La brune et moi, ou un ultime message du punk

Soirée au Palais de Tôkyô, donc. Sorti vers 18h15 du métro Iena, tourné dans le quartier à la recherche d’une banque et d’un papetier pour y acheter une cartouche agendaire, il était 18h55 quand je suis arrivé devant le batiment de ce musée d’art d’aujourd’hui, totalement calé sur notre époque, une friche.
Les sociologues, urbanistes, architectes et historiens de la pensée devraient s’interroger sur l’importance que prennent les friches, de nos jours. Une friche est un territoire qui n’est ni en devenir ni même chargé de passé. C’est un espace « en considération », c’est là parce que ce n’est pas ailleurs, il y a eu et il y aura éventuellement une occupation humaine, animale ou végétale. C’est l’espace de l’indécision. La France ressemble terriblement à une friche : tout possible y est certainement probable si c’est ainsi qu’on le souhaite…
Le Palais de Tokyo se présente donc comme un grand squatt officiel. Le commerce comme partout y est présent et la jeune et moins jeune bourgeoisie débraillée mais emplie de la culture du temps présent ainsi que de l’aisance propre à sa classe sociale s’y retrouve. Elle doit sa plaire dans cet espace où elle est trouve si belle en son miroir… Qu’on ne s’y trompe pas, je n’ai rien contre cet endroit, je continue de privilégier le fond sur la forme. Mais je trouve la forme finalement terriblement datée. PaliKao, c’est si loin… Mais la jeune et moins jeune bourgeoisie aime se sentir encore jeune et spontannée, écartée de toute convention. Au final, elle s’y vautre, dans la convention, dans cette espace qui ne ressemble à rien, si ce n’est à elle même.
Mais quand donc les trentenaires décideront ils de grandir ????? Je repense à ce face à face Fienkelkraut/jesaispuki (rédacteur aux Inrockuptibles et réalisateur sur FC) sur France Culture un matin… le vide de ce gars face à Fienkelkraut… Avoir une culture riche du présent ne donne aucune profondeur, c’est du vide. Elle a raison, Badinter : le féminisme n’est pas né en 68, tout comme les luttes de ci ou ça. Il y a toujours un avant dans la transgression, une histoire du décallage, du rêve, du refus ou des idées. Ce lieu sans forme est à l’image de la pensée de cette « élite » Inrockuptable : il n’y q aucun fond, aucune sincérité, aucune franchise, que de l’emballage. Et Finkelkraut a raison de dire qu’on ne dit pas de Ramadan le dizième de ce qu’on a dit sur lui. J’aimerai bien me le taper, tiens, Fienkelkraut, ses manières, sa suffisance bourgeoise hétérosexuelle payé pour lire des livres et avoir un point de vue sur tout… Mais j’irais franchement, justement, pas en le traitant de facho comme ça a été fait, mais en lui disant que c’est un coincé des fesses et que s’il voit des émeutes partout, il a qu’à arrêter la TV ! Que demander le mariage gay, l’adoption, ce n’est pas communautariste, c’est au contraire généraliser l’égalité. Que l’esclavage moderne puis/et la colonisation sont au centre des relations que le nord a tissé avec le sud et qu’ils sont la source de la haine « anti blanche » qui le scandalise tant, sans que sont discours sirupeux et pédant n’y fasse rien : c’est trop facile de dire aux gens de se calmer… Les noirs antillais vivent aujourd’hui encore dans une sous France faite de chômage, de RMI et d’exode forcé vers la métropole. C’est cela l’égalité de Monsieur Finkelkraut ? Voilà, Finkelkraut n’est pas un facho, ce n’est qu’un penseur bourgeois new look, coincé et étroit. Mais je n’ai rien lu qui me révolte en ses propos. Juste des propos de vieux con. Et quelques vérité aussi, une exigeance d’élévation du niveau de connaissance culturelle dans les quartiers difficile, d’émancipation par l’école, un respect de l’Afrique comme terre de civilisation et le refus de voir les Africains comme des victimes qui sont des sentiments que je partage et que je tiens de mon père, l’Algérien debout fier que ce soient les Algériens eux même qui aient gagné leur indépendance.
Face à lui, un de ces légumes du temps présent, plein de bon sentiments, un de ces gars qui aiment les noirs parce qu’il faut les aimer, qui voient en eux des victimes d’une société forcément dégueulasse qu’il faut changer, c’est d’ailleurs pour cela qu’il s’occupe d’un magazine de rock…
J’étais entouré de « comme ce type », hier soir. Des jeunes trentenaire venus voir un film qu’il fallait voir dans un lieu où il fallait le voir autours d’une exposition où il fallait aller et avant un vernissage où il y aurait forcément « tout le monde » (il y avait en effet un vernissage après). Je ne sais pas, mais moi, avoir revu Anoushka, Edith Nylon, Marquis de Sade, je sais pas mais c’était du rock, tout ça. Ben non, ces « djeunes » ils ne savent pas bouger. Ont ils compris à quel point cette « bande de naze » qui joue de la musique de bab devant Anoushka la punkette leurs ressemblent ? Même coupe de cheveux, même pantalons en velour, même rifs de guitare électrique… Non, ils ont vu u film sorti du passé qui viendra nourrir leur présent, « trop drôle »… C’est qu’une bande de vieux.
En sortant, j’aurais rêvé que ce film passe à Vault en Velin, à Sarcelle ou aux 4000 à la Courneuve, les types auraient hurlé, craché sur le film, traité Anoushka de « salope », mais ils auraient aussi fini par rire, elle aussi elle pique dans les magasins, elle aussi, elle gueule, elle se défonce, elle se fait chier et elle retrouve ses potes au Halles parce qu’il n’y a rien d’autre à faire, et elle aussi, elle veut son groupe, chanter du rock (eh ouais, pas du rap!). Mais peut être dans le lot du public, un petit nombre aurait dit : « respect! ». Parce que quand on voit un nanar aussi bien ficelé, traduisant le climat d’une époque avec autant d’énergie, moi, je lui dis « respect » au réalisateur de cette « brune et moi »… Ce n’est pas un film sur le « rock », c’est un film punk. Ca rime à rien, c’est que du fun, de l’envie, à l’image des fringues en emballage plastique d’un des groupes… C’est pas du skissfait, c’est du comme on veut pourvu que ça bouge et que ça casse tout. C’est jeune. C’est de l’énergie. Le contraire de ces fumeurs de joints de l’est parisien cultivé…
Ca faisait 25 ans que j’avais pas eu envie de pogotter comme hier soir.
Merci d’avoir réalisé ce film.
Et à vous, merci de m’avoir lu.
Suppaiku, de Paris.


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