-démocrates s’ils veulent reconquérir le soutien de l’opinion. Une partie d’entre eux a déjà beaucoup avancé dans leur travail de rénovation, d’autres, comme les Français, n’en sont qu’au tout début.« 

Thomas Ferenczi

Un article intéressant dont je tire 2 conclusions :
– La défaite française n’est pas isolée, il ne s’agit donc pas seulement d’un « logiciel » qu’il faudrait « réactualiser »;
– Les alliances au centre ne sont pas des voies nouvelles mais s’apparentent généralement plutôt à des voies de survies, certainement empruntées par l’existance de mode de scrutins qui les permettent (proportionnelle).
Je partage ce tableau, assez sombre finalement.
Mais également encourageant : la crise de la Social-Démocratie est une crise de sens. Elle accompagne une « crise de civilisation » plus profonde, celle ouverte par les possibilités infinies de l’économie de marché alliée à l’économie de désir suscitée par nos sociétés de consommation avides de profit (pour les uns), et d’affirmation de soi (pour les autres).
Repenser la Social-Démocratie aujourd’hui n’échappera pas à une retour à ses sources : une réflexion sur la liberté et sur le pouvoir bref, sur la Démocratie. Ce qui un temps était donné comme des moyens (résoudre les problèmes vitaux) s’est mu peu à peu en horizon indépassable (la « défense du modèle de protection sociale »).
L’Europe offre un champs d’expérimentation idéal à une nouvelle conquète de la démocratie. L’avenir de la Social-Démocratie passe par une inversion du paradigne actuel (de la nation vers l’Europe) à un nouveau paradigme (d’une nation fédérée Européenne vers les états qui la compose).


Commentaires

6 réponses à “Les incertitudes de la social-démocratie, par Thomas Ferenczi”

  1. Moi, je vois la situation plutôt comme ça :

    — Dans les grandes lignes la gauche fonctionne (ou dysfonctionne) de la même manière dans tous les pays industrialisés. Pour des raisons sociologiques : les militants s'inscrivent dans un certain profil culturel et économique, ils partagent les mêmes représentations et font les même erreurs. La droite aussi est homogène et pour le coup Sarkozy a complètement effacé les différences apparentes entre la droite française (soi-disant gaulliste) et la droite étrangère, en particulier anglo-saxonne. Par là dessus, la mécanique propre au fonctionnement des partis (ou de n'importe quelle sorte de hiérarchie) amène aux postes de direction des gens qui combinent charisme, ambition et surtout entregent — tous traits sans rapport avec l'intérêt de leur parti, et encore moins de leur base électorale. De ce point de vue, les défaites des sociaux-démocrates montrent qu'il faudrait plutôt « réactualiser le logiciel » partout. Mais je ne vois pas pourquoi une telle chose arriverait.

    — Au train où vont les choses on s'achemine vers une situation explicitement à l'américaine, c'est à dire avec des partis de gouvernement qui se différencient par leur degrès de libéralité en matière de droits civils et par une politique sociale plus ou moins de l'ordre de la charité. Mais sur le plan de l'organisation économique — et donc de la démocratie réelle — ils seront également conservateurs. On y est pratiquement déjà, sans doute depuis le milieu des années 1980.

    — Ce qui est cocasse, c'est que Sarkozy a gagné en tenant un discours qui, pour incohérent qu'il soit quant au fond, est un modèle de réthorique politique. Suivant l'exemple de la droite américaine, il a tracé verbalement une frontière entre « nous », les vrais gens, et « on », l'ennemi à combattre. ÇA c'est l'essence même de la politique ! Définir pour qui on roule et contre qui on se bât — même si c'est en des termes sans rapport avec une quelconque réalité sociale. Et puis il a promis du changement. Il y a des gens qui ont voté pour cela, la promesse d'un changement, n'importe lequel, malgré l'arrivisme évident du candidat de l'UMP et le passif de son parti. Pendant ce temps les sociaux-démocrates tiennent un discours mesuré, ménagent tous les groupes sociaux possibles et imaginables, et promettent une sage continuité agrémentée de quelques menus réglages techniques du système. C'est peut-être une politique plus raisonnable, mais ce n'est pas ça, cette non-vision sans idéal, qui peut faire vibrer un électeur. Même de gauche. Je suis désolé de le dire, mais l'idée d'une démocratie fondée sur l'intelligence de tous est une vaste connerie. Expliquer honnêtement les subtils effets de telle nouvelle taxe ou de tel amendement institutionnel n'a aucune chance d'éveiller l'intérêt de le plupart de nos concitoyens. Ce n'est pas mépriser les gens que de reconnaitre qu'ils n'ont pas en général le bagage intellectuel et culturel qui leur permettrait de saisir la politique à son échelle technique, bien au contraire. J'aimerais que les classes moyennes instruites acceptent l'idée qu'elles ne sont pas le modèle représentatif de la population dans son ensemble. On a beau être issu d'une famille de la classe laborieuse et n'être soi-même qu'un travailleur sans patrimoine significatif, il n'empêche que l'accés aux études supérieures et à la culture suffit à nous placer hors du prolétariat. Dès qu'on sort de son milieu pour discuter politique avec des gens qui n'ont pas du tout le même vécu culturel, on se prend en pleine figure le fossé des représentations et des modes de raisonnement, voire du simple usage de la langue (comparons simplement « garantir le pouvoir d'achat » et « gagner plus »). Les sociaux-démocrates sont prudents, timorés même, ils ont des idées compliquées sur tout et le culot de rien — en tout cas, c'est l'air qu'ils se donnent sans s'en rendre compte. C'est bien gentil d'expliquer que les gouvernements socialistes font plus de croissance, ce qui devrait créer le plein d'emploi un jour si les dinosaures ne sont pas revenus d'ici là, mais quand on est dans la mouise (avec ou sans emploi), qu'est-ce qu'on en a à foutre ? Idem du SMIC à 1500 euros : quand on ne gagne même pas le SMIC, et tout aussi bien quand on gagne un peu plus que le SMIC, est-ce parlant ? À côté de cela, n'importe quel discours vigoureux parait attirant. Surtout s'il est facile à comprendre. Pendant que la gauche de gouvernement s'excuse de demander pardon et fait sincèrement allégeance aux fumeuses « réalités économiques », la droite produit ces « réalités », un vaste retour en arrière qu'elle fait passer avec succès pour la modernité. Non seulement les sociaux-démocrates perdent la bataille des idées, mais il ne la mènent même pas. En tout cas pas en des termes accessibles au plus grand nombre, ce qui dans des institutions basées sur le suffrage universel revient exactement au même.

    — Sur l'Europe fédérale, le truc qui ferait des Européens une super-nation représentée par un exécutif démocratique, la première puissance économique du monde (en PIB) et un géant politique, ça n'intéresse à peu près personne. Les classes dominantes, politiciens compris, sont très contents de l'Europe-marché, une superstructure technocratique qui met la politique économique à distance des électeurs tout en préservant les sinécures nationales. Quant aux populations, certes elles se sont largement faites à l'idée d'une Europe symbolique et économique, mais de là à réclamer une Europe proprement politique reléguant nécessairement l'identité nationale au même plan que celle des régions et des départements, il y a un chemin que je n'imagine pas nous voir parcourir de mon vivant. Cela dit, d'ici à mon centième anniversaire, j'ai le temps de devenir plus optimiste.

  2. Moi, je vois la situation plutôt comme ça :

    — Dans les grandes lignes la gauche fonctionne (ou dysfonctionne) de la même manière dans tous les pays industrialisés. Pour des raisons sociologiques : les militants s'inscrivent dans un certain profil culturel et économique, ils partagent les mêmes représentations et font les même erreurs. La droite aussi est homogène et pour le coup Sarkozy a complètement effacé les différences apparentes entre la droite française (soi-disant gaulliste) et la droite étrangère, en particulier anglo-saxonne. Par là dessus, la mécanique propre au fonctionnement des partis (ou de n'importe quelle sorte de hiérarchie) amène aux postes de direction des gens qui combinent charisme, ambition et surtout entregent — tous traits sans rapport avec l'intérêt de leur parti, et encore moins de leur base électorale. De ce point de vue, les défaites des sociaux-démocrates montrent qu'il faudrait plutôt « réactualiser le logiciel » partout. Mais je ne vois pas pourquoi une telle chose arriverait.

    — Au train où vont les choses on s'achemine vers une situation explicitement à l'américaine, c'est à dire avec des partis de gouvernement qui se différencient par leur degrès de libéralité en matière de droits civils et par une politique sociale plus ou moins de l'ordre de la charité. Mais sur le plan de l'organisation économique — et donc de la démocratie réelle — ils seront également conservateurs. On y est pratiquement déjà, sans doute depuis le milieu des années 1980.

    — Ce qui est cocasse, c'est que Sarkozy a gagné en tenant un discours qui, pour incohérent qu'il soit quant au fond, est un modèle de réthorique politique. Suivant l'exemple de la droite américaine, il a tracé verbalement une frontière entre « nous », les vrais gens, et « on », l'ennemi à combattre. ÇA c'est l'essence même de la politique ! Définir pour qui on roule et contre qui on se bât — même si c'est en des termes sans rapport avec une quelconque réalité sociale. Et puis il a promis du changement. Il y a des gens qui ont voté pour cela, la promesse d'un changement, n'importe lequel, malgré l'arrivisme évident du candidat de l'UMP et le passif de son parti. Pendant ce temps les sociaux-démocrates tiennent un discours mesuré, ménagent tous les groupes sociaux possibles et imaginables, et promettent une sage continuité agrémentée de quelques menus réglages techniques du système. C'est peut-être une politique plus raisonnable, mais ce n'est pas ça, cette non-vision sans idéal, qui peut faire vibrer un électeur. Même de gauche. Je suis désolé de le dire, mais l'idée d'une démocratie fondée sur l'intelligence de tous est une vaste connerie. Expliquer honnêtement les subtils effets de telle nouvelle taxe ou de tel amendement institutionnel n'a aucune chance d'éveiller l'intérêt de le plupart de nos concitoyens. Ce n'est pas mépriser les gens que de reconnaitre qu'ils n'ont pas en général le bagage intellectuel et culturel qui leur permettrait de saisir la politique à son échelle technique, bien au contraire. J'aimerais que les classes moyennes instruites acceptent l'idée qu'elles ne sont pas le modèle représentatif de la population dans son ensemble. On a beau être issu d'une famille de la classe laborieuse et n'être soi-même qu'un travailleur sans patrimoine significatif, il n'empêche que l'accés aux études supérieures et à la culture suffit à nous placer hors du prolétariat. Dès qu'on sort de son milieu pour discuter politique avec des gens qui n'ont pas du tout le même vécu culturel, on se prend en pleine figure le fossé des représentations et des modes de raisonnement, voire du simple usage de la langue (comparons simplement « garantir le pouvoir d'achat » et « gagner plus »). Les sociaux-démocrates sont prudents, timorés même, ils ont des idées compliquées sur tout et le culot de rien — en tout cas, c'est l'air qu'ils se donnent sans s'en rendre compte. C'est bien gentil d'expliquer que les gouvernements socialistes font plus de croissance, ce qui devrait créer le plein d'emploi un jour si les dinosaures ne sont pas revenus d'ici là, mais quand on est dans la mouise (avec ou sans emploi), qu'est-ce qu'on en a à foutre ? Idem du SMIC à 1500 euros : quand on ne gagne même pas le SMIC, et tout aussi bien quand on gagne un peu plus que le SMIC, est-ce parlant ? À côté de cela, n'importe quel discours vigoureux parait attirant. Surtout s'il est facile à comprendre. Pendant que la gauche de gouvernement s'excuse de demander pardon et fait sincèrement allégeance aux fumeuses « réalités économiques », la droite produit ces « réalités », un vaste retour en arrière qu'elle fait passer avec succès pour la modernité. Non seulement les sociaux-démocrates perdent la bataille des idées, mais il ne la mènent même pas. En tout cas pas en des termes accessibles au plus grand nombre, ce qui dans des institutions basées sur le suffrage universel revient exactement au même.

    — Sur l'Europe fédérale, le truc qui ferait des Européens une super-nation représentée par un exécutif démocratique, la première puissance économique du monde (en PIB) et un géant politique, ça n'intéresse à peu près personne. Les classes dominantes, politiciens compris, sont très contents de l'Europe-marché, une superstructure technocratique qui met la politique économique à distance des électeurs tout en préservant les sinécures nationales. Quant aux populations, certes elles se sont largement faites à l'idée d'une Europe symbolique et économique, mais de là à réclamer une Europe proprement politique reléguant nécessairement l'identité nationale au même plan que celle des régions et des départements, il y a un chemin que je n'imagine pas nous voir parcourir de mon vivant. Cela dit, d'ici à mon centième anniversaire, j'ai le temps de devenir plus optimiste.

  3. Moi, je vois la situation plutôt comme ça :

    — Dans les grandes lignes la gauche fonctionne (ou dysfonctionne) de la même manière dans tous les pays industrialisés. Pour des raisons sociologiques : les militants s'inscrivent dans un certain profil culturel et économique, ils partagent les mêmes représentations et font les même erreurs. La droite aussi est homogène et pour le coup Sarkozy a complètement effacé les différences apparentes entre la droite française (soi-disant gaulliste) et la droite étrangère, en particulier anglo-saxonne. Par là dessus, la mécanique propre au fonctionnement des partis (ou de n'importe quelle sorte de hiérarchie) amène aux postes de direction des gens qui combinent charisme, ambition et surtout entregent — tous traits sans rapport avec l'intérêt de leur parti, et encore moins de leur base électorale. De ce point de vue, les défaites des sociaux-démocrates montrent qu'il faudrait plutôt « réactualiser le logiciel » partout. Mais je ne vois pas pourquoi une telle chose arriverait.

    — Au train où vont les choses on s'achemine vers une situation explicitement à l'américaine, c'est à dire avec des partis de gouvernement qui se différencient par leur degrès de libéralité en matière de droits civils et par une politique sociale plus ou moins de l'ordre de la charité. Mais sur le plan de l'organisation économique — et donc de la démocratie réelle — ils seront également conservateurs. On y est pratiquement déjà, sans doute depuis le milieu des années 1980.

    — Ce qui est cocasse, c'est que Sarkozy a gagné en tenant un discours qui, pour incohérent qu'il soit quant au fond, est un modèle de réthorique politique. Suivant l'exemple de la droite américaine, il a tracé verbalement une frontière entre « nous », les vrais gens, et « on », l'ennemi à combattre. ÇA c'est l'essence même de la politique ! Définir pour qui on roule et contre qui on se bât — même si c'est en des termes sans rapport avec une quelconque réalité sociale. Et puis il a promis du changement. Il y a des gens qui ont voté pour cela, la promesse d'un changement, n'importe lequel, malgré l'arrivisme évident du candidat de l'UMP et le passif de son parti. Pendant ce temps les sociaux-démocrates tiennent un discours mesuré, ménagent tous les groupes sociaux possibles et imaginables, et promettent une sage continuité agrémentée de quelques menus réglages techniques du système. C'est peut-être une politique plus raisonnable, mais ce n'est pas ça, cette non-vision sans idéal, qui peut faire vibrer un électeur. Même de gauche. Je suis désolé de le dire, mais l'idée d'une démocratie fondée sur l'intelligence de tous est une vaste connerie. Expliquer honnêtement les subtils effets de telle nouvelle taxe ou de tel amendement institutionnel n'a aucune chance d'éveiller l'intérêt de le plupart de nos concitoyens. Ce n'est pas mépriser les gens que de reconnaitre qu'ils n'ont pas en général le bagage intellectuel et culturel qui leur permettrait de saisir la politique à son échelle technique, bien au contraire. J'aimerais que les classes moyennes instruites acceptent l'idée qu'elles ne sont pas le modèle représentatif de la population dans son ensemble. On a beau être issu d'une famille de la classe laborieuse et n'être soi-même qu'un travailleur sans patrimoine significatif, il n'empêche que l'accés aux études supérieures et à la culture suffit à nous placer hors du prolétariat. Dès qu'on sort de son milieu pour discuter politique avec des gens qui n'ont pas du tout le même vécu culturel, on se prend en pleine figure le fossé des représentations et des modes de raisonnement, voire du simple usage de la langue (comparons simplement « garantir le pouvoir d'achat » et « gagner plus »). Les sociaux-démocrates sont prudents, timorés même, ils ont des idées compliquées sur tout et le culot de rien — en tout cas, c'est l'air qu'ils se donnent sans s'en rendre compte. C'est bien gentil d'expliquer que les gouvernements socialistes font plus de croissance, ce qui devrait créer le plein d'emploi un jour si les dinosaures ne sont pas revenus d'ici là, mais quand on est dans la mouise (avec ou sans emploi), qu'est-ce qu'on en a à foutre ? Idem du SMIC à 1500 euros : quand on ne gagne même pas le SMIC, et tout aussi bien quand on gagne un peu plus que le SMIC, est-ce parlant ? À côté de cela, n'importe quel discours vigoureux parait attirant. Surtout s'il est facile à comprendre. Pendant que la gauche de gouvernement s'excuse de demander pardon et fait sincèrement allégeance aux fumeuses « réalités économiques », la droite produit ces « réalités », un vaste retour en arrière qu'elle fait passer avec succès pour la modernité. Non seulement les sociaux-démocrates perdent la bataille des idées, mais il ne la mènent même pas. En tout cas pas en des termes accessibles au plus grand nombre, ce qui dans des institutions basées sur le suffrage universel revient exactement au même.

    — Sur l'Europe fédérale, le truc qui ferait des Européens une super-nation représentée par un exécutif démocratique, la première puissance économique du monde (en PIB) et un géant politique, ça n'intéresse à peu près personne. Les classes dominantes, politiciens compris, sont très contents de l'Europe-marché, une superstructure technocratique qui met la politique économique à distance des électeurs tout en préservant les sinécures nationales. Quant aux populations, certes elles se sont largement faites à l'idée d'une Europe symbolique et économique, mais de là à réclamer une Europe proprement politique reléguant nécessairement l'identité nationale au même plan que celle des régions et des départements, il y a un chemin que je n'imagine pas nous voir parcourir de mon vivant. Cela dit, d'ici à mon centième anniversaire, j'ai le temps de devenir plus optimiste.

  4. Quand tu dis que la gauche ne mène pas la bataille des idées, c’est justement sur le terrains de nouveaux territoires à conquérir, et l’Europe Fédérale en est un. Ce n’est pas « Le » truc, c’est un nouveau moyen, non encore exploré, pour la social-démocratie.
    Je ne parle pas de cette Europe Puissance dont rêvent les Fédéralistes en générale.
    Je parle d’un nouveau territoire d’expérimentation pour la démocratie sociale, et qui est à même de placer nos « libéraux », c’est à dire nos Néo-cons devant leurs propres contradictions.
    L’Europe est une échelle pertinente pour créer aujourd’hui de nouvelles avancées démocratiques, et j’y inclus de nouvelles avancées sociales.
    Cette Europe de la Social-Démocratie, c’est une Europe qui se place à hauteur du Capital, et qui utilise, enfin, les rares outils institutionnels élaborés par les différents traités.
    La multiplicité des syndicats sociaux-démocrates à travers l’Union, la multiplicité des partis sociaux-démocrates à travers l’Union est ridicule. C’est cela que j’appelle le « changement de paradigme ». Ce n’est pas une mise à jour de je ne sais quel logiciel. C’est repenser l’outil à la base. Si notre objectif de socialiste est toujours la réalisation de la démocratie sociale, alors, nous devons recréer l’outil qui correspond à la réalité présente : non plus un outil national, mais qui colle à la réalité de l’Union.
    Cela peut paraitre abstrait, mais il m’est avis que l’oeuvre de Marx le paraissait tout autant. Mais s’il est un point, parmi d’autres, où Marx s’est montré pertinent, c’est bien en ce qui concerne l’outil. Si on veut faire du politique, nous devons penser à l’outil adéquate, adapté.
    C’est de cette nouvelle organisation du politique (du PSE vers les partis nationaux et non, comme actuellement, des partis nationaux vers le PSE) que nous produirons justement ces politiques qui parlent et ne ressemblent pas à du jargon policé destiné à enrober le vide des politiques proposées. Un premier mai Européen, avec ses mots d’ordres européens, son « grand défilé », venu de toute l’Europe, à l’appel d’un syndicat Européen, je pense que cela créé du sens, et plus que tout, de la durée. Penser les partis nationaux comme les outils d’un seul et même parti politique Socialiste Européen, cela créé du sens. C’est parce que nous sommes dans la logique inverse que la majorité socialiste européenne n’a rien produit de 1998 à 2001. Chaque parti à joué son propre pays, et non le « socialisme ».
    Les inégalités à compenser dans l’Union, les problèmes majeurs que seront l’eau, l’énergie et le réchauffement dans les 50 ans appellent pourtant des décisions fortes en matière de normes que seul un pouvoir politique cohérent à l’échelle de l’Union pourrait adopter, un pouvoir qui n’hésiterait pas à utiliser l’arme des « nationalisations » si cela s’avérait nécessaires si la survie de l’espèce en dépendait (et cela sera nécessaire pour l’eau et l’énergie). Non par dogme comme ce fut le cas, mais juste pour assurer le prima d’une décision démocratiquement élaborée sur une décision discrétionnaire dictée par le profit.
    Cela peut paraître très gauchiste, mais Jacques Delors n’a jamais été très loin de cette idée. Je ne vais plus loin que sur un point : je pense que ce ne sera possible qu’avec la « fusion » des parti socialistes actuels et le prima du Parti des Socialistes Européens. Que l’heure est venue pour les socialistes Européens de discuter entre socialistes Européens. Car les courants d’idées et les différentes options traversent les frontières. Et parce que c’est de cette fusion/synergie que le courant de l’écologie politique pourra réintégrer positivement sa famille d’origine qu’est la social-démocratie. C’est à cette condition que l’on pourra envisager le salaire minimum européen, le temps de travail européen, d’autres politiques internationales, etc
    Bref, c’est seulement ainsi que les socialistes auront autre chose à proposer que que ce qu’ils font aujourd’hui.
    La chute du mur a mis fin non pas à la guerre froide. Elle nous a rendu l’Europe d’avant 1914, avec les mêmes défis, les mêmes contradictions, et 80 ans d’histoires où se sont accumulées les urgences et les défis. Mais où se sont aussi écrites des réussites importante et engrangée l’expérience. Je crois que les socialites portent aujourd’hui la responsabilité de reprendre la marche démocratique dans un monde où le culte de l’argent vide le projet démocratique de toute substance et de tout contenu, jusqu’au suicide final de notre espèce.
    Ca peut paraître archaique à certains. Mais je sais que Michel Rocard -qui ne croit plus, lui, à l’Europe ni à grand chose d’ailleurs-, voit les défis à peu près à ce niveau là…
    Je ne limiterai jamais la politique à « une politique ». Ce n’est pas comme cela que je fais, en tout cas pas en dehors des élections. Je pense qu’une élection est le moment où on récolte. Mon principal reproche à leur égart est que les socialistes ont, depuis près de 30/40 ans, cessé de semer. Il n’est pas étonnant alors, qu’aujourd’hui, ils n’aient plus rien à proposer.
    L’Europe est un fantastique chantier de réinvention de la social-démocratie.

  5. Quand tu dis que la gauche ne mène pas la bataille des idées, c’est justement sur le terrains de nouveaux territoires à conquérir, et l’Europe Fédérale en est un. Ce n’est pas « Le » truc, c’est un nouveau moyen, non encore exploré, pour la social-démocratie.
    Je ne parle pas de cette Europe Puissance dont rêvent les Fédéralistes en générale.
    Je parle d’un nouveau territoire d’expérimentation pour la démocratie sociale, et qui est à même de placer nos « libéraux », c’est à dire nos Néo-cons devant leurs propres contradictions.
    L’Europe est une échelle pertinente pour créer aujourd’hui de nouvelles avancées démocratiques, et j’y inclus de nouvelles avancées sociales.
    Cette Europe de la Social-Démocratie, c’est une Europe qui se place à hauteur du Capital, et qui utilise, enfin, les rares outils institutionnels élaborés par les différents traités.
    La multiplicité des syndicats sociaux-démocrates à travers l’Union, la multiplicité des partis sociaux-démocrates à travers l’Union est ridicule. C’est cela que j’appelle le « changement de paradigme ». Ce n’est pas une mise à jour de je ne sais quel logiciel. C’est repenser l’outil à la base. Si notre objectif de socialiste est toujours la réalisation de la démocratie sociale, alors, nous devons recréer l’outil qui correspond à la réalité présente : non plus un outil national, mais qui colle à la réalité de l’Union.
    Cela peut paraitre abstrait, mais il m’est avis que l’oeuvre de Marx le paraissait tout autant. Mais s’il est un point, parmi d’autres, où Marx s’est montré pertinent, c’est bien en ce qui concerne l’outil. Si on veut faire du politique, nous devons penser à l’outil adéquate, adapté.
    C’est de cette nouvelle organisation du politique (du PSE vers les partis nationaux et non, comme actuellement, des partis nationaux vers le PSE) que nous produirons justement ces politiques qui parlent et ne ressemblent pas à du jargon policé destiné à enrober le vide des politiques proposées. Un premier mai Européen, avec ses mots d’ordres européens, son « grand défilé », venu de toute l’Europe, à l’appel d’un syndicat Européen, je pense que cela créé du sens, et plus que tout, de la durée. Penser les partis nationaux comme les outils d’un seul et même parti politique Socialiste Européen, cela créé du sens. C’est parce que nous sommes dans la logique inverse que la majorité socialiste européenne n’a rien produit de 1998 à 2001. Chaque parti à joué son propre pays, et non le « socialisme ».
    Les inégalités à compenser dans l’Union, les problèmes majeurs que seront l’eau, l’énergie et le réchauffement dans les 50 ans appellent pourtant des décisions fortes en matière de normes que seul un pouvoir politique cohérent à l’échelle de l’Union pourrait adopter, un pouvoir qui n’hésiterait pas à utiliser l’arme des « nationalisations » si cela s’avérait nécessaires si la survie de l’espèce en dépendait (et cela sera nécessaire pour l’eau et l’énergie). Non par dogme comme ce fut le cas, mais juste pour assurer le prima d’une décision démocratiquement élaborée sur une décision discrétionnaire dictée par le profit.
    Cela peut paraître très gauchiste, mais Jacques Delors n’a jamais été très loin de cette idée. Je ne vais plus loin que sur un point : je pense que ce ne sera possible qu’avec la « fusion » des parti socialistes actuels et le prima du Parti des Socialistes Européens. Que l’heure est venue pour les socialistes Européens de discuter entre socialistes Européens. Car les courants d’idées et les différentes options traversent les frontières. Et parce que c’est de cette fusion/synergie que le courant de l’écologie politique pourra réintégrer positivement sa famille d’origine qu’est la social-démocratie. C’est à cette condition que l’on pourra envisager le salaire minimum européen, le temps de travail européen, d’autres politiques internationales, etc
    Bref, c’est seulement ainsi que les socialistes auront autre chose à proposer que que ce qu’ils font aujourd’hui.
    La chute du mur a mis fin non pas à la guerre froide. Elle nous a rendu l’Europe d’avant 1914, avec les mêmes défis, les mêmes contradictions, et 80 ans d’histoires où se sont accumulées les urgences et les défis. Mais où se sont aussi écrites des réussites importante et engrangée l’expérience. Je crois que les socialites portent aujourd’hui la responsabilité de reprendre la marche démocratique dans un monde où le culte de l’argent vide le projet démocratique de toute substance et de tout contenu, jusqu’au suicide final de notre espèce.
    Ca peut paraître archaique à certains. Mais je sais que Michel Rocard -qui ne croit plus, lui, à l’Europe ni à grand chose d’ailleurs-, voit les défis à peu près à ce niveau là…
    Je ne limiterai jamais la politique à « une politique ». Ce n’est pas comme cela que je fais, en tout cas pas en dehors des élections. Je pense qu’une élection est le moment où on récolte. Mon principal reproche à leur égart est que les socialistes ont, depuis près de 30/40 ans, cessé de semer. Il n’est pas étonnant alors, qu’aujourd’hui, ils n’aient plus rien à proposer.
    L’Europe est un fantastique chantier de réinvention de la social-démocratie.

  6. Quand tu dis que la gauche ne mène pas la bataille des idées, c’est justement sur le terrains de nouveaux territoires à conquérir, et l’Europe Fédérale en est un. Ce n’est pas « Le » truc, c’est un nouveau moyen, non encore exploré, pour la social-démocratie.
    Je ne parle pas de cette Europe Puissance dont rêvent les Fédéralistes en générale.
    Je parle d’un nouveau territoire d’expérimentation pour la démocratie sociale, et qui est à même de placer nos « libéraux », c’est à dire nos Néo-cons devant leurs propres contradictions.
    L’Europe est une échelle pertinente pour créer aujourd’hui de nouvelles avancées démocratiques, et j’y inclus de nouvelles avancées sociales.
    Cette Europe de la Social-Démocratie, c’est une Europe qui se place à hauteur du Capital, et qui utilise, enfin, les rares outils institutionnels élaborés par les différents traités.
    La multiplicité des syndicats sociaux-démocrates à travers l’Union, la multiplicité des partis sociaux-démocrates à travers l’Union est ridicule. C’est cela que j’appelle le « changement de paradigme ». Ce n’est pas une mise à jour de je ne sais quel logiciel. C’est repenser l’outil à la base. Si notre objectif de socialiste est toujours la réalisation de la démocratie sociale, alors, nous devons recréer l’outil qui correspond à la réalité présente : non plus un outil national, mais qui colle à la réalité de l’Union.
    Cela peut paraitre abstrait, mais il m’est avis que l’oeuvre de Marx le paraissait tout autant. Mais s’il est un point, parmi d’autres, où Marx s’est montré pertinent, c’est bien en ce qui concerne l’outil. Si on veut faire du politique, nous devons penser à l’outil adéquate, adapté.
    C’est de cette nouvelle organisation du politique (du PSE vers les partis nationaux et non, comme actuellement, des partis nationaux vers le PSE) que nous produirons justement ces politiques qui parlent et ne ressemblent pas à du jargon policé destiné à enrober le vide des politiques proposées. Un premier mai Européen, avec ses mots d’ordres européens, son « grand défilé », venu de toute l’Europe, à l’appel d’un syndicat Européen, je pense que cela créé du sens, et plus que tout, de la durée. Penser les partis nationaux comme les outils d’un seul et même parti politique Socialiste Européen, cela créé du sens. C’est parce que nous sommes dans la logique inverse que la majorité socialiste européenne n’a rien produit de 1998 à 2001. Chaque parti à joué son propre pays, et non le « socialisme ».
    Les inégalités à compenser dans l’Union, les problèmes majeurs que seront l’eau, l’énergie et le réchauffement dans les 50 ans appellent pourtant des décisions fortes en matière de normes que seul un pouvoir politique cohérent à l’échelle de l’Union pourrait adopter, un pouvoir qui n’hésiterait pas à utiliser l’arme des « nationalisations » si cela s’avérait nécessaires si la survie de l’espèce en dépendait (et cela sera nécessaire pour l’eau et l’énergie). Non par dogme comme ce fut le cas, mais juste pour assurer le prima d’une décision démocratiquement élaborée sur une décision discrétionnaire dictée par le profit.
    Cela peut paraître très gauchiste, mais Jacques Delors n’a jamais été très loin de cette idée. Je ne vais plus loin que sur un point : je pense que ce ne sera possible qu’avec la « fusion » des parti socialistes actuels et le prima du Parti des Socialistes Européens. Que l’heure est venue pour les socialistes Européens de discuter entre socialistes Européens. Car les courants d’idées et les différentes options traversent les frontières. Et parce que c’est de cette fusion/synergie que le courant de l’écologie politique pourra réintégrer positivement sa famille d’origine qu’est la social-démocratie. C’est à cette condition que l’on pourra envisager le salaire minimum européen, le temps de travail européen, d’autres politiques internationales, etc
    Bref, c’est seulement ainsi que les socialistes auront autre chose à proposer que que ce qu’ils font aujourd’hui.
    La chute du mur a mis fin non pas à la guerre froide. Elle nous a rendu l’Europe d’avant 1914, avec les mêmes défis, les mêmes contradictions, et 80 ans d’histoires où se sont accumulées les urgences et les défis. Mais où se sont aussi écrites des réussites importante et engrangée l’expérience. Je crois que les socialites portent aujourd’hui la responsabilité de reprendre la marche démocratique dans un monde où le culte de l’argent vide le projet démocratique de toute substance et de tout contenu, jusqu’au suicide final de notre espèce.
    Ca peut paraître archaique à certains. Mais je sais que Michel Rocard -qui ne croit plus, lui, à l’Europe ni à grand chose d’ailleurs-, voit les défis à peu près à ce niveau là…
    Je ne limiterai jamais la politique à « une politique ». Ce n’est pas comme cela que je fais, en tout cas pas en dehors des élections. Je pense qu’une élection est le moment où on récolte. Mon principal reproche à leur égart est que les socialistes ont, depuis près de 30/40 ans, cessé de semer. Il n’est pas étonnant alors, qu’aujourd’hui, ils n’aient plus rien à proposer.
    L’Europe est un fantastique chantier de réinvention de la social-démocratie.

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