COMME UN LENDEMAIN DE CUITE…

C

Une élection, ça a toujours été pour moi un peu comme un lendemain de cuite, quelqu’en soit le résultat. Cela vient de loin. Souvenir de l’exaltation de mon père, en 1978, resté accroché à la télévision jusque tard au matin : son entreprise attendait les élections pour licencier et seule une victoire de la gauche aurait pu, peut-être, changer les choses. Il n’était pas dupe, pourtant, mais un répis, juste un répis dans ces cas là… Le capitalisme est un système froid qui décide de la vie des hommes dans le silence feutrés de conseils d’administration. C’est ce que disait déjà Jaurès, il y a une centaine d’année. Jaurès, la nouvelle idole de Nicolas Sarkosy… Laurence Parisot a du éclater de rire !

J’écris un blog honnète. Je suis lu, j’ai tâché de concilier la campagne électorale avec cet exercice périlleux du journal. Pas toujours facile et vous avez constaté mes longs silences. Pour ce deuxième tour, je pousserai plus loin l’honnêteté, et ce dès aujourd’hui : je pense que Nicolas Sarkosy a dors et déjà gagné. C’était visible lors de la soirée électorale de dimanche soir.

Bien sûr, Ségolène Royal peut gagner ce scrutin. Mais alors il faudrait dès cette semaine reposer la question du but réel de cette élection, un objectif à minima qui serait d’abord de faire de la prochaine assemblée une assemblée constituante dans le but de changer de république. C’est là à mes yeux le seul moyen de faire une « alliance » avec François Bayrou qui ne trahisse pas les valeurs -différentes- des deux partis politiques et qui ne trahisse pas non plus les autres candidats (ainsi que leurs électeurs) de gauche et d’extrème gauche qui, honnètement, appellent à voter pour Ségolène Royal.

Oui, sur les institutions, il y a une convergence très nette : proportionnelle, indépendance de la justice, renforcement des pouvoirs du conseil constitutionnel, de la cour des comptes, réforme du CSA, reconnaissance dans la constitution des régions comme territoires à part entière, etc. Sur cet objectif, nous pourrions en effet constituer une large majorité qui ne trahisse personne et au contraire réalise rapidement pour Bayrou sa « 6ème république », pour Ségolène l’un des « 7 piliers du pacte présidentiel » (le 5ème, je crois). La proportionnelle pourrait, elle, en dehors d’une promesse déjà existante chez les 2 candidats, être un gage offert à la gauche de la gauche dont elle pourrait à l’avenir se servir en constituant des listes communes permettant de dépasser les seuils nécessaires d’éligibilité.

Une telle Réforme, la 6ème république, serait seule à même de dépasser le « bloc » Sarkosy car il y a de ce côté là une réelle volonté majoritaire. De plus, ce serait la seule base possible pour la seule « alliance » qui puisse battre Nicolas Sarkosy en restant chacun soit même, sans rien renier.

Au cours de cette campagne à minima, pourrait également réaffirmer la priorité accordée à l’environnement par la création d’un super ministère au développement durable, doté de moyens important, notamment coercitifs.

Je vois là le seul moyen de gagner, non pas contre Nicolas Sarkosy, mais pour faire autre chose en commençant pas le faire autrement, et en avouant honnètement qu’une fois ce travail terminé, de nouvelles élections seraient convoquées afin de clarifier la situation dans ce dadre institutionnel nouveau.

Voilà mon analyse, ma vision de la chose.

Je ne pense pas, pourtant, que ce sera la voie empruntée. 2 appareils sont en compétitions et François Bayrou a beau dire qu’il est un homme du renouveau, c’est lui qui a le plus à perdre au renouveau : il veut en être le seul artisan (ambition) et il dispose de l’appareil le plus réfractaire comme l’attestent les déjà 7 raliements de députés à Nicolas Sarkosy. Les électeurs qui se seront fait le plus « avoir » dimanche dernier sont à l’UdF.

François Bayrou a tout intérêt à ne pas aller dans ce sens et à « laisser » élire Sarkosy, avec l’espoir ainsi d’être ménagé localement aux législatives mais aussi à s’offrir comme un recours en 2012 bref, à parier sur un « échec ». Ce fut la stratégie de Chirac en 1981. Laisser faire.

Mais du côté gauche, cela ne va guère mieux. Il y a ceux qui parient sur une défaite pour reprendre la main, il y a l’appareil du Parti Socialiste tiraillé par des ambitions qui se cachent derrière des « lignes politiques » prétenduement divergeantes. Je suis persuadé en revanche que les militants sont eux prêt à suivre dans le sens d’une aventure nouvelle.

Alors ? Il est peu probable que cette aventure « institutionnelle » ne voit le jour. Les socialistes vont sacrifier Ségolène Royal, François Bayrou ses électeurs « de gauche ». Chacun trouvera le discours emballage de « la fidélité à ses valeurs », promettra des lendemains meilleurs. Bayrou avec une « force nouvelle » et le PS qui aura trouvé quelques répis.

Ségolène Royal a offert la possibilité de ce débat « ouvert et public » avec François Bayrou. Je souhaite juste qu’elle ne sacrifie pas les électeurs à une élection (la « ligne Rocard »). François Bayrou y répondra certainement, je souhaite qu’il ne mélange pas son ambition politique et la réelle possibilité de changement.

Si l’intelligence prévalait, nous pourrions avoir la constitution d’une coalition à objectifs limités mais clairs qui, sans renier ni trahir, permetrait non seulement une victoire mais également un premier chapelet de réformes profondes essentiellement institutionnelles. Et je suis persuadé que s’il n’y a pas tractations ni reniements, la dynamique changera de camps et passera du côté de Ségolène Royal (qui achèvera au passage la transformation du Parti Socialiste auquel les militants aspirent et que ses responsables freinent des 4 fers). Une coalition auquel pourront se joindre les verts et tous ceux qui le souhaitent, à gauche puisque ses objectifs seront essentiellement institutionnels.

Et pour la suite ? Elle sera beaucoup plus ouverte puisque l’assemblée sera élue à la proportionnelle.

Hors de cette voix, il n’y a pas de changement possible.

Les pauvres (smicards, etc) renonceront à la médecine car il faudra payer les 50 premiers Euros (4 franchises : une chez le généraliste, une chez le pharmacien, une chez le spécialiste, une à l’hôpital… en gros, vous vous cassez une jambe, vous payer au minimum 200 Euros). Les 10% de Français les plus riches gagneront, eux, plus d’argent en payant moins d’impôts et, s’ils ont des actions en bourse, ils engrangeront des bénéfices moins taxés. Ceux là même venant des entreprises qui auront pu licencier plus facilement, ou ceux des assurances privées qui proposeront aux classes moyennes des tarifs élevés pour couvrir les franchises citées plus haut. Les classes moyennes se verront imposer de travailler plus pour gagner plus (elles pourront ainsi prendre une de ces nouvelles assurances qui couvrent les franchises), ce sera la fin des RTT qui ont « tué la valeur travail ». Les Français seront heureux, comme le leur dira les chaines de télévision publique, les chaînes privées TF1, M6 et France 2. La délinquence baissera, comme ce sera écrit dans les journaux. Il n’y aura plus de scandale, en tout cas proche de l’UMP ou des dirigeants d’entreprise : les juges y veilleront. Rachida Dati quand à elle, prouvera au monde entier qu’elle est vraiment plus Française que toutes les Françaises, une belle réussite. Le chômage baissera, aussi, avec les salaires et les conditions de travail, mais bon, « on peut pas tout avoir », nous dira la télévision qui s’auto-congratulera devant des statistiques à l’américaine.

Moi, Nicolas Sarkosy ne me fait pas peur, en fait. Il me rend triste, tout simplement. Triste pour les millions de gens qui vont passer à la caisse.

Avec près de 26% au premier tour, un très beau score, Ségolène Royal ne doit pas sacrifier ses électeurs car il n’y aurait ni victoire ni (nécessaire) opposition forte ensuite. En étant elle même et en proposant une « convergeance sur des objectifs à minima », elle pourra placer et François Bayrou et ses électeurs devant un choix historique : sortir le centre de la droite sans renier eux même leur propre travail ni leur propre dynamique. Et, ensemble, mettre en place les nouvelles institutions d’une France nouvelle, démocratique, moderne et solidaire.

Y sommes nous prêt ?

De Tôkyô

Suppaiku

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